Analyse linéaire le Crapaud Tristan Corbière
Publié le 26/02/2025
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«
La poésie du XIXe au XXIe siècle.
Parcours : Emancipations créatrices.
Analyse linéaire, texte n°4 : Tristan Corbière, «Le crapaud».
Les Amours jaunes.
Introduction
En 1884, Paul Verlaine écrit l’ouvrage Les poètes maudits, dans lequel il rend
hommage à des poètes dont il apprécie les écrits et qu’il souhaite faire connaître au grand
public.
Un poète maudit, comme l’entend Verlaine, se distingue par sa volonté de
s’émanciper des carcans de la poésie traditionnelle, c’est pourquoi, il est souvent marginalisé,
ostracisé, voire, rejeté.
Le premier article de Verlaine est consacré à un poète alors inconnu
du grand public : Tristan Corbière, l’auteur des Amours jaunes (1873).
Dans ce recueil
d’inspiration autobiographique, Corbière privilégie les formes originales : vers disloqués et
décousus ainsi que les thèmes audacieux, en rupture totale avec le romantisme et le parnasse.
C’est par exemple le cas dans le poème «Le Crapaud », un sonnet inversé dans lequel le poète
rompt totalement avec la tradition du poète oiseau (tourterelle, rossignol, albatros) pour lui
substituer l’image du poète laid et disgracieux.
Problématique : Comment Corbière met-il en scène l’image du poète maudit et incompris ?
Mouvements :
I.
Du vers 1 au vers 6 : Un décor énigmatique et étouffant.
II.
Du vers 7 au vers 14 : Un poème autoréflexif, le poète crapaud.
I.
Un décor énigmatique et étouffant (vers 1 au vers 6)
Citation
Titre : Le crapaud.
Procédé
Référence à Victor Hugo.
V 1 «Un chant dans une nuit
sans air...»
Phrase nominale inachevée.
+ Article indéfini «un»
V1 «Un chant» + V4 «Un
chant»
Anaphore
V1 : «dans une nuit»
Adverbe de lieu.
Explication
La Légende des siècles
contient un long poème «Le
Crapaud » qui unit la laideur
à la spiritualité.
Corbière fait
appel à cet imaginaire
hugolien pour s’approprier
cette image de l’animal mais
également la parodier :
annonce le projet du poème.
Début mystérieux et
énigmatique : On connaît le
thème mais on ignore le
prédicat, qui chante ?
L’absence de groupe verbal
+ l’article indéfini égarent le
lecteur.
Le chant renvoie à la
fonction du poète (cf.
Orphée).
Corbière annonce
dès le début le thème des
deux tercets.
Suggère l’idée d’un chant
enfermé, étouffé.
V1 : sans air...
V1: «nuit» + «La lune» +
«vert»
V2 + V3 «La lune plaque en
métal clair/Les découpures
du vert sombre»
V1 : sans air...
+ V2 «- La
lune»
V4 : «comme un écho»,
V5 : tout vif/Enterré.
V5 «sous le massif» V5
«dans l’ombre»
V6 : «Ca» + «C’est»
Polysémie
Air garde son sens initial
mais peut aussi renvoyer au
sens musical (mélodie
vocale et instrumentale) :
ambiance étouffante et
inquiétante + idée d’un
chant isolé, discontinu et
sans accompagnement
musical.
Champ lexical de la nature + La nuit et la nature sont des
Référence à un imaginaire
topoï romantiques : moment
romantique.
et cadre appropriés pour
Métaphore filée.
l’inspiration, la méditation
ou les déclarations des
sentiments.
Or, dans le
poème de Corbière la nuit
devient pesante et
angoissante.
Corbière mêle
une image considérée
comme poétique, la lune, à
des éléments triviaux, peu
naturels «métal» + «
découpures»
Aposiopèse + Tiret
Nous avons l’impression
qu’il y a un dialogue.
Toutefois, les deux locuteurs
ne semblent pas s’écouter et
s’interrompent sans arrêt ce
qui donne une impression de
polyphonie et renforce
l’ambiance inquiétante.
+
disharmonie du poème.
Comparaison
Donne l’impression d’un
chant discontinu mais
sonore et répété.
Antithèse + enjambement.
Insiste sur le caractère
paradoxal et contradictoire
de ce chant, contradiction
renforcée par
l’enjambement.
Le chant
nocturne, introduit l’idée de
la mort : renforce le
sentiment d’angoisse.
Synecdoque/ Compléments
Massif peut renvoyer à un
circonstanciels de lieu.
tombeau = fait écho à
«Enterré»
Les CCL Renforcent l’idée
d’un chant enfermé et
étouffé.
Pronoms démonstratifs
Laisse planer un mystère sur
l’origine du chant +
pronoms dépréciatifs.
V6 : se tait
Premier verbe conjugué
V6 : Viens + «Ca» V6 +
«là»
Impératif présent +
déictiques.
Premier verbe conjugué,
pour, paradoxalement,
signaler le silence et donc
l’absence de chant.
Cela
signale également le
caractère discontinu du
poème.
L’un des locuteurs incite
l’autre à le suivre.
Cette
invitation peut être
interprétée comme une
invitation faite au lecteur.
Les déictiques (qui donnent
des indications sur la
situation d’énonciation)
théâtralisent le poème : mise
en scène de l’apparition du
crapaud.
II.
Un poème autoréflexif : le poète crapaud.
Citation
- Un Crapaud !
Procédé
Phrase nominale
exclamative + Volta
(moment de basculement)
V7 : «Un crapaud !»
V9 : «Vois-le»
Discours direct + déictique
V7 : «Crapaud !» , V7
«peur», V10 «Horreur!»
Exclamation + champ
lexical de l’effroi
V7/V8 : «Pourquoi cette
peur,/Près de moi, ton soldat
fidèle ?
Interrogation
Explication
Apparition soudaine du
crapaud qui éveille la
curiosité du lecteur.
Chaque
début de strophe commence
par l’anaphore «Chant» sauf
celle-ci.
L’exclamation
montre l’étonnement et le
dégoût du locuteur.
Le crapaud a une
symbolique précise dans
l’imaginaire européen : il se
tient sur l’épaule gauche des
sorcières et symbolise le
démon + Selon un vieux
mythe, la pierre qu’ils ont
dans la tête et un talisman
précieux pour obtenir le
bonheur sur la terre.
Théâtralisation de
l’apparition du crapaud.
Effet de surprise mis en
scène par le poète.
Suggère l’effroi et le dégoût
qu’inspire le crapaud à l’un
des interlocuteurs.
Bien qu’elle reste imprécise,
la situation d’énonciation est
peu à peu révélée : il s’agit
V8 : Ton soldat fidèle
Métaphore
V9 : «tondu», «sans ailes»
Adjectif dévalorisant +
adverbe de négation.
V9 : Poète
Synérèse
V10 : Rossignol de la boue
Métaphore + Oxymore
V11 : Il chante.
V12 : Œil de lumière
V11 : Horreur !! - Horreur
Phrase simple avec un verbe
conjugué.
Deux points d’exclamation
+ répétition (Epizeuxe)
V11 Horreur pourquoi ?
Interrogation directe
V12 : Vois-tu pas son œil de
lumière...
Interrogation + Négation
probablement d’un couple
d’amoureux.
L’homme du couple se
montre protecteur et atténue
la laideur du crapaud+ nous
pouvons supposer que le
pronom personnel «moi»
fait référence au poète.
Le crapaud est décrit comme
une créature amputée, il est
à l’opposé d’un oiseau
(symbole du poète).
Aile est
au singulier pour insister sur
la privation et l’incapacité à
s’élever + sans aile renvoie à
«sans air» du V1 : Portrait
en opposition totale avec
l’image du poète sublime.
Autodérision de Corbière, le
poète ne se prend....
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