Analyse lettre 4 Les Liaisons dangereuses
Publié le 24/05/2024
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«
Les liaisons dangereuses de Laclos
Lettre 4
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Texte :
Le Vicomte de Valmont à la Marquise de Merteuil, à Paris.
Vos ordres sont charmants; votre façon de les donner est plus aimable encore;
vous feriez chérir le despotisme.
Ce n'est pas la première fois, comme vous
savez, que je regrette de ne plus être votre esclave; et tout monstre que vous
dites que je suis, je ne me rappelle jamais sans plaisir le temps où vous
m'honoriez de noms plus doux.
Souvent même je désire de les mériter de
nouveau, et de finir par donner, avec vous, un exemple de constance au monde.
Mais de plus grands intérêts nous appellent; conquérir est notre destin; il faut le
suivre: peut-être au bout de la carrière nous rencontrerons- nous encore; car, soit
dit sans vous fâcher, ma très belle Marquise, vous me suivez au moins d'un pas
égal; et depuis que, nous séparant pour le bonheur du monde, nous prêchons la
foi chacun de notre côté, il me semble que dans cette mission d'amour, vous
avez fait plus de prosélytes que moi.
Je connais votre zèle, votre ardente ferveur;
et si ce Dieu-là nous jugeait sur nos Œuvres, vous seriez un jour la Patronne de
quelque grande ville, tandis que votre ami serait au plus un Saint de village.
Ce
langage vous étonne, n'est-il pas vrai? Mais depuis huit jours, je n'en entends, je
n'en parle pas d'autre; et c'est pour m'y perfectionner, que je me vois forcé de
vous désobéir.
Ne vous fâchez pas et écoutez-moi.
Dépositaire de tous les secrets de mon cœur,
je vais vous confier le plus grand projet que j'aie jamais formé.
Que me proposezvous? de séduire une jeune fille qui n'a rien vu, ne connaît rien; qui, pour ainsi
dire, me serait livrée sans défense; qu'un premier hommage ne manquera pas
d'enivrer et que la curiosité mènera peut-être plus vite que l'Amour.
Vingt autres
peuvent y réussir comme moi.
Il n'en est pas ainsi de l'entreprise qui m'occupe;
son succès m'assure autant de gloire que de plaisir l'Amour qui prépare ma
couronne hésite lui-même entre le myrte et le laurier, ou plutôt il les réunira pour
honorer mon triomphe.
Vous-même, ma belle amie, vous serez saisie d'un saint
respect, et vous direz avec enthousiasme: " Voilà l'homme selon mon cœur.
"
Vous connaissez la Présidente Tourvel, sa dévotion, son amour conjugal, ses
principes austères.
Voilà ce que j'attaque; voilà l'ennemi digne de moi; voilà le
but où je prétends atteindre:
« Et si de l'obtenir je n'emporte le prix,
J'aurai du moins l'honneur de l'avoir entrepris.
»
On peut citer de mauvais vers, quand ils sont d'un grand Poète [La Fontaine].
Vous saurez donc que le Président est en Bourgogne, à la suite d'un grand procès
(j'espère lui en faire perdre un plus important).
Son inconsolable moitié doit
passer ici tout le temps de cet affligeant veuvage.
Une messe chaque jour,
quelques visites aux Pauvres du canton, des prières du matin et du soir, des
promenades solitaires, de pieux entretiens avec ma vieille tante, et quelquefois
un triste Wisk, devaient être ses seules distractions.
Je lui en prépare de plus
efficaces.
Mon bon Ange m'a conduit ici, pour son bonheur et pour le mien.
Insensé! je regrettais vingt-quatre heures que je sacrifiais à des égards d'usage.
Combien on me punirait, en me forçant de retourner à Paris! Heureusement il
faut être quatre pour jouer au Wisk; et comme il n'y a ici que le Curé du lieu, mon
éternelle tante m'a beaucoup pressé de lui sacrifier quelques jours.
Vous devinez
que j'ai consenti.
Vous n'imaginez pas combien elle me cajole depuis ce moment,
combien surtout elle est édifiée de me voir régulièrement à ses prières et à sa
Messe.
Elle ne se doute pas de la Divinité que j'y adore.
Me voilà donc, depuis quatre jours, livré à une passion forte.
Vous savez si je
désire vivement, si je dévore les obstacles: mais ce que vous ignorez, c'est
combien la solitude ajoute à l'ardeur du désir.
Je n'ai plus qu'une idée; j'y pense
le jour, et j'y rêve la nuit.
J'ai bien besoin d'avoir cette femme, pour me sauver du
ridicule d'en être amoureux: car où ne mène pas un désir contrarié? Ô délicieuse
jouissance! Je t'implore pour mon bonheur et surtout pour mon repos.
Que nous
sommes heureux que les femmes se défendent si mal! nous ne serions auprès
d'elles que de timides esclaves.
J'ai dans ce moment un sentiment de
reconnaissance pour les femmes faciles, qui m'amène naturellement à vos pieds.
Je m'y prosterne pour obtenir mon pardon, et j'y finis cette trop longue Lettre.
Adieu, ma très belle amie: sans rancune.
Du Château de ..., 5 août 17**
Éléments d’introduction et contexte :
Laclos :
- militaire (officier d’artillerie)
- à des connaissances scientifiques
- auteur peu connu qui a peu écrit…
4ème lettre :
- lettre d’un libertin
- Valmont refuse la requête de Merteuil de séduire Cécile pour se venger de
Gercourt.
Il lui explique que ce n’est pas un projet à la hauteur de sa réputation.
Il
en profite aussi pour lui exposer son projet : séduire Mme de Tourvelle.
Les procédés rhétoriques et leur interprétation :
Procédés
CL de la religion « messe »
« pieux » « prières » « Curé »
CL de la religion « mission »
« ferveur » « prêchons la foi »
« prosélytes » « divinité »
« nos œuvres »
Périphrases religieuses « La
Patronne de....
»
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