Analyse De L'incipit De Bel-Ami de Maupassant (Première littéraire)
Publié le 09/09/2018
Extrait du document
La réaction ne se fait pas attendre : « Les femmes avaient levé la tête vers lui ». Elles sont dépeintes comme les voit Duroy : le point de vue est interne. Une mention particulière est accordée à la maîtresse de musique. L’intéresse-t-elle un peu ? Elle est d’une classe légèrement supérieure aux ouvrières, mais « entre deux âges » et surtout très « négligée ». La fin du texte confirme les intentions de Duroy : « un désir [...] le travaillait, celui d’une rencontre amoureuse. Comment se présenterait-elle ? Il n’en savait rien, mais il l’attendait depuis trois mois, tous les jours, tous les soirs ». Dans le récit du narrateur omniscient est intercalée une phrase au style indirect libre qui donne vie au questionnement incessant du jeune homme (comment se présentera-t-elle ?)
Duroy est jeune, d’où une certaine naïveté sympathique traduite par l’expression : « Il n’en savait rien » et par la reprise insistante : « tous les » ; il se montre en la circonstance assez passif : il « attendait » (deux occurrences), « il espérait ». Le jeune séducteur n’est pas encore très entreprenant. Maupassant, sans le dire directement, nous fait aussi comprendre que Duroy est un conquérant : « et il avançait brutalement dans la rue pleine de monde, heurtant les épaules, poussant les gens pour ne point se déranger de sa route ». Les assonances en [ã] évoquent les cuivres de la musique militaire. Il frappe du talon, qui veut-il conquérir? Les femmes, bien sûr (« il espérait toujours plus et mieux ») mais pas seulement les femmes : « Il avait l’air de toujours défier quelqu’un, les passants, les maisons, la ville entière ». Et comment apparaît la ville ? Comme « étouffante » : « Les égouts soufflaient par leurs bouches de granit leurs haleines empestées ». L’animisation effectuée par la métaphore « bouches » prolongée par « haleines » suscite la répulsion quant aux « miasmes infâmes des eaux de vaisselle et des vieilles sauces », ils annoncent la description de l’immeuble où habite Duroy : « Une odeur lourde de nourriture, de fosse d’aisances et d’humanité, une odeur stagnante de crasse et de vieille muraille » (chapitre 3) le caractérise, d’où « une sensation de dégoût et une hâte de sortir de là, de loger [...] en des demeures propres » (chapitre 3). Tout n’est pas dit dans le chapitre d’introduction, mais esquissé.
Cette introduction au roman est d’une rapidité et d’une efficacité exceptionnelles. Le héros est surpris en action et décrit en un mouvement qui va de l’extérieur vers l’intérieur par un narrateur omniscient. Ce n’est pas le héros idéal traditionnel : c’est un « joli garçon », mais il est pauvre, pas distingué (c’est un ancien sous-officier) et il a l’air d’un mauvais sujet. Ses intérêts sont très matérialistes : la nourriture, la boisson, les femmes. Le personnage se meut dans un cadre réel de Paris, dans les classes populaires. Par ailleurs, le narrateur ouvre des perspectives sur l’importance de l’argent et des femmes dans l’intrigue qui va suivre.
«
paragraphe que se place la description : « Grand, bien fait ».
Le narrateur est extrêmement précis sur
certains détails comme les cheveux avec d’abord la couleur « blond, d’un blond châtain vaguement roussi »,
puis la qualité « frisés naturellement » et enfin la disposition : « séparés par une raie au milieu du crâne ».De même, le narrateur s’attarde sur les yeux de Duroy : « bleus, clairs ».
Le procédé est le même que
pour les cheveux : d’abord l’adjectif cité est banal (« blond », « bleus ») puis particularisé (« blond châtain
» [...], « roussi », « clairs »).
Le troisième élément sur les yeux est intéressant : « troués d’une pupille toute
petite ».
Son regard n’est pas spécialement expressif, comme si Duroy se cachait.
Une importance particulière est accordée à la moustache (deux occurrences) : il « frisa sa moustache
»,« une moustache retroussée, qui semblait mousser sur sa lèvre ».
Cette mode est aussi un symbole de
virilité.
Ses vêtements sont évoqués en une phrase : « Quoique habillé d’un complet de soixante francs, il
gardait une certaine élégance tapageuse, un peu commune, réelle cependant ».
On note l’extrême précision
du prix, très significatif pour le lecteur de 1885 et les contrastes, les adjectifs « tapageuse », « commune »,
s’opposant à « élégance [...] réelle ».
Le narrateur cherche à nuancer ce portrait, qui n’est pas celui du héros
romanesque idéal, lequel n’est jamais commun, c’est -à -dire un peu vulgaire.
Le costume trahit ici la
condition, celle d’un homme du peuple désargenté.
Au deuxième paragraphe, on apprend que c’est un « ancien sous-officier », et au cinquième qu’il
appartenait au corps des « hussards » (cavalerie légère).
Il a un « chic de beau soldat tombé dans le civil, une « pose d’ancien officier », il est soucieux de
l’impression qu’il produit.
Il est à la fois brutal et personnel : « il avançait brutalement », « heurtent les
épaules, poussant les gens.
Il est sûr de lui et même un peu fanfaron.
Il battait le pavé de son talon.
Il avait
toujours l’air de défier quelqu’un ».
Enfin, il aimait les femmes : « le sang bouillant, il s’allumait au contact
des rôdeuses ».
On note la métaphore prolongée empruntée au lexique du feu, de « bouillant » à «
s’allumait ».
b) Des thèmes réalistes définissant un milieu social
Deux thèmes sont abordés dans cette entrée en matière : la pauvreté, les femmes.
Un milieu social est
ainsi associé à Georges Duroy.
On remarque, en effet, l’importance de l’argent, dès la première phrase :
« la monnaie de sa pièce de cent sous », puis « à prix fixe », « trois francs quarante », « vingt-deux
sous », « un franc vingt centimes », « soixante francs », « coûtaient », « dépense », « payer ».
Si le narrateur parle d’abord du « restaurant » où mange Duroy, il rectifie au troisième paragraphe
avec le terme péjoratif « gargote ».
Les habitués sont pauvres : « trois petites ouvrières », « une maîtresse
de musique » au chapeau « toujours poussiéreux » et Duroy lui-même se demande quel repas il va sauter
dorénavant, celui du matin ou du soir.
Les autres personnages que l’on distingue un peu sont les femmes ouvrières, bourgeoises, maîtresse de
musique, « rôdeuses », autrement dit, des prostituées.
Dans la dernière phrase de l’extrait, les thèmes de
l’argent (ou du manque d’argent) et de la femme se rejoignent avec la phrase : « il n’osait les suivre, ne les
pouvant payer »..
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