Analyse De « La Grasse Matinée » Par Jacques Prévert

« garçon » (55) illustre qu’il n’est pas cruel de nature ; nous interprétons que le poète implique qu’il est plutôt victimede sa situation.

Son respect envers le garçon de classe marchande amplifie l’aspect ironique : malgré le meurtre, lamalnutrition et la faim, il maintient sa bonne nature dans un contexte social.

L’ironie est encore amplifiée si nousconsidérons de nouveau le contexte historique des guerres mondiales, dans lesquels le vole, le pillage et le meurtresont des déroulements quotidiens.

La loi n’est pas appliquée aussi rigidement dans une situation de conflit même siles crimes et les motivations pour ceux-là parviennent souvent de gens avec des caractères méprisables.« La grasse matinée » de Jaques Prévert témoigne les inégalités qui existent dans notre société stratifiée.

Le titrelui-même permet d’illustrer le paradoxe du poème : faire la grasse matinée fait référence à un luxe dont seulementles aisées peuvent profiter.

Le poème contraste avec son titre en présentant un vagabond, qui malgré le chômage,ne peut pas faire la grasse matinée – il est tellement mal nourri que sa faim le garde éveillé.

En posant des questionsprofondément morales dans son poème, Prévert nous donne l’occasion de choisir notre propre meurtrier dans lecontexte du XXe s.

La société, qui déborde elle-même de conflits et d’inégalités, est-elle à blâmer pour la conditionde l’homme pauvre ? Prévert nous invite alors de contempler si notre réel physique d’aujourd’hui est meilleur quenotre réel subconscient, comme il paraît l’être pour le personnage.

C’est en considérant ceci que nous pouvonsregarder notre propre société avec un air plus critique – nous devons lutter contre brutalité de notre mondephysique en essayant de l’approcher à l’idéal que nous concevons dans notre imagination. Le poème nous présente un portrait d’un vagabond pauvre.

Le récit se concentre sur ses émotions causées par lesimages qu’il regarde.

Prévert, qui n’a aucune peur de descriptions violentes et directes, nous montre un monde descontrastes et des absurdes dans l’une de ses œuvres ayant pour titre une expression très équivoque, « La GrasseMatinée ».Le texte est divisé en trois séquences.

La première nous montre une scène qui se déroule devant « la virtirne dechez Potin » - l’homme regarde tous les produits dont il a tant besoin.

Puis, il se déplace vers un bistrot où ilaperçoit des croissants et du café-crème.

La dernière partie décrit le meurtre fait par cet « assassin », ce «vagabond ».

C’est un fait divers qui est vraiment frappant – l’assassin tue pour ne pas voler que deux francs.Ce qui est remarquable dans le poème, c’est le manque de rimes (un vers libre) et de ponctuation.

En s’éloignant del’usage des figures de style raffinées, Prévert a pour objectif de créer une image d’un homme exceptionnellementpauvre, presque anéanti.

On peut quand même énumérer quelques expressions stylistiques auxquelles l’auteur faitrapport – ce sont certainement des anaphores telles que « café-crème | café-crème | café-crime arrosé sang ! ».Évidemment, elles remplissent la fonction consistant à introduire du suspense.Il est à noter que dans le texte, des éléments satiriques apparaissent.

L’auteur critique le système qui ne s’intéressepas à la vie des plus nécessiteux, qui « se paye la tête », qui est complètement indifférente.

Il s’étonne quel’alimentation, la seule chose dont aucun ne peut se passer, devient inaccessible pour eux.

Il s’étonne que le pouvoirest seulement du côté des riches (« Un homme très estimé ») et des policiers (« les flics »).

Il s’étonne pourquoi onn’aurait pas pu tendre la main à cette personne abandonnée et anxieuse.

Ce qui est important, c’est qu’ici, la villeconstitue plus qu’un décor – c’est le lieu de la tragédie humaine.On trouve également une antithèse dans le titre.

L’expression « La Grasse Matinée » fait référence à l’oisiveté, àune vie en pleine églogue, à une habitude de roupiller jusqu’à midi, finalement à une personne grasse, trapue.

Celacontraste la pauvreté, la malaise du personnage principal, qui vit dans la rue, qui se préoccupe sans arrêt desurvivre le jour suivant, qui se réveille à six heures du matin pour se regarder dans une glace d’un magasind’alimentation et pour se rappeler de sa faim, qui est extrêmement malingre, voire squelettique.Ainsi, concentrons-nous sur le héros du récit.

C’est quelqu’un qui semble être plongé dans la mélancolie, dans lafrustration immense (« un brouillard de mots ») causée par l’impossibilité d’améliorer les conditions de sa viepitoyable.

Il se fiche de tout à part de la nourriture (« il s’en fout de sa tête de l’homme | in n’y pense pas | il songe| il imagine une autre tête | une tête de veau par exemple »).Le pauvre nous paraît vraiment humilié, il perd sa dignité et ne sait pas quoi faire dans une situation si dramatique.Cet état est détérioré par les images de « ces pâtés ces bouteilles ces conserves » qu’il ne peut pas atteindre.

Levagabond devient finalement un meurtrier, il doit verser du sang d’un autre homme, s’abaisser au niveau d’unassassin et d’un voleur s’il ne veut pas mourir de disette.Pour conclure, ce poème de Prévert concerne plusieurs problèmes : soit la pauvreté, la criminalité, soit la situationde certains peuples pendant et entre les deux guerres mondiales, soit finalement la question de l’indifférence (je-m’en-foutisme) qui peut être vraiment dangereuse.

Je pense que cette capacité de créer une œuvre-magnum nousexprime le grand talent de l’un des plus grands poètes français.. »