Analyse: Acte II Scène 5 On ne badine pas avec l'amour de Musset.
Publié le 12/09/2018
Extrait du document
Sa liaison orageuse et intermittente avec l’écrivaine a donc orienté l’œuvre de MUSSET : nul ne doute que l’écriture d’On ne badine pas avec l’amour en fut transformée sans pour autant devenir autobiographique. MUSSET rend hommage à George SAND dans la réplique finale « J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui » L68-70, superbe chute que lui a soufflée George SAND dans une lettre récente.
Conclusion
Sans être anticlérical, MUSSET profite de cette scène pour faire le procès de l’éducation infligée aux jeunes filles de bonne famille à son époque. Il brosse un double tableau des couvents cloîtrés : un paradis préservé où règnent calme et propreté pour Camille, un lieu de ténèbres où se flétrissent les femmes refoulées pour Perdican. Celui-ci ayant le dernier mot, on peut en déduire l’opinion personnelle de MUSSET, soucieux de faire triompher les droits de l’Homme contre tous les fanatismes et tous les obscurantismes, une position héritée des Lumières du XVIIIe siècle dont il admirait les idéaux.
«
Car Camille est orgueilleuse.
Elle refuse de perdre ses cheveux par chagrin d’amour, pour un homme,
mais accepte de les sacrifier pour Dieu puisqu’elle est contrainte de les raser pour entrer au couvent.
Certes,
il lui coûte de se défaire d’une part de sa féminité, la jeune fille se sent mutilée.
Mais c’est pour elle
l’assurance de ne pas céder à la tentation des plaisirs mondains (« la froide nonne qui coupera mes cheveux
pâlira peut-être de sa mutilation ; mais ils ne se changeront pas en bagues et en chaînes pour courir les
boudoirs » L17-19).
2) Le réquisitoire de Perdican contre le discours religieux (Réquisitoire = discours contenant un acte
d’accusation contre qqun ou qqchose)Perdican condamne Camille pour réciter une leçon apprise, tenir un discours qui n’est pas le sien.
Mais
surtout, il s’en prend aux nonnes qui ont formaté l’esprit de la jeune fille (antiphrase « elles t’ont mises dans
le vrai chemin » L58) en profitant de sa jeunesse pour l’influencer (antithèse « chuchoter à une vierge des
paroles de femme » L.51-52).Au lieu d’éduquer la jeune fille, les nonnes semblent s’acharner à lui inculper
une vision négative de la vie.
Elles sont « venues chuchoter » à l’oreille de Camille, tel un secret inavouable,
un pêché.
Perdican parle ainsi de « processions lugubres » L38 où des mortes semblent tenter la vivante.
L’image du poison, de la contamination est très prégnante dans le discours du héros (« elles ont coloré ta
pensée virginale des gouttes de leur sang » L35-36, « ces récits hideux qui t’ont empoisonnée » L61-62).
A Camille, les religieuses ont « montré avec horreur la route de leur vie » L36.
Elles ne font que
geindre, se plaindre.
A les entendre, elles ont souffert bien plus que le Christ (champ lexical de la souffrance
corporelle « blessures » L35, « gouttes de leur sang » L35, « cicatrices » L37, « plaies de Jésus » L37, «
décharnés » L38).
Elles paraissent abandonnées, martyrs mais sont en réalité frustrées et hypocrites.
Elles
médisent du monde, « représentent l’amour des hommes comme un mensonge » L49-50, tout en rêvant
secrètement de passions charnelles.
Aussi, si l’homme qui les a trompé revenait vers elle, elles n’hésiteraient
pas à s’enfuir avec lui (« Es-tu sûre que si son mari ou son amant revenait lui tendre la main […] elle ne lui
tendrait pas la sienne ? » L28 -29).
Leur engagement sonne faux.
Aussi, si les hommes mentent auprès des
femmes, les nonnes font pires en se mentant à elles-mêmes ainsi qu’à Dieu.
Perdican appelle cela le «
mensonge de l’amour divin » L50 et emploie le champ lexical juridique pour les condamner.
« C’est un
crime qu’elles font » L51 c’est pourquoi il se pose en juge de leur sort à travers une sentence lapidaire : « le
ciel n’est pas pour elles » L59.
3) Le plaidoyer de Perdican pour l’amour humain (Plaidoyer = Toute défense écrire ou orale, en faveur
d’une personne, d’une opinion, d’une cause).
Perdican dresse un portrait très pessimiste de la nature humaine, pleine de vices.
Il le concède : Oui,
les hommes sont fourbes.
Mais les femmes sont loin d’être irréprochables.
Par une accumulation
hyperbolique, il énumère les défauts de chaque genre.
Les hommes seraient ainsi « menteurs, inconstants,
faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels » L62-63, quand les femmes sont «
perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées » L64.
Et personne n’échappe à ce terrible constat,
comme le montre la gradation « tous les hommes » L62, « toutes les femmes » L63, « le monde » L64.
Ce
blâme est poussé à l’extrême avec la métaphore filée de l’égout (= suite de métaphores).
Dans « le monde
n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de
fange » L64-65, « l’égout » et la « fange » évoquent la saleté et les « phoques informes » qui « rampent et
se tordent » figurent l’humanité atrophiée, avilie et totalement déshumanisée.
Rien ne semble pouvoir
racheter l’homme.
Et pourtant….
»
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