Acte V, scène 7 de Phèdre de Jean Racine (résumé et commentaire)
Publié le 13/09/2018
Extrait du document
Phèdre apparaît, chancelante, appuyée sur Panope. Thésée l'accueille avec ses larmes, ses plaintes et d'amers propos : la reine triomphe, et n'a plus qu'à prendre sa victime. Le roi, quant à lui, se refuse à convaincre son épouse de mensonge en cherchant plus avant une cruelle vérité. Il reste au malheureux père à pleurer les «faveurs meurtrières » des dieux et la mort de son fils bien-aimé. Phèdre interrompt son époux : « Il faut rompre un injuste silence », Hippolyte n'était pas coupable. Un cri de fureur et de dou-leurjaillit de la bouche de Thésée, mais Phèdre poursuit sa confession : c'est elle qui a osé s'éprendre du prince et s'offrir à lui. La détestable Œnone a fait le reste en calomniant l'innocent, par crainte de le voir dénoncer l'amour criminel de sa maîtresse ; elle s'en est punie elle-même. La reine n'a pasvoulu trancher par le fer sa destinée. Elle a absorbé un poison aux lents effets pour avoir le temps d'innocenter l'infortuné Hippolyte. Mais voilà que la jeune femme sent un froid inconnu lui glacer le cœur et sa vue se brouiller. Elle tombe, expirante, aux pieds de son époux. Thésée se détourne de la morte ; revenu, hélas ! de son erreur, le roi ira expierson vœu funeste en rendant les honneurs funèbres à son cher fils, et, « pour mieux apaiser ses mânes irrités », il oubliera le passé et sa haine en traitant désormais Aricie comme sa fille.
COMMENTAIRE
Ultime comparution
Tout au long de la pièce Phèdre n’aura cessé de comparaître et d'avouer son crime, devant Œnone, devant Hippolyte, devant sa conscience, son propre père, Minos, et enfin son époux. La mise en scène dramatise à souhait cette dernière et plus cruelle comparution, que seul Racine a voulue.
Est dramatique d'abord l’apparition de cette femme qui est au bord de la mort : « Silence angoissant pendant lequel Thé-
«
sée,
toujours au premier plan gauche, se retourne lentement
sur lui-même dans la direction de Phèdre .
Celle-ci avance péni
blement jusqu'au plein milieu de la scène.
Elle s'arrête, l'œil
vag ue, lointain, orienté de face.
Elle fait signe à Panope de la
laisser.
Panope, avec hésitation et discrétion, s'écarte Phèdre
se tient encore, mais tout juste, debout.
Silence encore.
Enfin
Thésée parle ...
>> (Jean-Louis Barrault)
Dramatique ensuite est le mouvement de la scène.
Une longue
tirade (v.
1594 -1616 ), faite des plaintes et des griefs de Thé
sée, retarde et par là accentue le saisissant effet que consti
tue l'aveu de Phèdre :
«N on, Thésée, il faut rompre un injuste silence ;
Il faut à votre fils rendre son innocence.
Il n'était point coupable.
>> (v.
1617 -1619 )
En outre le réquisitoire de Thésée, pathétique dans ses pauvres
craintes (v.
1595-1 596) , dans son dérisoire effort pour pré
server l'amour conjugal (v.
1599-1 600), installe Phèdre au banc
des accusés.
Ses accents émouvants, le spectacle de ce père
écrasé de dot ùeur, lançant à la face des dieux l'éternel reproche
(v.
1612-1616), auréolé enfin de la tragique grandeur des
deuils, préludent comme il convient à une lamentation plus
pitoya ble, un spectacle plus terrible encore.
La mort en scène
À Phèdre seule dans la pièce est donné le droit de mourir
devant les spectateurs.
Alors que dans la deuxième moitié du
siècle le spectacle de la mort, du meurtre, est proscrit par des
bienséances de plus en plus exigeant es, une exception est faite
pour le suicide.
La raison en est donnée par un critique du
temps : sur scène « il ne faut jamais répandre le sang de per
sonne, mais on peut y verser le sien, quand on y est porté par
un beau désespoir ; c'é tait une action consacrée chez les
Roma ins, comme aussi bien chez les Grecs >>.
Considéré comme
un acte de courage , signe de l'élection héroïque et tra gique,
le suicide a beau être condamné par la morale chrétienne, il a
une place d'honneur sur le théâ tre, parce qu'admirable et
pathétique.
Les bienséances étaient cependant parvenues à
apporter quelques restrictions à sa représentation : cette der
nière était placée tout à la fin de la pièce pour que le cadavre
ne reste pas trop longtemps sous les yeux du public (ainsi dans
Ba jazet).
On évitait de montrer le geste fatal; le héros venait
mourir sur la scène après s'être percé d'un poignard ou avoir.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Acte I, scène 5 de Phèdre de Jean Racine (résumé et commentaire)
- Acte I, scène 4 de Phèdre de Jean Racine (résumé et commentaire)
- Acte I, scène 2 de Phèdre de Jean Racine (résumé et commentaire)
- Acte I, scène 3 de Phèdre de Jean Racine (résumé et commentaire)
- Acte I, scène 1 de Phèdre de Jean Racine (résumé et commentaire)