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ACTE II Le Salon de Célimène - Le Misanthrope de Molière

Publié le 08/03/2011

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Une coquette peut n'être pas spirituelle. Il semble bien que Juliette ait eu plus de bonne grâce que d'esprit. De l'esprit, Célimène en a jusqu'au bout des ongles, et du plus féminin. De l'esprit naturel et jaillissant, jamais cherché, jamais travaillé et tiré de loin, de l'esprit toujours prêt et à portée de lèvres. Suprême séduction, qui distingue Célimène de beaucoup d'autres charmantes héroïnes de notre théâtre et qui prolonge son empire. Sa beauté, la grâce de ses manières, ce je ne sais quoi qui émane de sa personne, tout cela qui n'était que pour son entourage, nous échappe : son esprit nous appartient.

« Galerie des portraits ont un air d'incohérence qui trahit leur origine : ceux de Célimène sont des chefs-d'œuvre enminiature.

Ni longueurs, ni détours : la ressemblance attrapée en deux coups de langue, le temps de se faire admirerd'une petite cour de bons apôtres.

Molière, en prêtant son génie à la jeune femme et sans oublier qu'elle est femme,a fait d'elle l'égale des plus grands écrivains. Assistons donc à cette « journée des portraits t.

Jouissons de l'esprit de Célimène que Clitandre et Acaste excitentpar la façon dont ils lui donnent la réplique, cependant qu'Eliante et Philinte ne protestent qu'en aparté, coupablesd'une demi-complicité à laquelle nous nous associons de tout notre plaisir. clitandre. Parbleu ! je viens du Louvre, où Cléonte, au levé, Madame, a bien paru ridicule achevé.

N'a-t-il point quelque ami quipût, sur ses manières, D'un charitable avis lui prêter les lumières ? célimène. Dans le monde, à vrai dire, il se barbouille fort ; Partout il porte un air qui saute aux yeux d'abord ; Et, lorsqu'on lerevoit après un peu d'absence, On le retrouve encor plus plein d'extravagance. Acaste. Parbleu ! s'il faut parler de gens extravagants, Je viens d'en essuyer un des plus fatigants : Damon, le raisonneur,qui m'a, ne vous déplaise, Une heure, au grand soleil, tenu hors de ma chaise. célimène. C'est un parleur étrange, et qui trouve toujours L'art de ne vous rien dire avec de grands discours ; Dans les proposqu'il tient, on ne voit jamais goutte, Et ce n'est que du bruit que tout ce qu'on écoute. Eliante à Philinte.

Ce début n'est pas mal ; et contre le prochain La conversation prend un assez bon train. Clitandre. Timante encor, madame, est un bon caractère.

célimène. C'est de la tête aux pieds un homme tout mystère, Qui vous jette en passant un coup d'œil égaré, Et, sans aucuneaffaire, est toujours affairé.

Tout ce qu'il vous débite en grimaces abonde : A force de façons, il assomme le monde; Sans cesse il a, tout bas, pour rompre l'entretien, Un secret à vous dire, et ce secret n'est rien ; De la moindrevétille il fait une merveille, Et jusques au bonjour, il dit tout à l'oreille. Acaste.

Et Géralde, madame ? célimène. Oh, l'ennuyeux conteur ! Jamais on ne le voit sortir du grand seigneur ; Dans le brillant commerce il se mêle sanscesse, Et ne cite jamais que duc, prince ou princesse : La qualité l'entête ; et tous ses entretiens Ne sont que dechevaux, d'équipage et de chiens : Il tutaye en parlant ceux du plus haut étage, Et le nom de monsieur est chez luihors d'usage. Clitandre.

On dit qu'avec Bélise il est du dernier bien.

célimène. Le pauvre esprit de femme, et le sec entretien ! Lorsqu'elle vient me voir, je souffre le martyre : Il faut suer sanscesse à chercher que lui dire, Et la stérilité de son expression Fait mourir à tous coups la conversation.

En vain, pour attaquer son stupide silence,De tous les lieux communs vous prenez l'assistance Le beau temps et la pluie, et le froid et le chaud Sont des fondsqu'avec elle on épuise bientôt.

Cependant sa visite, assez insupportable, Traîne en une longueur encoreépouvantable ; Et l'on demande l'heure, et l'on bâille vingt fois, Qu'elle grouille aussi peu qu'une pièce de bois. Acaste. Que vous semble d'Adraste ? célimène Ah ! quel orgueil extrême ! C'est un homme gonflé de l'amour de soi-même.

Son mérite jamais n'est content de lacour : Contre elle il fait métier de pester chaque jour, Et l'on ne donne emploi, charge, ni bénéfice Qu'à tout ce qu'il. »

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