A l'aide d'exemples précis, vous montrerez dans quelle mesure Baudelaire peut faire figure de poète parnassien et de poète symboliste.
Publié le 05/05/2011
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Le poète parnassien. Baudelaire, d'origine romantique, mais réagissant contre les modes romantiques, devait nécessairement se rapprocher du Parnasse dans la mesure où celui-ci s'opposait au Romantisme. Au moment où il commence à publier, l'écrivain qui exerce sur lui l'influence la plus vive est Théophile Gautier. Celui-ci dans la Préface d'Albertus, dans la Préface de Mlle de Maupin a affirmé son culte pour l'art et son mépris du bourgeois. D'une sensibilité profonde, mais discrète, hanté par l'idée de la mort, trouvant entre les êtres et les choses des correspondances secrètes, il se rapprochait de Baudelaire par de nombreuses affinités et celui-ci en était pleinement conscient. Lorsque Gérard de Nerval, Banville, Pétrus Borel et Gautier se groupent pour défendre leurs conceptions poétiques dans l'Artiste, Baudelaire s'associe naturellement à leur effort.
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principes esthétiques qu'il pressentait sans pouvoir les définir exactement.
La Beauté n'est pas seulement ladescription des formes ou des couleurs, mais un Tout qui englobe Peinture, Sculpture, Architecture, Danse et toutspécialement la Musique.
Or la musique suppose à la fois une science précise et un art plus subtil et plus évocateurque la sculpture et la peinture.Le sonnet Correspondances paru dans la première édition des Fleurs du Mal en 1857, mais peut-être composé unedizaine d'années auparavant, exprime ce nouvel idéal, qui fait appel à tous les arts et à tous les sens pour former laBeauté :
La Nature est un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles : L'homme y passe à traversdes forêts de symboles Qui l'observent avec des regards familiers.Comme de longs échos qui de loin se confondent Dans une ténébreuse et profonde unité.
Vaste comme la nuit et comme la clarté,Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.Il est des parfums frais comme des chairs d'enfants,Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,Ayant l'expansion des choses infinies,Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.
La réalité pour le poète n'est pas le monde matériel qui nous entoure; de cet univers, Baudelaire s'évade parl'extase, en concentrant son Moi et en le vaporisant : De la vaporisation et de la centralisation du Moi.
Tout est là.(Journaux intimes.) Le Moi, devenu aussi fluide qu'un gaz léger, pénètre dans des mondes paradisiaques et le poèteconnaît un état charmant et singulier, où toutes les forces s'équilibrent.Cette extase poétique découvre à Baudelaire le sens profond de chaque chose, plus volontaire, plus despotique; lemonde où erre l'esprit du poète, c'est la sur-nature.Celle-ci n'est cependant sensible à l'homme que par l'intermédiaire des formes matérielles; reflets de la réalitésuprême, symboles, qui nous avertissent d'une existence supérieure : C'est cet admirable instinct du Beau qui nousfait considérer la Terre et ses spectacles comme un aperçu, comme une correspondance du Ciel...
C'est à la fois parla poésie et à travers la poésie, par et à travers la musique, que l'âme entrevoit les splendeurs situées derrière letombeau...
(Articles sur Théophile Gautier, 1859.) Le sentiment mystique de la Beauté explique la comparaison de laNature avec un temple mystérieux, où le poète entend de confuses paroles.A vrai dire, la conception symbolique de l'univers n'était pas absolument neuve.
Sans remonter à Platon et à sathéorie des Idées', dont le monde matériel n'est que l'ombre, on peut trouver chez les poètes romantiques, enparticulier chez Victor Hugo, des affirmations analogues.
En 1837, dans les Rayons et les Ombres, il écrivait :
Entends sous chaque objet sourdre la parabole;Sous l'être universel vois l'éternel symbole.
Tout vit dans la Nature: tout a une âme, tout a une voix.
Dans son exil, Hugo entend ces voix plus que jamais : voixde l'océan, voix du dolmen, qui lui révèle par la Bouche d'Ombre (Contemplations) l'énigme de la création.
Toutefois,le symbolisme de Victor Hugo, qui ira en se développant dans la Légendes des Siècles, Dieu et la Fin de Satan, tendvers une explication philosophique du Monde, vers un système cohérent et communicable aux autres hommes.
Lesymbolisme de Baudelaire est surtout poétique et individuel; il est le lien subtil et familier entre l'artiste et l'objet.Entre la création qui est un tout et la créature à la fois matérielle et spirituelle, le symbole établit un lien par lescorrespondances entre les divers ordres de sensations :
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
Baudelaire a plus spécialement été sensible aux parfums, qui évoquent chez lui tout un monde; leur puissancemystérieuse agit sur ses nerfs, l'inspire.
Aussi se reconnaît-il lorsqu'il lit dans les Kreisleriania d'Hoffmann cetteremarque : Ce n'est pas seulement en rêve, c'est encore éveillé que je trouve une analogie et une réunion intimeentre les couleurs, les sons et les parfums.
Sur cette idée maîtresse de son esthétique, Baudelaire revient àplusieurs reprises, invoquant l'autorité de Fourier, de Swedenborg et de Lavater pour justifier l'unité du symbole :Tout, forme, mouvement, nombre, couleur, parfum dans le spirituel comme dans le naturel est significatif,réciproque, converse, correspondant...
Chez les excellents poètes, il n'y a pas de métaphore, de comparaison oud'épithète qui ne soit d'une adaptation mathématiquement exacte dans la circonstance actuelle, parce que cescomparaisons, ces métaphores, ces épithètes sont puisées dans l'inépuisable fonds de l'universelle analogie...
(Art Romantique)
Ainsi ce que le profane croit être la transcription d'une fantaisie ou d'une pensée est en réalité l'expression complète.
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