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Définissez la nature et la structure de ce document provenant d’Apollonia de la Salbakè en Carie (Asie Mineure).

Publié le 15/11/2023

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« Sujet de contrôle continu pour le cours VVH8ESAN Sources et matériaux en Histoire ancienne. Partie Histoire grecque Bon travail dans l’ensemble.

Voir le corrigé pour des compléments.

16 1/ Définissez la nature et la structure de ce document provenant d’Apollonia de la Salbakè en Carie (Asie Mineure). Il s’agit d’un décret honorifique de la cité d’Apollonia de la Salbaké envers un certain Philo… (voir ci-dessous la remarque à propos de ce nom).

Ce décret a été gravé sur un bloc de marbre de 80 x 47 x 8 cm, nous avons une photographie de l’estampage. Certaines parties de l’inscription manquent, en particulier le coin en haut à droite et certains mots au milieu de l’inscription. Comme tout décret honorifique de l’époque hellénistique, sa structure est fixée comme suit : - Un préambule : invocation, datation et sanction (ἔδοξε) et proposition (εἶπε) : cette partie manque ici. Des attendus : cette partie est présente, même si les mots clefs de début de phrase (ἐπειδή ou περὶ ὧν) manquent.

Ici on justifie les décisions prises. Les décisions : annoncées par le verbe δεδόχθαι (ligne 26 et suivantes) 2/ Datez-le. La dernière phrase qui fait référence aux jeux gymniques organisés en l’honneur du roi Séleucos nous donne un terminus post quem, l’année 305 av.

JC, pendant laquelle Séleucos I Nikaator prend le titre de roi.

Mais si la date de l’instauration d’un culte en son honneur fait débat, on pense qu’il n’a été établi que sous le règne de son fils Antiochos I Sôter (261-281). Pour le terminus ante quem, la paix d’Apamée (188 av JC) qui a vu la Carie séparée des possessions séleucides semble être une bonne date.

On a certes des cas de cités continuant à célébrer ce genre de culte après la chute du souverain mais on a du mal à concevoir qu’un membre d’une administration autre que Séleucide soit invité à de telles célébrations. À défaut d’avoir la date exacte ou un nom de magistrat dans le préambule, on est amené à chercher trace des personnages cités dans d’autres inscriptions. Et on trouve une trace de Ktésiklès dans cette inscription : Inv.

63.118 : Grand bloc de marbre blanc découvert le 6 juillet 1963 au cours des fouilles de la synagogue de Sardes, analysé et traduit par Philippe Gauthier1 : 1 GAUTHIER Philippe, Nouvelles inscriptions de Sardes II, Droz, 1989 1 Traduction: « — — — (que) vous réglerez en trois ans, et qu'aussitôt l'on coupe du bois pour la reconstruction de la ville et qu'on l'exporte des forêts de Taranza, selon ce qu'aura décidé Zeuxis.

Nous vous exemptons d'autre part du vingtième qui avait été ajouté à celui de la cité et nous avons ordonné de vous rendre le gymnase dont vous aviez auparavant l'usage ; et nous avons écrit sur toutes ces affaires à Zeuxis et à Ktésiklès ; sur ces affaires vous rendront compte également Métrodôros et ses collègues. Portez-vous bien.

(An) 99, le 5 Xandikos». La datation de ce document (99ème année séleucide, soit 213 av.

JC) nous amène dans le règne d’Antiochos III Mégas.

On peut raisonnablement penser que Ktésiklès de ce document est le même que celui qui est cité dans le nôtre. On peut donc dater notre inscription du règne d’Antiochos III, entre 223 av.

JC et 187 av.

JC. L’étude du style de l’inscription, si elle ne permet pas de la dater précisément, ne remet en tous cas pas en cause cette datation : les barres des sigmas ne sont pas divergentes comme elles le seraient dans une inscription archaïque, les alphas n’ont pas de barre brisée comme dans des inscriptions plus tardives. 3/ Quelle méthode l’historien a utilisé pour parvenir jusqu’à cette traduction ? Il y a des lacunes dans le document, l’historien qui a l’a traduit a donc d’abord dû les combler.

Déjà, il faut attendre les ligne 27 pour que le non du personnage honoré soit écrit et il ne subsiste hélas que la première partie du nom, « Philo ».

On peut facilement trouver des listes de noms grecs attestés2 et extraire ceux qui commencent par « Philo ».

Le nom du personnage honoré fait probablement partie de cette liste, c’est donc un des noms de cette liste que l’on doit chercher si on veut le trouver dans une autre inscription : Philocyon Philoclès Philopator Philos ou Philon. Philochore = Philokhoros CUVELIER Pierre, Noms grecs antiques, aide de jeu pour tout jeu de rôle, 2014-2021 : https://www.normalesup.org/~pcuvelier/wwwjdr/NomsGrecsAntiques.pdf 2 2 Philologos Philoxénos Philoplatanos Mais pour le reste de la traduction il restera « Philo… », que le traducteur a rajouté au début de sa traduction, à la place du préambule manquant, pour faciliter la compréhension. Les autres lacunes se trouvent principalement au début de chaque ligne.

La pierre semble avoir été coupée à droite selon une ligne verticale, enlevant une partie à peu près égale à chaque ligne.

Si l’écriture n’est pas du stoïchédon parfait, la taille des lettres est à peu près régulière, et le traducteur a pu en déduire qu’il devait ajouter 4, 5 ou 6 lettres.

Ailleurs, les manques sont de taille variable mais on peut à chaque fois estimer le nombre de lettres. Ensuite, une bonne connaissance de la langue grecque permet de compléter une grande partie des trous.

Le Bailly numérique disponible sur internet permet à chaque fois de faire la liste des possibilités. Mais la source principale qui sert à combler les vides, ce sont les inscriptions de même nature ; les inscriptions épigraphiques sont généralement basées sur des modèles assez peu nombreux et les mêmes expressions reviennent souvent, on peut donc les repérer à partir de quelques lettres restantes et en s’aidant du sens général. Voici comment le traducteur a peut-être raisonné pour combler les trous : - - - - Lignes 1,2 : … ΧΡΟΝΟΙΣΕΥ… -> ce petit bout de phrase rappelle une formule que l’on trouve très souvent dans les décrets : εν τε τοις πρότερον χρόνοις εΰνους ών διετελεΐ3.

L’historien a donc sans trop de risque rajouté les mots manquants, d’autant plus qu’il avait exactement la place pour le faire.

Il a décidé que cette formule s’appliquait ici au peuple dans le décret d’une cité pour un administrateur séleucide, ce qui lui a permis d’ajouter le τωι δήμωι qui suit. Ligne 2 : ΙΔΙΑΙΕΣΚΑΤ… : en trouvant cette formule dans différents autres documents4, le traducteur avait le choix entre différentes formules désignant les citoyens par le terme générique ou par le nom de la cité, il a choisi la première solution, mais aucun des deux choix ne change le sens de la phrase. Ligne 2 : le rajout du participe passif ταχθείς est guidé par le sens général et la longueur du mot, on ne peut être sûr de cette restitution me semble-t-il. Ligne 3 : …ΠΑΡΧΗΣ -> on trouve dans le Bailly ὑπαρχή (commencement), ἀπαρχή (offrande), προϋπαρχή (service rendu), ἱππάρχης/ἵππαρχος (hipparque).

Le sens des mots autour du passage a imposé le dernier choix.

Le rajout du ΔΕ permet d’avoir le bon nombre de lettres. Ligne 3 : ΠΑΡ… : ici le rajout de ἡμῖν στρατιωτῶν est guidé par le sens général, si Philo… est hipparque, il commande à des soldats. -Decret de Iasos pour Priene (Inschriften griechischer Städte aus Kleinasien (IK) 107): ἔν τε τοῖς πρότερον χρόνοις εὔνους ὢν καὶ φίλος διετέλει -Decret de Delphes en l'honneur du roi thrace Kotys (276/5), (Sylloge Inscriptionum Graecarum SIG (3) 438): ἔν τε τοῖς πρότερον χρόνοις εὔνους ὢν διετέλει τῶι τε ἱερῶι etc... 4 -Decret d'Athènes en l'honneur de Zenon, commandant de la flotte ptolémaïque, Inscriptiones Graecae (IG) II² 650: ἰδίαι ἑκάστωι Ἀ[θηναίων] -Decret d'Oropos en l'honneur d’Aristide, Supplementum Epigraphicum Graecum SEG 16-298 ἰδίαι ἑκάστωι τῶν π[ο]λιτῶν 3 3 - - Ligne 4 : …ΑΣΑΝΕYΤΑΞΙΑΝ : une fois identifié le nom εὐταξία à l’accusatif (le sens de « bon ordre » cadre bien avec la fonction militaire), le rajout de l’article s’impose ainsi que le « Π» pour πάσαν. Ligne 4, 5 : ΠΑΡΕΣ… : c’est ici à la fois le sens.... »

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