Union soviétique de 1980 à 1989 : Histoire
Publié le 02/12/2018
Extrait du document
Maître incontesté du régime soviétique, Leonide Brejnev s’éteint le 10 novembre 1982. En l’espace de dix-huit ans, il a su concentrer entre ses mains l’ensemble des pouvoirs, placer ses fidèles au sein des instances dirigeantes. L'élimination de tout élément critique, nécessaire à l’établissement d’un consensus, a également paralysé, voire sclérosé, l’appareil d'État dominé par un personnel politique âgé. Immobilisme dans le domaine politique mais aussi social, où tout débat est exclu, et enfin culturel, où les manifestations sont réduites à des commémorations ou à des remises de prix. L'héritage économique du chef de l'Etat soviétique est à l’image du reste. La pesanteur bureaucratique a freiné tout effort de réforme: dégradation du niveau de vie, retard technologique, faible compétitivité, difficultés de ravitaillement sont autant de signes d’une économie affaiblie et incapable de gérer la crise que le système a lui-même engendré.
En politique étrangère, Leonide Brejnev laisse une puissance militaire considérable dont l'intervention en Afghanistan a encore renforcé les visées impérialistes.
Successeurs éphémères
Après la mort de Brejnev, l’élection par le plénum du Comité central du parti communiste (PCUS) de Youri Andropov à la présidence du présidium du Soviet suprême ne surpend personne. S’il est le premier dirigeant du KGB à accéder à la direction de l’État soviétique, il a toutes les qualités requises pour parvenir à la magistrature suprême. Il est de nationalité russe, cumule les postes de secrétaire du Comité central et de membre du bureau politique, et a acquis en tant que secrétaire d'ambassade en Hongrie de 1953 à 1957 la maîtrise des dossiers internationaux. C’est à la tête du KGB, auquel il redonne tout son prestige, qu'il s’est particulièrement distingué.
Dès son accession au pouvoir, Andropov affirme sa volonté de responsabiliser les individus. C’est le sens donné au renforcement du travail idéologique. Pour remédier à la léthargie des instances du parti et de l’État, il procède à d'importants remaniements, éliminant de nombreux éléments corrompus du sérail brejnévien, et entreprend parallèlement un travail destiné à améliorer la productivité. Mais là encore, ses vélléités de réformes échouent face à l’inertie institutionnelle. Malade, Andropov finit par s'enfermer dans un discours idéologique dogmatique et inefficace. Très rapidement ses interventions se raréfient et, à partir de 1983, il cesse d’apparaître en public. L'absence de dirigeant ne bouleverse en rien la vie politique. Il meurt le 11 février 1984.
Andropov n’est pas encore enterre que déjà son successeur Constantin Tchernenko est promu à la direction du Comité central du PCUS. C’est un vieillard malade qui dirige les funérailles d'Andropov. Il est soutenu par la vieille garde brejnévienne, respectueuse du principe russe de séniorité, et qui espère qu’il coupera court à l'épuration. Tchernenko n’a que le temps d’affirmer, comme son prédécesseur l'avait fait, la nécessité de procéder à une reforme du système de gestion économique. Des août 1984, la réalité du pouvoir lui échappe. Affaibli par la maladie, il laisse ses collaborateurs régler les affaires courantes. Treize mois après sa prise de fonctions, il s’éteint le 10 mars 1985.
Mikhaïl Gorbatchev, iconoclaste
La rapidité de l’élection de Mikhaïl Gorbatchev à la tête du parti le Il mars témoigne encore une fois du caractère préréglé de l’accession au pouvoir. Sans surprise, l’élection de Mikhaïl Gorbatchev apporte cependant rapidement des innovations. Elle marque la fin de l'ère des gérontes et, pour la première fois, l’arrivée au Kremlin d'un juriste, qui n'a pas été formé sous Staline et qui a toujours étonné par son esprit de réforme. Son premier discours, prononcé le jour des obsèques devant plusieurs chefs d’Etat étrangers, s’attaque à l’inertie, à l'incompétence et réaffirme son attachement à la «coexistence pacifique». Incontestablement, le Kremlin change de ton. Dès avril, Gorbatchev prend soin d'asseoir son pouvoir en nommant au bureau politique trois personnalités qui lui sont proches et d’évincer son principal rival Gregori Roumanov.
Fondement de la mutation en cours, la perestroïka n’est pas simplement une restructuration structurelle mais également économique et sociale. Sans remettre en cause le cadre existant, l'idéologie marxiste-léniniste, le rôle dirigeant du PCUS et les principes d’économie planifiée, la perestroïka est le mot d’ordre d’un vaste projet qui devrait sortir l’Union soviétique de la stagnation et de l'immobilisme. Pour vaincre les résistances de l'appareil. Gorbatchev procède non seulement à un remaniement des instances dirigeantes du parti, de la diplomatie et de l'armée au profit d’hommes qui lui sont dévoués, mais en appelle comme l'avait fait Nikita Khrouchtchev aux personnalités des milieux culturels, susceptibles de se rallier à ses objectifs réformateurs.
«
8
décembre 1987.
Signature à Wasililrgcon
p ar Miklraïl Gorbatchev
et Ronald Reagan
du traité sur le d émantèlement
des missiles imermldiaire.s
(FN/).
© J.
Larrgevirr -Sygma DONNÉES
DÉMOGRAPHIQUES
ET ÉCONOMIQUES 1980
1982
1984 1986
Population totale (en millions d'habitants)
265,5 270
275 281.1
Taux d'urbanisation (en 'l'o) 62
63
66 66'
Population en âge de tra va il le r (15 à 64 ans)
en % de la population totale 66 66
66 661
Produit national brut (en dollars US par hab.) 4 550 -
--
Importations (en milliards de dollars US)
68,5 n,1
80,6 88.9
Expor ta ti on s (en milliards de dollars US) 76,4
86,9 91,6
97.3
Consommation d'énergie par habitant
(en kg/équiv.
pétrole) -
-
4 627
4 949
Taux brut de natalité (%.) 18
19 20
19
Taux
brut de mortalité (%.) 10
10
Il 10
Espérance de '�e à la naissance (en années) 71
69 67 70
Nombre d'habitants par médecin 270 270' -
-
Sourcç: Banque mond1alc: Roppert st�r 1� db·doppemtnl dam le monde.
1 En t981.
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Andropov n'est pas encore enterré que
déjà son successeur Constantin
Tchernenko est promu à la direction
du Comité central du PCUS.
C'est un
vieillard malade qui dirige les
funérailles d'Andropov.
Il est soutenu
par la vieille garde brejnévienne,
respectueuse du principe russe de
séniorité, et qui espère qu'il coupera
court à l'épuration.
Tchernenko n'a
que le temps d'affirmer, comme son
prédécesseur l'avait fait.
la nécessité de
procéder à une réforme du système de
gestion économique.
Dès août 198 4, la
réalité du pouvoir lui échappe.
Affaibli
par la maladie.
il laisse ses
collaborateurs régler les affaires
courames.
Treize mois après sa prise
de fonctions, il s'éteint le 10 mars 1985.
Mikh:ill Gorbatchev, iconoclaste
La rapidité de l'élection de Mikhaïl
Gorbatchev à la tête du parti le
11 mars témoigne encore une fois du
caractère préréglé de l'accession au
pouvoir.
Sans surprise, l'élection de
Mikhaïl Gorbatchev apporte
cependant rapidement des innovations.
Elle marque la fin de l'ère des gérontes
et, pour la première fois, l'arrivée au
Kremlin d'un juriste, qui n'a pas été
formé sous Staline et qui a toujours
étonné par son esprit de réforme.
Son
premier discours, prononcé le jour pes
obsèques devant plusieurs chefs d'Etat
étrangers, s'attaque à l'inertie, à
l'incompétence et réaffirme son
attachement à la «Coexistence
pacifique».
Incontestablement, le
Kremlin change de ton.
Dès avril,
Gorbatchev prend soin d'asseoir son
pouvoir en nommant au bureau
politique trois personnalités qui lui
som proches et d'évincer son principal
rival Gregori Roumanov.
Fondement de la mutation en cours, la
perestroïka n'est pas simplement une
restructuration structurelle mais également
économique et sociale.
Sans
remenre en cause le cadre existant,
l'idéologie marxiste-léniniste, le rôle
dirigeant du PCUS et les principes
d'économie planifiée, la perestroïka est
le mot d'ordre d'un vaste projet qui
devrait sortir l'Union soviétique de la
stagnation et de l'immobilisme.
Pour
vaincre les résistances de l'appareil,
Gorbatchev procède non seulement à
un remaniement des instances
dirigeantes du parti, de la diplomatie et
de l'armée au profit d'hommes qui lui
som dévoués, mais en appelle comme
l'avait fait Nikita Khrouchtchev aux
personnalités des milieux culturels,
susceptibles de se rallier à ses objectifs
réformateurs.
Les révélations sur la catastrophe de
Tchernobyl, en avril l986, et la liberté
donnée aux journaux soviétiques d'en
témoigner constituent la première
manifestation de la glas11ost
(transparence).
Destiné à rompre le
silence, ce concept est à la fois présenté
comme un illStrument du changement et
une donnée première de la
«démocratie socialiste» qui doit
renouer avec certains préceptes
léninistes, égalité et légalité.
trop
longtemps bafoués.
La lutte contre
l'arbitraire et l'illégalité se traduit dès
1986 par l'incarcération ou l'adoption
de sanctions à 1 'encontre de milliers de
policiers et de membres du KGB.
La
gla snost a également pour effet de
donner libre cours au débat, à la
critique des carences de l'appareil et de
l'inefficacité de la gestion en vigueur.
La critique va jusqu'à remettre en
cause certains préceptes du système
socialiste jugés trop dogmatiques,
notamment en matière de gestion
économique.
La réhabilitation
d'hommes politiques, de victimes des
purges staliniennes ou d'artistes et
d'intellectuels, processus qui culmine
avec la libération du physicien
dissident Andreï Sakharov en 1986 et
la publication en Union soviétique de
l'Archipel du Goulag d'Alexandre
Soljénitsyne s'inscrit dans un
changement radical dans la lecture de
l'histoire soviétique.
Les révélations
sur le pacte germano-soviétique de
1939 ou sur le massacre de Katyn
perpétré en 1941 sont à l'image de
cette nouvelle transparence, de cene
nouvelle exigence.
Portée par ce vent
de libéralisation, la société civile
émerge.
Bafouées par soixante ans de
russification intense, les revendications
nationalistes sc font de nouveau
entendre.
En Géorgie notamment, le
courant autonomiste rallie un nombre
toujours plus grand de militants.
Les
Républiques baltes de Lettonie, de
Lituanie et d'Estonie, dénonçant leur
annexion réalisée dans le cadre du
pacte germano-soviétique d'août 1939,
exigent l'indépendance ou, à défaut,
une autonomie accrue.
Dans d'autres
républiques.
les conflits interethniques
éclatent.
C'est le cas en Azerbaïdjan
où la minorité arménienne s'élève
contre la domùnation des Azéris.
Les
réponses du pouvoir, vote d'une
«autonomie comptable" pour les
Républiques baltes et rattachement
administratif du Haut-Karabakh,
peuplé à 75 % d'Arméniens, sont
insuffisantes pour apaiser ces
mouvements issus de la perestroïka.
Les réformes lancées par Gorbatchev
favorisent même la réappari!ion d'une
classe ouvrière combative.
Au-delà des
revendications relatives aux conditions
de travail, les mineurs en grève en
juillet 1989 se sont faits les porte
parole d'une peres"oïka accélérée.
Surpris, le Kremlin qui s'est empressé
de reconnaître la légitimité des
revendications a tenté d'accepter la
négociation.
confortant ainsi l'image
d'un pouvoir démocratique.
La
glasnost, enfi m, est le seul moyen de
redonner aux instances du pouvoir une
crédibilité laminée par la corruption, la
bureaucratisation excessive et la langue.
»
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