Trente années de guerre civile, de l'escarmouche de Saint Albans à la victoire d'Henri Tudor (1455-1485): LA GUERRE DES DEUX-ROSES
Publié le 10/11/2018
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LES YORK CONTRE LES LANCASTRE
De 1455 à 1485, l'Angleterre connaît une série de guerres civiles opposant la maison de Lancastre, dont la rose rouge est l’emblème, à la maison d'York que symbolise une rose blanche. Appelé à passer à la postérité sous le nom de guerre des Deux-Roses, ce conflit a pour enjeu le contrôle du gouvernement, puis la possession de la couronne d'Angleterre. Par ses renversements de situation, en raison de l'implication personnelle des grands seigneurs dans les combats, la guerre des Deux-Roses a pour effet de décimer l'aristocratie anglaise et donc d'affaiblir durablement sa puissance politique. La monarchie sort victorieuse de ce conflit et impose le retour à l'ordre qu'incarne avec autorité - et pour plus d'un siècle - la dynastie des Tudors (1485-1603).
DES TEMPS TROUBLÉS
Les conséquences DE LA GUERRE DE CENT ANS
• Les années qui précèdent la défaite finale de l'Angleterre dans la guerre de Cent Ans (bataille de Castillon, 1453) s'accompagnent du retour en Angleterre de compagnies de soldats - désormais, les Anglais ne disposent plus sur le territoire français que de la seule ville de Calais. Habituées à des pillages profitables, ces compagnies sont toutes prêtes à se mettre au service d'une cause, quelle qu'elle soit, dès lors que ses membres estiment pouvoir en tirer un avantage. De fait, les chroniques de l'époque font mention d'un nombre important d'assassinats, de révoltes et d'exécutions sommaires, racontés sur un mode naturel et présentés comme des incidents inévitables. Ainsi, en 1450, les communes du Kent se soulèvent à l'appel d'un aventurier, Jack Cade, qui se fait appeler Mortimer et se présente comme un descendant d'Édouard III (1327-1377). Jack Cade parvient jusqu'à Londres où il n’est arrêté qu'en raison de ses querelles avec les bourgeois de la ville.
Mais, avant d'être lui-même tué, il décapite le trésorier du roi Henri VI et un sheriff du Kent. La noblesse est prête à suivre ce genre d'usurpateur dans la mesure où elle considère que le roi Henri VI est responsable de la défaite anglaise sur le sol français. De fait, autour de la rose rouge de Lancastre et de la rose blanche d’York vont se grouper des seigneurs batailleurs, qui ont souvent été défaits dans les derniers combats de la guerre de Cent Ans et qui n'ont d'autres objectifs que de conquérir la fortune en contribuant à la victoire du parti qu'ils ont choisi.
Des querelles de succession
• Richard, duc d'York, entend tirer profit de la faiblesse d'Henri VI. Il est vrai que ce dernier ne montre guère les qualités d'un roi. Féru d'histoire et de théologie, pieu à l'extrême, rien ne semble moins l'intéresser que la conduite des affaires du royaume.
• Par ailleurs, Richard estime que la couronne d'Angleterre lui revient. N'est-il pas plus proche d'Édouard III - vainqueur des Français à Crécy et à Calais -puisqu'il descend par sa mère du duc de Clarence (troisième fils d'Édouard III), alors qu'Henri VI n'est que le petit-fils de Charles VI de France ? De plus, le mariage d’Henri VI avec une princesse française, Marguerite d’Anjou, achève de le rendre impopulaire.
1er bataille de Saint Albans Bataille de Northampton Mort de 2e bataille Bataille Édouard IV, Alliance entre Richard dYork de Saint Albans de Towton roi d'Angleterre Warwick et Rétablissement d'Henri VI sur le trône Mort de Warwick à la bataille de Barnet Richard III dYork, roi d'Angleterre Victoire d'Henri Tudor sur Richard III
à Wakefield les Lancastre
LES PREMIERS COMBATS
Les batailles pe Saint Albans ET de Blore Heath
• Après avoir levé une armée de quelque 3 000 hommes, Richard dYork marche sur Londres dans le dessein de s'emparer de la couronne. L’armée d'Henri VI (environ 2 000 hommes) se porte au-devant de l'adversaire pour lui barrer la route de Londres. Le choc, en réalité une escarmouche, a lieu le 22 mai 1455 à Saint Albans et tourne rapidement à l'avantage de Richard. Marguerite d'Anjou, accompagnée de son jeune fils Édouard, prend le chemin de l'exil.
• Fort de sa victoire, Richard acquiert une influence prépondérante au sein du gouvernement et noue de nouvelles alliances, notamment avec Richard Neville, comte de Warwick, puissant seigneur que l'on surnommera le « dernier des barons » et le «faiseur de rois».
• Mais la guérison d'Henri VI en janvier 1455 pousse Richard à reprendre l'initiative, cette fois dans le dessein de s'emparer de la couronne. En septembre 1459, alors que la reine semble disposer des moyens de mettre un terme aux prétentions de Richard, ce dernier prend les devants et attaque les forces des partisans des Lancastre. L'affrontement a lieu au cours de la bataille de Blore Heath (23 septembre 1459). En dépit d'une nette infériorité numérique (5 000 hommes contre 10 000), les troupes de Richard d'York conduites par Richard Neville restent maîtresses du terrain.
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De plus , pour une raison non élucidée , Richard se lance à l'attaque sans attendre le soutien du comte de Warwick .
La déroute des troupes de la maison d'York est totale.
Richard est tué ainsi que l'un de ses fils, Edmond, comte de Rutland ; le comte de Salisbury est fait prisonnier et exécuté.
La bataille de Wakefield met un terme à une forme d'affrontement jusqu'alors chevaleresque : désormais , les combats seront sans pitié et, bien souven~ c'est au corps à corps , à la hache et à l 'épée que se décidera l'issue du combat.
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lA BATAIUf DtCISIVE DE TOWTON • Lorsqu'il apprend le désastre de Wakefield et la mort de son père , Édouard décide de poursu ivre le combat jusqu 'à la victoire totale.
• Il affronte les forces de la maison de lancastre le 2 février 1461 à Mlll'timers Cross.
Disposant de troupes fraîches , i l vient facilement à bout de l'armée ennemie principalement constituée de mercenaires français et irlandais .
Cette victoire permet à Édouard de se faire reconnaître comme héritier légitime du trône d 'Angleterre (4 mars 1461 ).
• Édouard et Richard Neville entendent pousser leur avantage sur le terrain .
Mais le 17 février 1461, Richard e st battu par les armées de la maison de Lancastre placées sous le commandement du duc de Somerset lors de la seconde bataille de Saint Albans .
Dans sa fuite , Richard abandonne Henri VI qu'il détenait comme otage .
Cet échec n'entame pas la déterm ination d 'Édouard ,
d ' autant que les troupes de la maison de Lancastre décident de se replier .
Les deux partis amassènt des troupes et le grand choc intervient à Towton, le 29 mar s 1461, sur une colline balayée par le vent et la neige .
!:affrontement entre les archers des York , rejoints par les troupes fraîches de John Mowbray , et les charges de cavaliers des Lancastre tourne à l 'avantage des premiers .
De loin la plus grande , la plus sanglante des batailles de la guerre des Deux-Roses , Towton permet à Édouard de consolider sa position .
le couronnement a lieu à Westminster le 28 juin 1461.
Marguerite et Henri VI ne doivent leur salut qu'à leur fuite en Écosse.
LE RÈGNE D'ÉDOUARD IV • Pendant près de trois ans, tdou11rd peut se consacrer aux affaires du royaume .
le part i des lancastre semble en effet durablement affaibli et dans l 'incapacité
de lever une armée capable de chasser la maison d'York .
Sur le plan intérieur , Édouard est bien accueilli par la population qui, enfin , entrevoit la fin des luttes incessante s .
• Sous le règne d 'Édouard IV, le pays connaît un lent rétablissemen~ même si les partisans de la reine Marguerite parviennent quelques années encore à susciter des troubles au pays de Galles et dans le nord du royaume .
les victoires d'Édouard IV lors des batailles d'Hedgeley Moor (25 avril1464 ) et d 'Hexham (15 mai 1464) coûtent la vie à la plupart des derniers chefs lancastrien s.
Finalemen~ l'ancien roi Henri VI est capturé en 1465 et enfermé à la Tour de londres .
• Rien donc ne semble devoir entamer l'autorité du jeune roi.
Mais c 'est sans compter a vec Warwick qui, pour avoir grandement contribué à installer Édouard sur le tr ône, n'entend pas être relégué au second plan .
• Une série de décisions royales vont blesser dans sa fierté le «faiseur de rois».
Édouard destitue le frère de Warwick, George , archevêque
liillil!llil.
d'York, en tant que chancelier (1467); ensuite, il épouse tlisllbetb Woodtdlle, ruinant ainsi les plans d'union avec la France qu'a imaginés Warwick ; enfin , il décide de se rapprocher de Charles , duc de Bourgogne , plutôt qu'avec l'alli é du comte , Louis Xl, roi de France.
WARWICK CONTRE ÉDOUARD IV • Au cours de l'été 1469, le comte de Warwick s'emploie à soulever les habitants du nord de l'Angleterre et parvient à former une petite armée .
Édouard lève à son tour quelques troupes qu'il place sous le commandement des comtes de Pembroke et de Devon .
Mais les forces royal es sont défaites lors de la bataille d 'Edgecote Moor , le 26 juillet 1469 .
Pis, le roi tombe aux mains des partisan s de Warwick .
• Dès que la capture du roi est
r------------_, connue , l'Angleterre manifeste sa désapprobation .
londres est au bord LES TAatQUES MIUTAIRES
• les soldats qui s'affrontent durant la guerre des Deux-Roses jouissent en Europe d'un immense prestige fondé sur les grandes victoires de Crécy (1346), de l'flllleiS (1356) et d'Azincourt (1415) remportées sur la chevalerie française .
• Aussi, les capitaines anglais de l'époque d'Édouard IV ne modifient en rien la tactique défensive qui avait fait ses preuves lors de la guerre de Cent Ans.
• les troupes, toutes à pied , attendent l'assaut de l'ennemi, rangées en deux ou trois ailes (•batailles•) . les hommes d'armes, lourdement cuirassés, occupent le centre de chaque aile, celle-ci étant flanquée de part et d'autre d'un corps d'archers disposé en saillant • Quand l'adversaire passe à l'attaque, les flèches des archers, éclaircissant ses rangs , ont tôt fait d'y semer un désordre que vient alors compléter le • travail• des hommes d'armes.
• Mais au cours des affrontements de la guerre des Deux-Roses , l'un et l'autre camp ont hérité de cette tactique et aucun n'est prêt à jouer le rôle des Français à Azincourt Aussi, aprés un échange de flèches et de quelques coups de canon, les deux armées s'élancent d'ordinaire simullanément à l'assaut et se fragmentent rapidement en tentant d'obtenir la décision par la hache , l'épée ou la hallebarde .
• le combat est apre , mais en général de courte durée .
À l'exception de celle de Towton, aucune des batailles de l'époque ne dépasse trois heures .
de l'émeute , car s i Warwick est maître du roi, il ne l'est pas du royaume.
Parallèlement , une faction de la maison de lancastre hostile à Warwick réussit à rassembler une petite armée à la frontière de l'Écosse .
De son côté , Warwick se r évèle incapable de réunir des troupes pour faire face aux lancastriens car les hommes refusent de prendre les armes tant qu'ils n 'ont pas l'assurance qu'Édouard a retrouvé la liberté .
Warwick est donc contraint de relâcher le roi.
Celui-ci fait une entrée triompha l e à londre s le 30 novembre 1469.
• Aussitô~ pour se faire pardonner, Warwick rassemble assez d 'hommes pour tenir en échec la tentative de la maison de lancastre de contester la prééminence des york istes.
• Fin politique , Édouard fait entrer Warwick à un conseil des pairs chargé de régler leurs différend s.
Mais le «faiseur de roi», furieu x de découvrir que, après avoir cru tout gagner, il ne remporte rien, se remet à comploter avec des lancastriens du comté de lincoln .
Édouard n 'a aucun mal à écraser la rébellion au cours de la bataille de losecote Field , le 12 mars 1470.
• Warwick, qui s 'est enfui en France au lendemain de cette défaite , n 'est pas pour autant à bout de ressources .
Soutenu par louis Xl, qui est parvenu à le réconcilier avec Marguer ite d'Anjou , Warwick débarque dans le sud-ouest de l'Angleterre en septembre 1470 dans le dessein de reconquérir le royaume , cette foi s au nom de la maison de Lancastre .
• Édouard , qui se trouve alors dans le Yorkshire , est surpris par le frère de Warwick, John , marquis de Montagu , supposé fidèle à la caus e des Yorkistes .
Le roi réussit toutefoi s
à s ' échapper et à s'embarquer à la hâte pour les Pays -Bas, gouverné par le duc de Bour gogne , son beau -frère et allié.
• Warwick est donc parvenu à ses fins, le royaume tombant entre ses mains et celles de la maison de Lancastre.
Tiré de sa prison , Henri VI est réinstallé sur le trône .
• À force d'insistance, Édouard finit par obtenir de son beau-frère un prêt de 50 000 couronnes et une petite flotte .
Après avoir débarqué à Ravenspur , dans le Yorkshire, et à l'issue d'une marche vers le sud, Édouard et ses hommes affrontent les forces de Warwick lors de la bataille de Barne~ le 14 avril1471 .
la victoire des yorkistes est totale .
Warwick trouve la mort sur le champ de bataille.
• Trois semaines plus tard, le 4 mai, le roi Édouard accule les forces de la reine Marguerite à Tewkesbury , où elles subissent une terrible défaite .
les principaux capitaines lancastriens sont capturés et exécutés , dont le prince tdOUIIrd, fils de Marguerite d'Anjou et de Henri VI.
• le 21 mai, Édouard d'York rentre triomphalement à londres .
le jour même, Henri VI meurt à la Tour de Londres , laissant sans héritier direct la maison de lancastre .
la reine Marguerite, capturée peu aprés la bataille de Tewkesbury , retrouvera la liberté après le versement d 'une rançon de 50 000 couronnes par louis Xl.
Elle meurt en France en 1482 .
• Les guerres entre Lancastre et York sont à présent terminées .
Au cours des douze années de règne qui lui resten~ Édouard se consacre à développer la puissante monarchie qu'il vise à instaurer depuis 1461.
• En 1474 , il met un terme à une coûteuse guerre maritime avec les villes de la Hanse .
le 29 août 1475 , en signant avec louis Xl la paix de Picquigny , il ouvre à ses négociants le s marchés de France .
• Avec l'appui de son habile et fidèle frère R ichard , duc de Gloucester, il accroît le domaine royal, réorganise les finances , augmente régulièrement son emprise sur le royaume , puis meurt, «prince aimé », le 9 avril1483 à l'âge de quarante et un ans.
LES DERNIERS SOUBRESAUTS : DES YORK AUX TUDORS
L'USURPATION DE RICHARD Ill • Édouard IV laisse deux jeunes fils, dont l'aîné est appelé à lui succéder sous le nom d 'Édouard V.
Mais son frère, Rlchtlrd -dont Shakespeare dressera un portrait terrible dans Richard Ill (1594)-fait assassiner ses neveux après les avoir emprisonnés dans la Tour de Londres .
• À l 'annonce de ce double meurtre , un sentiment de révolte gagne la population .
•
Une chance pourtant s'offre de réconcilie r les deux Roses .
Il reste en effet un Lancastre , Henri Tudor , duc de Richmond .
Si Henri Tudor envisagea it d'épouser Élisabeth d'York, fille d'Édouard IV, les deux maisons s
e trouveraient pour le coup réunies.
Pressentant le danger , Richard s'efforce de se concilier les bourg eois en convoquant un parlemen ~ non sans avoir projeté d 'épouse r lui-même Élisabeth.
• Mais Henri Tudor , parti de Harfleur avec 2 ooo soldats , débarque en Angleterr e et atteint Bosworlh où, le 22 août 1485, il affronte l'armée de Richar d.
• le sort de la bataille est décidé par les Stanley , grands seigneurs du lanca shire, qui se prononcent pour Hen ri Tudor parce que lord Stanley a épousé , en secondes noces , la mère d'Henri.
En dépit de sa bravou re, Richard Ill trouve la mort lors de l'affron tement.
• la couronne qu'il portait au comba~ e t qui était tombée dans un buisson, est retrouvée après la bataille et placée par Stanley sur la tête de son beau -fils.
Ce dernie r devient roi d 'Angleterre sous le nom d'Henri VIl.
UNE GUER RE PEU MEUBTRIÈRE • la période qui va de l'escarmouche de Saint Albans (1455) à la bataille de Boswo rth (1485 ) ne peut pas être cons idérée comme une époque de luttes et de guerres permanentes , durant laquelle les «horreurs de la guerre » auraient ravagé l'Angleter r e .
En réalité , la guer re ne s'est produite que par secousses , intervena n t dans des époques de paix ; même dans les périodes où elle s'est déch aînée , comme en 1460-1461 et 1470-1471 , la majeure partie du royaume e t de ses habitants ne fut pas impli quée dans les hostilités.
• les brèv e s campagnes auront fait peu d e victimes , sauf parmi les seigne urs et chez leurs partisans .
Il est vrai que la façon dont on se bat, la taille des armées , la politique des yorki stes face à la guerre , tout contr ibue à limiter le nombre des victim es.
On estime que la guerre des Deux-Roses a fait tout au plus 2 8 000 morts , c'est-à-dire infinimen t moins que la peste durant la même période .
• En revan che, cette guerre fratricide aura été fatale à l 'aristocratie.
Durant le règne d'Henri VIl, un diplomate vénitien note ,
à propos des seigneurs du royaume : «Il en reste très peu et ceux-ci diminuen t chaque jour .
».
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