Syrie de 1995 à 1999 : Histoire
Publié le 24/12/2018
Extrait du document

Au début des années 1995-1999, les États-Unis obtiennent, par l’intermédiaire du secrétaire d’État Warren Christopher, la reprise des contacts directs entre les ambassadeurs d'Israël et de Syrie. Les négociations débutent à New York en décembre 1995, mais l'intransigeance du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, qui tente de freiner, voire de remettre en cause le processus de paix initié par son prédécesseur travailliste, gèle les pourparlers. Alors qu'en juin 1996, le président Hafez el-Assad (au pouvoir
depuis 1971, et « réélu » pour un cinquième mandat en février 1999) déclare que la reprise des négociations avec Israël n'est pas à l’ordre du jour, après l’arrivée d'Ehoud Barak au pouvoir, il accepte d’ouvrir des négociations au plus haut niveau en décembre 1999. Entre-temps, la Jordanie et la Syrie normalisent, en août 1996, leurs relations, refroidies à la suite de la signature du traité de paix israélo-jordanien de 1994 et, au cours de sa visite à Damas durant sa tournée au Proche-Orient en octobre 1996, le président de la République

«
Si
l'image du présidem
el-Assad est omnipréseme
à Damas, la question de la
successiofl laisse planer
un doute sur la pérennité
tlu régime.
© Ge/lie-Maitre-Gamma l'Afrique
du Nord, en novembre 1997.
Mais, en mars 1998, le gouvernement
israélien propose finalement de retirer
ses troupes du sud du Liban en
échange d'un accord de sécurité.
La
Syrie, qui dispose de 30 000 soldats
au Liban, maintient son refus d'un tel
accord et dénonce une manœuvre
d'Israël pour mieux l'isoler et, lors
d'une rencontre entre le président el
Assad et les principaux dirigeants
libanais, une déclaration commune
exige l'application sans conditions de
la résolution adoptée par le Conseil
de sécurité de l'ONU, en 1986,
enjoignant à l'État hébreu de se retirer
du Liban.
Par ailleurs, l'alliance militaire
contractée par la Turquie et Israël
inquiète les dirigeants syriens, qui
protestent contre les manœuvres
navales communes que ces pays
mènent avec les États-Unis en
Méditerranée orientale (décembre 1996
et 1997).
Pour contenir les risques liés
à cette alliance, la Syrie normalise ses
relations avec son frère ennemi, l'Irak
(les frontières sont ainsi réouvertes, en
été 1997), et renforce ses liens avec
l'Iran.
La tension entre Damas et
Ankara cesse après la décision syrienne
de ne plus soutenir l'opposition kurde
au régime turc (accord d'Adana, signé
par les deux pays en octobre 1998) et
l'expulsion de Damas du chef du PKK,
Abdullah Ocalan.
En ce qui concerne les affaires
intérieures, le président el-Assad, dont
1 'état de santé reste fragile, doit régler
la question de sa succession pour éviter
que le pays ne sombre dans le chaos
après sa disparition et surtout que la
communauté dont il est issu, les
Alaouites, ne subissent les contre
coups d'un changement de régime.
Après la mort, en 1994, de son fils aîné
Bassel el-Assad (préféré à son propre
frère, Rifaat, vice-président, rejeté par
la communauté alaouite mais aussi par
les notables sunnites), son fils cadet,
Bachar, âgé de 30 ans, est arraché à ses
études d'ophtalmolog.ie à londres et
rappelé à Damas.
Mais des incertitudes
demeurent : Bachar doit avoir le temps de
se préparer pour accéder légalement
au pouvoir et les officiers alaouites,
piliers du régime, ne sont peut-être pas
prêts à s'effacer une seconde fois pour
laisser la place au fils cadet.
Par
ailleurs, il n'est pas sûr que la
bourgeoisie sunnite, largement
récompensée pour sa loyauté et son
soutien au régime, accepte de faire
allégeance au fils comme elle l'a fait,
depuis 1971, vis-à-vis du père.
Une
alternative serait alors une direction
collégiale.
De plus, la disparition d'el
Assad risque de mettre fin aux
négociations israélo-arabes.
En effet,
lui seul peut imposer un changement
d'orientation radical et laisser envisager
(tout en maintenant intacte sa
crédibilité) la paix avec Israël, chose
encore impossible il y a quelques
années.
À la fin de l'année 1999, la
question de la succession reste donc
encore une inconnue et fait planer des
doutes sur l'avenir du régime ainsi que
sur les équilibres politiques au Proche
Orient.
Ces incertitudes contribuent au
gel des réformes menées en Syrie
depuis le début des années quatre
vingt-dix, alors que quelques avancées
démocratiques ont été réalisées.
Deux
cent cinquante prisonniers politiques,
dont le chef du Parti communiste
dissident, Ryad Turk, et le responsable
des comités de défense des droits de
l'homme ct des libertés démocratiques,
Aktham Nouaisseh, sont libérés en juin
1998 ; en mai 1998, un grand
rassemblement populaire et spontané, à
Damas, à l'occassion des funérailles de
Nizar Qabbani (grand poète national
qui, durant toute sa vie, est resté hostile
à l'idéologie baassiste ), à été toléré par
le régime.
Pour consolider son pouvoir,
le président el-Assad éc.arte plusieurs
hommes forts au sein de l'armée et des
services de renseignements en 1998, se
séparant de son chef d'état-major et, en
1999, des chefs de la sécurité intérieure
et des renseignements généraux ;
auparavant, en juillet 1997, Bachar à
été promu au grade de lieutenant
colonel.
Le fils héritier est d'ailleurs
déjà impliqué dans le règlement de la
question libanaise et de quelques dossiers
sensibles, comme la lutte
contre la corruption qui gagne la haute
administration et les milieux d'affaires.
À 1' issue des élections législatives de
novembre-décembre 1998, le pouvoir
baassiste sort, une fois de plus,
renforcé : avec 167 sièges sur 250, le
parti Baas et ses alliés ont la mainmise
sur l'Assemblée et, si l'on inclut les
83 députés « indépendants "• la quasi
totalité des parlementaires reste très
proche du régime.
Sur le plan économique, Je pays
connaît, dès 1995, une reprise
significative de la croissance, et le
processus de libéralisation économique
fondé sur la loi sur les investissements
de mai 1991 commence à donner des
résultats.
Le pays retrouve
l'autosuffisance alimentaire, et le
secteur privé (près de 70 % de la main
d' œuvre syrienne) est en plein
développement -mais reste dépendant
de la classe politico-militaire alaouite
qui le soutient et le protège, ce qui peut
constituer à terme un handicap,
notamment si l'économie s'ouvre
réellement aux marchés internationaux,
en cas d'issue favorable du processus
de paix.
L'ouverture à la concurrence
nécessite le désengagement de l'État,
ce qui signifie la fin du système
clientéliste mis en place patiemment
par l'homme fort de Damas depuis son
arrivée au pouvoir en 1971.
Mais, à
partir de 1997-1998, le processus de
libéralisation stagne, et les milieux
d'affaires syriens continuent de
réclamer la réforme du secteur public,
de la fiscalité et du système bancaire.
Le ministre de l'Économie,
Mohammed el-lmadi, confirme, en
août 1997, la poursuite des réformes
économiques, sans défrnir cependant de
calendrier.
La Syrie commence, dès
juillet 1997, à rembourser à la Banque
mondiale une partie de sa dene ct, en
octobre, elle demande 1 'ouverture de
négociations en vue d'un accord
d'association avec Bruxelles.
En février
1998, elle signe avec le Liban un
accord prévoyant l'abolition
progressive des barrières douanières
tandis qu'avec l'Irak de nouveaux
contrats commerciaux sont passés, les
deux pays décidant en juillet 1998 de
construire un nouvel oléoduc et de
rouvrir celui reliant Kirkouk (Irak) à
Banyas (Syrie), fermé en 1982.
De
nouveaux investissements publics sont
réalisés dans les secteurs des
communications, de l'énergie
hydraulique et du pétrole.
La situation
économique et sociale continue
cependant de se dégrader en raison du
ralentissement de la croissance, du
manque de liquidités, du recul des
exportations et de la hausse des
importations..
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