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RIF (guerre du)

Publié le 11/03/2012

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C'est par la défaite sanglante d'une armée espagnole forte de 20 000 hommes, à Anoual, du 21 au 26 juillet 1921, que le chef rifain Abdelkrim el-Khettabi (1882-1963) engage dans les montagnes du Rif la guerre de libération qui porte le nom de « guerre du Rif « (1921-1926). Son succès dans la zone nord, espagnole, du protectorat marocain fut rapide et presque total, seules quelques villes portuaires échappant à son emprise. Abdelkrim met alors sur pied une « république confédérée des tribus du Rif «, où l'organisation tribale s'accompagne d'un souci de modernisation. L'islam demeure la référence et la question de la monarchie marocaine n'est pas posée. Le mouvement s'impose à l'opinion internationale, non seulement en Espagne où les revers militaires subis portent au pouvoir Miguel Primo de Rivera (1923), mais en France où il provoque le premier grand débat colonial. Le Parti communiste français (PCF) apporte son soutien à la cause rifaine (1923-1925). En Orient, Abdelkrim fait figure de héros. En 1924, une offensive contre la zone française du protectorat est déclenchée. En quelques semaines, balayant tout sur leur passage, les Rifains menacent Taza et Fès, dont l'évacuation est envisagée. Le maréchal Lyautey hésite, ce qui lui vaudra d'être écarté du Maroc (1925). Le maréchal Pétain prend le commandement d'une armée forte de 160 000 hommes, avec armement lourd et soutien aérien. Il met au point, avec M. Primo de Rivera, une campagne conjointe (1925-1926) qui prendra quelque 20 000 Rifains en tenailles. L'effondrement est rapide et Abdelkrim est poussé à la reddition en mai 1926. Il sera envoyé en détention dans l'île de la Réunion où il demeurera jusqu'en 1947. Au cours d'un transfert en France, il débarque clandestinement en Égypte où il meurt en 1963. Abdelkrim, qui refusa de rentrer dans son pays tant qu'un soldat étranger demeurerait au Maghreb, est resté un haut symbole du nationalisme populaire. Magali MORSY

« DO EL-KIIM.

PIONNIEI DE LA DkOLONISAnON Fils d'un cadi Ouge musulman), Abd ei-Krim naft en 1882 à Ajdir, dans la tribu des Beni Ouriaghel.

Avant de combattre les Espagnols , il les a longtemps côtoyés à Melilla, possession espagnole du nord du Maroc où il s'Installe en 1907 .

D'abord rédacteur dans un journal hispanophone de Melilla, il devient secrétaire du Bureau des affaires indigènes , puis cadi-chef en 1914.11 complète ainsi sa formation traditionnelle de lettré arabe avec les apports de la culture européenne , développant une vision politique originale qu'il mettra plus tard en application : le choix d'Instituer une république prenant appui à la fois sur les traditions communautaires des tribus montagnardes et sur la religion tout en y instillant des éléments de modernité est à cet égard révélateur .

Dénonçant l'oppression coloniale, il quitte l'Administration espagnole en 1919 et se lance dans la lutte armée : ses talents de combattant et de propagandiste, son intelligence et son aura lui valent l'adhésion progressive de toute la population du Rif.

et entière du Maroc.

et d 'en finir avec la dynastie chérifienne, compromise pas ses concessions aux puissances occupantes , et en premier lieu les protectorats accordés en 1912.

Sur le plan militaire , il peut en outre se prévaloir d'une réelle capacité offensive : la victoire d'Anouallui a permis de faire main basse sur des fusils et des munitions en grand nombre , mais surtout attaquent aussitôt les accrochages se multiplient : prenant prétexte de cette intrusion, Abd ei-Krim lance en avril 1925 une vaste offensive contre les positions françaises.

Les troupes coloniales, en nombre insuffisant sont contraintes de céder du terrain.

Après sa reddition.

il est envoyé en détention à la Réunion par les Français .

En 1947, lors de son rapatriement en métropole, il parvient à s'échapper du bateau qui le transporte lors d'une escale en Égypte et s'Installe dandestinement au Caire .

En décembre 1947, avec des nationalistes marocains en exil, il est l'un des fondateurs du Comité de libération du Maghreb arabe , qui sera le fer de lance idéologique de la lutte pour l'Indépendance de l'Afrique du Nord .

le héros de tout un peuple meurt au Caire en 1963, sans jamais avoir revu son pays natal.

Il s 'était toujours refusé à rentrer au Maroc • avant que le dernier militaire étranger ait quitté le sol maghrébin •.

Partisan d'une souveraineté totale et sans concession, il avait en effet rejeté l'accord de 1956 par lequel la France abandonnait son protectorat sur le royaume chérifien , qui accédait à l'Indépendance.

En outre, il ne nourrissait guère d'estime pour le nouveau roi du Maroc.

Mohammed V: en 1958, ce dernier avait fait réprimer impitoyablement une nouvelle révolte des tribus du Rif qui, éternelles rebelles , contestaient son pouvoir .

le bilan avait été lourd : plus de 8 000 morts .

Précurseur des guerres de décolonisation, Abd ei-Krim devait déclarer à la fin de sa vie: • Je suis venu trop tôt • Bientôt Taza et Fès sont menacées , leur évacuation est envisagée.

LEs HtSITATIONS DU MAitcHAL lYAunY !:emploi de l'aviation, puis des chars quand le terrain l'autorise , et l'arrivée de renforts immédiatement engagés permettent de contenir les attaques rifaines, mais le doute s 'installe sur la politique du maréchal Lyautey .

Depuis l'établissement du protectorat en 1912 , il administre ce qu'il appelle «le royaume exemplaire » de manière indirecte : tout en conservant la réalité du pouvoir, il s'appuie sur le maghzen , c'est-à-dire le gouvernement traditionnel du sultan , et sur les notables locaux , qu'il intègre dans l'Administration.

Il est ainsi parvenu à maintenir un fragile équilibre entre les impératifs de la colonisation (plus de 400 ooo Français émigreront dans les années d'après guerre) et sa volonté de respecter les traditions et coutumes ancestrales marocaines , dont il se veut le garant.

S 'engager dans une guerre totale risquerait de mettre à bas cet édifice patiemment bâti.

En juillet , la situation militaire reste préoccupante , et Paris envoie une mission d'évaluation afin de déterminer «toutes les mesures à prendre en vue du succès ».

Elle est dirigée par le mtlr«btll Ntt1in , héros de la Grande Guerre , dont le prestige est immense en France : le rapport qu'il dresse est plutôt critique envers le résident général, dont il dénonce à mots couverts les atermoiements .

Dès lors, le sort d'Hubert lyautey est scell é.

LA FIN DE LA SÉCESSION RIFAINE PhAIN REMPLACE lYAUHY Le constat établi par le maréchal Pétain est entendu et le gouvernement français , pressé par les milieux colonialistes , décide d'une intervention massive .

Une armée forte de plusieurs centaines de milliers d'hommes est mobilisée ; pour cela , outre les troupes coloniales et les supplétifs indigènes, le gouvernement est contraint de faire appel au contingent moins de dix ans après la fin de la Première Guerre mondiale ..

.

En réaction , et pour la première fois, des intellectuels se mobilisent contre la guerre : le 2 juillet 1925, L'Humanit é publie l'appel à la paix lancé par l'écrivain Henri Bt1rbusse et signé par une centaine de personnalités , dont André Breton .

En vain .

Sur le terrain, Pétain obtient la direction effective des opérations militaires aux dépens du maréchal Lyautey , qui, en dépit de son poste de résident général , se voit déchargé de toute responsabilité .

Fatigué et humilité, il démissionne en septembre 1925 et retourne en métropole.

Il est remplacé par Tlléodore Steeg .

CONTIE-OFFENSIVE CONJOINTE FIANCD-ESPAGNOLE Avec l'arrivée du mar échal Pétain , le conflit change d'Intensité .

La vainqueur de Verdun est partisan d'une «guerre totale» contre les rebelles.

Dans un premier temps , ses troupes parviennent à stopper l'avancée jusque-là inexorable de l 'armée rifaine.

Parallèlement, le gouvernement français a opéré un rapprochement avec le pouvoir dictatorial espagnol en vue de conclure une campagne militaire conjointe contre le soulèvement du Rif.

En septembre 1925 , un nouveau corps expéditionnaire, dirigé par Primo de Rivera en personne , débarque à Alhucemas.

Puis , afin d 'optimiser les offensives , le commandement des deux armées est unifié et confié à Pétain .

Le 2 octobre , la ville d'Ajdir, fief rifain , tombe .

Voyant sa situation se détériorer mais aussi pour gagner du temps , Abd ei-Krim , à la faveur d'une trêve hivernale , envoie des émissaires entamer des pourparlers de paix à Oujda en avril-mai 1926 .

Mais les négociations capotent rapidement , les Européens jugeant inacceptables les exigences du chef rifain .

LA REDDITION D'ABD EL·KRIM Les hostilités reprennent au lendemain de l'échec des négociations d'Oujda .

Mais la contre-offensive franco­ espagnole laisse peu de doutes quant à l'Issue du conflit le rapport de forces est en effet trop inégal.

Abd ei-Krim ne dispose que de 75 000 combattants face aux 400000soldats des deux puissances coloniales.

Il doit en outre faire face à une écrasante supériorité en matériel.

En plus de l'artillerie lourde, l'aviation est massivement utilisée .

les escadrilles françaises procèdent à des missions quasi quotidiennes de bombardements qui n'épargnent pas les civils: les villages et les souks sont considérés comme des cibles militaires .

Le but est autant de terroriser les populations que d 'obtenir des renversements d'alliances qui affaiblissent la coalition rifaine .

Au bout de quelques semaines d'Intenses combats , prise en tenaille, l'éphémère République du Rif s'effondre .

Le 26 mai 1926, afin d'épargner les siens et après avoir obtenu l'assurance d 'avoir la vie sauve, Abd ei-Krim choisit de se rendre aux Français -et non aux Espagnols , par peur des représailles .

Peu après , il est envoyé en exil à La Réunion .

La reddition du chef charismatique ne met pas définitivement fin LE MAHCHAL LYAUTEY La guerre du Rif aura été fatale au maréchal lyautey , dont le nom demeure dans la mémoire collective le symbole de l'affermissement de l'empire colonial français au tournant des m< et XX' sièdes .

Après avoir servi en Indochine , à Madagascar et en Algérie , où il s 'était toujours distingué par son humanité et son grand respect des traditions indigènes , il gouvernera le protectorat marocain de 1912 à 1925 en demeurant fidèle à ses idéau x.

Sa droiture et son expérience lui permettront ainsi de se concilier l'estime du sultan, favorisant la pacification du pays et l'implantation de l'autorité de la métropole sans grands heurts .

Mais ses hésitations lors de la guelTe du Rif et sa personnalité -monarchiste , il déplaisait au Cartel des gauches au pouvoir en France aux combats .

Il faudra encore plus d'un an pour réduire à néant les ultimes poches de résistance et pacifier totalement les montagnes du Rif.

LA GUERIE DU RIF, SYMBOLI DE LA lUTTE ANTICOLONIALE la guerre du Rif marque un tournant dans l'histoire coloniale du Maroc.

Elle a convaincu les Français d'accélérer le processus de «pacification » afin de briser les résistances des tribus qui, dans le Moyen et le Haut Atlas , continuent à rejeter , certes de manière moins organisée que dans le Rif, la présence européenne.

Sur le plan politique, le conflit marque la fin du système mis en place par le maréchal Lyautey depuis 1912 : désormais , l'administration du pays par les Français se fera de manière plus directe.

Il n 'en demeure pas moins que la révolte du Rif aura une influence considérable dans le monde arabe­ musulman .

Elle appa rait comme la première tentative de secouer le joug colonial tout en proposant une alternative politique sérieuse.

Après la Seconde Guerre mondiale, lorsque s'amorcera le lent mouvement de décolonisation , nombreux seront les leaders indépendantistes à se référer à Abd ei·Krim , élevé au rang de héros du nationalisme arabe .

Mais son retentissement ira bien au-delà .

En Indochine, Hô Clli Minh, qui voyait en Abd ei-Krim un précurseur, s'inspirera ouvertement des méthodes de lutte utilisées par les Rifains pour sa guerre de libération nationale contre les Français, puis contre les Américains : recours à la guérilla, mise en condition de la population , tentative de mobilisation des opinions publiques occidentales , multiplication des initiatives diplomatiques ...

À cet égard , la guerre du Rif peut apparaître comme la première guerre anticoloniale.

à partir de 1924- entralneront sa disgrace.

Avant de quitter le Maroc.

celui qui fut toujours convaincu de la mission civilisatrice de la France devait déclarer : •Il est à prévoir, et je le crois comme une vérité historique , que, dans un temps plus ou moins lointain, l'Afrique du Nord évoluée, civilisée, vivant de sa vie autonome , se détachera de la métropole .

Il faut qu'à ce moment-là, et ce doit être le suprême but de notre politique, cette séparation se fasse sans douleur et que les regards des indigènes continuent toujours à se tourner avec affection vers la France .

Il ne faut pas que les peuples africains se retournent contre elle.

À ces fins.

il faut dès aujourd'hui, notre point de départ nous faire aimer d 'eux.a Il meurt en 1929 et.

selon ses vœux.

il est inhumé à Rabat. »

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