Les « thèses d'avril » de Lénine.

« DÉVELOPPEMENT Introduction • En avril 1917, l'immense Russie vit, depuis près de six semaines, dans la fièvre révolutionnaire.

L'autorité légale estdévolue au gouvernement provisoire (le G.P.) sous la présidence du prince Lvov; les libéraux K.D.

y exercent uneinfluence prépondérante.

Mais le pouvoir légal du G.P.

est surveillé et sans cesse contesté par le « pouvoir de fait »des soviets, assemblées populaires permanentes, qui se sont constituées dans presque tout le pays et où lesmencheviks et les S.R.

sont largement majoritaires.

C'est le soviet de la capitale, Petrograd, qui est le plus actif etpeut exercer le plus de pression sur le G.P.

Le S.R.

Kérensky, ministre de la Justice du gouvernement et vice-président du soviet de Petrograd, s'efforce d'assurer la liaison entre les deux pouvoirs. • Un équilibre politique instable.

Mais le nouveau régime doit faire face à une situation délicate : la guerre sepoursuit, le ravitaillement est mal assuré, les masses populaires attendent d'importantes mesures sociales, enparticulier les paysans qui revendiquent le partage des domaines des nobles. • Le 16 avril 1917, Lénine rentre en Russie.

Venant de Suisse, il a pu rejoindre Pétrograd en traversant l'Allemagne :il a bénéficié de la complicité des autorités allemandes ravies de pouvoir envoyer chez l'ennemi cet agitateurrévolutionnaire et pacifiste.

Lénine trouve la Russie en proie au désordre.

Le lendemain de son retour, il rédige les «thèses d'avril » qui formulent ses objectifs politiques les plus immédiats. I.

Les grandes lignes du programme de Lénine Les thèses exposées par Lénine peuvent être regroupées autour de quatre thèmes essentiels. 1.

L'attitude face à la guerre • « Une guerre impérialiste de brigandage ».

Pour Lénine, la guerre qui fait rage depuis près de trois ans n'est que laconséquence du choc des impérialismes, stade suprême du capitalisme.

Les puissances impérialistes cherchent àexploiter les nations étrangères comme les capitalistes exploitent les prolétaires.

La guerre n'est que la formeinternationale du « brigandage » capitaliste.

La guerre menée par la Russie n'a pour but que d'arracher à ses rivauxdes territoires, des sources de matières premières, des marchés. • Contre le « défensisme révolutionnaire ».

Lénine n'adhère pas pour autant à la position de nombreuxrévolutionnaires et de la majorité des soviets qui renoncent à toute idée de conquête mais refusent de cesser lecombat par crainte d'offrir aux « réactionnaires » militaristes allemands ou austro-hongrois la possibilité d'accaparerdes territoires russes. • La fraternisation.

Pour Lénine, il n'y a qu'une solution : refuser le combat.

Il reprend la thèse de l'Internationaleouvrière d'avant-guerre, reprise par les « zimmerwaldiens » dès 1915, qui préconisait la « grève de la guerre ».

En1917, des mutineries et des mouvements de fraternisation spontanée avaient eu lieu.

Lénine propose l'intensificationde cette fraternisation.

Il croit que les sentiments prolétariens prévaudront.

La guerre capitaliste cesserait faute decombattants! 2.

L'organisation du pouvoir • Pas de république parlementaire.

Bien des Russes, surtout les bourgeois, estiment que la révolution de févrierdevait marquer la naissance d'une démocratie parlementaire comparable à celle des pays occidentaux les plus «évolués ».

Les mencheviks eux-mêmes, interprétant le schéma marxiste, estiment qu'en raison du sous-développement de la Russie et de la faiblesse numérique de la classe ouvrière, une phase transitoire, capitaliste etde démocratie bourgeoise, est nécessaire avant le passage au socialisme. • « Tout le pouvoir aux soviets! » Lénine croit au contraire possible et nécessaire de passer immédiatement à ladeuxième phase de la révolution, c'est-à-dire à la prise du pouvoir politique par le prolétariat et son organe dereprésentation le plus fidèle, le soviet.

Il craint que le suffrage universel ne profite essentiellement à la bourgeoisiepar le biais des votes des masses paysannes qu'elle peut détourner à son avantage comme elle l'a prouvé dans lesdémocraties occidentales. 3.

Les objectifs économiques • La nationalisation des terres.

Toutes les terres, et notamment les vastes domaines des nobles, doivent devenirpropriétés de la nation et être mises à la disposition des soviets de paysans.

Suivant les principes socialistes, Léninene propose pas le partage des terres comme le revendiquent les paysans.

Par contre, toute latitude est laissée auxsoviets pour choisir le type d'exploitation qu'ils souhaitent : individuel ou, comme le préconisent théoriquement lesbolcheviks, collective. • Le contrôle de la production.

Pour le reste de l'économie, Lénine n'exige pas encore l'appropriation collective desmoyens de production.

Usines et commerces doivent donc, du moins provisoirement, rester aux mains de leurspropriétaires capitalistes.

Par contre, il conseille que les soviets d'entreprises contrôlent la production et surtout la. »