Les moines de Fleury-sur-Loire « volent » les reliques de saint Benoît
Publié le 01/09/2013
Extrait du document
En 672, les moines de l'abbaye de Fleury-sur-Loire se livrent à une opération audacieuse. Au monastère du Mont-Cassin, en Italie, ils s'emparent des précieuses reliques de saint Benoît de Nursie. Après le transfert des restes du « patriarche des moines d'Occident «, Fleury sera tout naturellement rebaptisée Saint-Benoît-sur-Loire.
L'abbé Mommole n'a guère le coeur en paix. Sur les bords de la Loire, où est établie depuis une vingtaine d'années l'abbaye de Fleury qu'il dirige, il songe au grand saint Benoît de Nursie. Le monastère, offi-ciellement fondé le 27 juin 651 par Léodebod, abbé de Saint-Aignan d'Orléans, comporte, comme c'est souvent le cas pour une abbaye carolingienne, au moins deux églises, l'une sous le vocable de saint Pierre, l'autre sous celui de sainte Marie.
«
Miraculeusement épargné
par
les Lombards
En 577, les Lombards, qui dis
putent l'Italie aux Romains et
aux Byzantins, ravagent le mo
nastère du Mont-Cassin .
Vers
529,
Benoît de Nursie était
venu s'y installer avec quel
ques moines et y avait fini ses
jours.
Peu avant les destruc
tions lombardes, les bénédic
tins avaient trouvé refuge à
Rome .
Le
pape Pélage Il les
avait hébergés
au Latran, près
de son palais .
Ce destin-là, le
grand saint l'avait entrevu
avant sa mort, le 21 mars 547.
Surpris en larmes par l'un de
ses disciples , il lui avait confié :
« Ce monastère que j'ai bâti
pour mes frères sera livré aux
barbares .
A peine ai-je pu
obtenir du Ciel que les moines
sauvent leur vie .
»
A Fleury, Mommole rêve de re
trouver les précieux restes de
saint Benoît et de les ramener
LES RELIQUES DE
BENOÎT MÉLANGÉES A CELLES DE SA SŒUR!
A l' abbaye du Mont-Cassin,
Aigulfe, dans sa précipitation,
a mélangé les ossements de saint Benoît et de sainte
Scholastique.
Afin de récompenser les clercs et
nobles du Mans qui se sont
joints
à l'expédition, il a été
convenu que les reliques de
Scholastique iraient dans
cette ville.
Aussi, fort
méticuleusement, tente+on
de séparer les restes du frère
de ceux de la sœur, avant de
les déposer dans leurs
châsses respectives.
Pour preuve qu'aucun doute
ne peut subsister, un miracle
se produit alors.
Les reliques
de Benoît ressuscitent un
jeune garçon,
tandis que
celles de Scholastique rendent la vie à une fillette !
sur les bords de la Loire .
li veut
les honorer dignement, car, au
VII° siècle , le culte des reliques
commence à
prendre son essor.
C'est ainsi
qu'en 672 une expé
dition se met en route pour l'Ita
lie , dirigée par le moine Aigu Ife,
accompagné de clercs et de
nobles oiginaires de la ville du
Mans.
Sans trop de mal, la trou
pe gagne les ruine s de l'abbaye
du Mont-Cassin , située à peu
près à mi -chemin entre Rome et
Naples .
Dans l'église Saint-Jean,
elle constate avec soulagement
que le tombeau du patriarche
est intact.
Par miracle, il n'a été
ni profané ni pillé !
Aigulfe et ses compagnons se
livrent alors à un « rapt » témé
raire .
Après avoir soulevé la
pierre tombale, ils s'emparent
des ossements de saint Benoît.
Mais la
sépulture contient d'au
tres précieuses reliques , celles
de sainte Scholastique, la sœur
jumelle du patriarche.
Si Benoît
et Scholastique reposent dans
le même tombeau , «cela se fit
afin que ceux qui n'avaient
qu'une âme en Dieu n'eussent
aussi
qu ' une même sépulture » ,
raconte le pape Grégoire le
Grand qui , dans ses Dialogues , a
retracé la
vie de saint Benoît .
Scholastique avait suivi son
frère dans
sa quête religieuse .
Installée à
proximité de l'ab
baye du Mont-Cassin, elle avait
fondé la branche féminine de
l'ordre bénédictin.
Lorsqu'elle
mourut, peu avant Benoît,
celui-ci vit son âme monter au
ciel sous la forme
d'une colom
be .
li demanda à recueillir le
corps de la future sainte pour
l'ensevelir dans la tombe pré
vue pour lui .
Une succession
de miracles
« Dans une panetière », Aigulfe
recueille
précipitamment les
précieux ossements
du frère et
de la sœur .
Emmenée par le
moine de Fleury, la troupe ne s'attarde
guère en Italie .
Elle
craint la réaction des moines
du
Mont-Cassin, toujours réfugiés à
Rome, s'ils
apprennent le« vol ».
Le retour est triomphal, comme
le narre le linteau du tympan
nord de l'actuelle abbaye de
Saint-Benoît-sur-Loire.
Tout au
long du chemin, les miracles
succèdent aux miracles .
Un
aveugle recouvre la vue, un
infirme est guéri ...
Encensoir à
la main, les moines de Fleury
viennent à la rencontre des
voyageurs .
Plus tard, lors d'une
fastueuse cérémonie, la châsse
abritant les ossements du saint
est installée dans l'abbatiale .
Le
monastère des bords de
Loire prend alors le nom du
patriarche et devient Saint
Benoît-sur-Loire .
Mais
l'histoire connaît encore
quelques soubresauts .
Vers
750, les moines italiens relè
vent le mont Cassin de ses
ruines
et souhaitent récupérer
leur bien .
Malgré l'intervention
du pape Zacharie et du roi
Pépin le Bref, les moines fran
çais refusent de leur rendre les
reliques .
Pourtant, au siècle
suivant, mystérieusement , l'ab
baye du Mont-Cassin déclarera
posséder quand même les
restes
du patriarche ....
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