LES CASTES EN INDE - Origine, rôle, débats et enjeux actuels
Publié le 13/11/2020
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LES CASTES EN INDE Origine, rôle, débats et enjeux actuels INTRO Depuis l'accélération de sa croissance économique dans les années 1980, l'Inde \"éternelle\" s'est révélée pleinement capable d'entrer dans la modernité. Pourtant, les traditions religieuses persistent dans la société indienne, comme en témoigne la survivance de son système de castes, l’une des plus anciennes hiérarchies sociales de l’histoire de l’humanité, aussi millénaire que la religion hindoue. Nous pouvons donc nous demander : En quoi l’immobilité, la résilience du système de castes indien témoigne-t-elle de l’imbrication très étroite entre vie publique et vie religieuse dans ce pays ? Il s’agira d’évoquer les origines du système de castes indien, puis de montrer l’évolution de son rôle dans la société indienne avant d’aborder les enjeux contemporains qu’il soulève. I- Un système millénaire qui prend racine dans les traditions religieuses et l’histoire de l’Inde Originellement employé par des commerçants portugais du XVIe siècle pour qualifier le système de hiérarchie sociale indien, le terme de caste est aujourd’hui utilisé globalement pour décrire une société hiérarchisée basée sur des groupes sociaux homogènes ayant le plus souvent une profession héréditaire. Bien que largement employé, ce terme ne reflète pas l’arrière-plan socioreligieux expliquant l’origine des castes en inde. Celle-ci est intrinsèquement liée à la religion hindoue et remonte à ses fondements védiques aux 2e et 1ers siècles avant JC, où les textes fondateurs ont été composés en sanscrit. Ainsi, au lieu d’employer le mot « castes » comme les Occidentaux, les Indiens utilisent plutôt des termes issus de la littérature védique : « varna » et « jati » caractérisant deux conceptions de castes différentes : elles peuvent être basées sur les classes sociales de l’ancienne société védique appelées varna ou sur la naissance (cad avoir une profession, une occupation héréditaire qu’on qualifie de Jäti). Le système de castes Varna Le mot Varna signifie « couleur » et désigne un système hérité de la société védique (e 1500 à 600 avant J-C) Ce dernier divise la société en quatre catégories principales dont beaucoup d’Indiens hindouistes croient qu’elles sont originaires de Brahma, le Dieu hindou de la création. Au sommet de la hiérarchie se trouvent les Brahmanes qui sont principalement des enseignants, intellectuels et prêtres. Issus de la tête de Brahma, et dans certaines versions de sa bouche, ils sont les plus « purs ». Puis viennent les Kshatriyas, des guerriers et des dirigeants, censés venir de ses bras et détenir donc la force guerrière. La troisième place de cette hiérarchie socioreligieuse correspond aux Vaishyas, ou les commerçants et agriculteurs, qui seraient nés de ses cuisses. Tout en bas se trouvent les Shudras, qui proviendraient des pieds de Brahma et seraient donc destinés à effectuer tous les travaux subalternes. Enfin, les hors-castes qui n’entrent dans aucune de ces catégories seraient nés de la terre : ce sont les intouchables ou Dalits. Ces castes sont étroitement liées à des concepts religieux tels que la transmutation des âmes ou le karma, cad l’idée que les actions d’un indu dans ses vies antérieures conditionnent la caste dans laquelle il naît. Par exemple, les brahmanes sont ceux dont les actions lors de leur ancienne vie ont été les plus pures. Il y a aussi la notion de dharma, complémentaire du karma : si un individu accomplit au mieux les devoirs liés à sa varna, il peut espérer atteindre une caste supérieure dans sa prochaine vie. L’appartenance à une caste est donc intangible pour la durée de vie. Pour l’hindouisme, cette division de la société est naturelle et correspond aux tempéraments et dispositions de l’être humain ; Le Système des jâti Au fil des siècles, cette organisation s’est complexifiée. A la notion de varna s’est superposée celle de jati, terme signifiant « naissance » et désignant un groupement socio-professionnel auquel chaque Hindou appartient, du fait de la profession de ses parents. En effet, dans les sociétés traditionnelles, le fils reprenait souvent le métier du père. Mais chaque jati a voulu se différencier des autres par un ensemble de règles comportementales et sociales particulières, plus ou moins contraignantes : pureté rituelle des habitudes quotidiennes, notamment alimentaires, mais aussi mariage endogamique. Les jati pourraient donc être considérés comme des castes plus petites, liées à la profession, au sein du groupe plus large des Varna. Néanmoins, elles n’ont de sens qu’à l’échelle locale : très nombreuses (plus de 4300), leur place dans la hiérarchie sociale varie sensiblement d’une province à l’autres. Par ailleurs, avant l’indépendance, les pauvres pouvaient seulement évoluer en dépassant leur jäti mais jamais s‘émanciper de leur Varna. Les colons européens ont tiré parti du système de castes Bien que le système de castes ait été défini en grande partie par les Ecritures hindoues, il est devenu ce que nous connaissons aujourd'hui sous la période coloniale. Ainsi, le régime portugais, puis le régime colonial britannique, ont tiré parti de cette organisation qu’il percevait comme un reflet des classes sociales européennes. Par conséquent, ils ont classifié tous les Indiens selon leur fonction, et ont confié les postes administratifs de haut niveau aux castes supérieures. Ils se sont donc appuyés sur les Brahmanes pour les aider à gouverner, et ont reproduit les mécanismes de domination sur les castes inférieures. Celles-ci se voyaient refuser l'accès aux soins de santé et à l'éducation de base et étaient souvent totalement exclues de la société, contraintes de faire des travaux considérés \"impurs\", comme l'élimination des déchets, le nettoyage des toilettes et la crémation. Les Dalits ont particulièrement souffert de ce système. II- La transformation du rôle des castes dans l’Inde moderne En outre, la caste est ainsi une institution qui a beaucoup évolué dans le temps. A l’origine, le support d’une hiérarchie de fonctions à la fois rituelles et corporatives A l’origine, le système de castes n'est pas spécifique à l'Inde mais on pouvait trouver des organisations similaires partout dans le monde. En effet, lorsque les sociétés humaines étaient encore primitives et le nb de professions donc limité, il n’existait pas de concept de recrutement ni de support d'apprentissage autre qu'oral. Donc chaque individu reprenait le métier de ses parents, et, en Inde, cela s'est traduit par la création de \"castes\" correspondant à des professions basées sur l'aptitude. Cela a permis d'instaurer une division du travail qui est naturelle dans les sociétés humaines. Cependant, malgré l’évolution de la société indienne et la multiplication des services, le système de castes s’est maintenu car il est légitimé par des concepts religieux très anciens. Le système de castes tel qu’on le déduit des écrits anciens repose sur une idéologie du pur et de l’impur. La hiérarchisation des castes va de pair avec la conception du travail, du comportement de l’homme qui se mesurent du plus ou moins pur au plus ou moins impur. Ainsi, les valeurs du brahmane, la caste la plus élevée, sont perçues comme des références par toutes les autres classes, y compris les plus basses, ce qui a donné le concept de sanskritisation = cad l’idée d’imiter le brahmane. La ségrégation des gens en fonction de leur Varna permettait d’alléger les responsabilités incombant à chaque individu en les répartissant selon les castes et en préservant la pureté de celles-ci. Chaque individu doit rester fidèle au devoir de sa varna, tout en imitant les plus purs afin d’atteindre la moksha, ou libération permettant d’accéder à la classe supérieure. S’il échoue, il est mis au ban de la société.
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sa bouche, ils sont les plus « purs ».
Puis viennent les Kshatriyas, des guerriers et des
dirigeants, censés venir de ses bras et détenir donc la force guerrière.
La troisième place de
cette hiérarchie socioreligieuse correspond aux Vaishyas, ou les commerçants et agriculteurs,
qui seraient nés de ses cuisses.
Tout en bas se trouvent les Shudras, qui proviendraient des
pieds de Brahma et seraient donc destinés à effectuer tous les travaux subalternes.
Enfin, les hors-castes qui n’entrent dans aucune de ces catégories seraient nés de la terre : ce
sont les intouchables ou Dalits.
Ces castes sont étroitement liées à des concepts religieux tels que la transmutation des âmes
ou le karma, cad l’idée que les actions d’un indu dans ses vies antérieures conditionnent la
caste dans laquelle il naît.
Par exemple, les brahmanes sont ceux dont les actions lors de leur
ancienne vie ont été les plus pures.
Il y a aussi la notion de dharma, complémentaire du karma : si un individu accomplit au
mieux les devoirs liés à sa varna , il peut espérer atteindre une caste supérieure dans sa
prochaine vie.
L’appartenance à une caste est donc intangible pour la durée de vie.
Pour l’hindouisme, cette
division de la société est naturelle et correspond aux tempéraments et dispositions de l’être
humain ;
Le Système des jâti
Au fil des siècles, cette organisation s’est complexifiée.
A la notion de varna s’est superposée
celle de jati, terme signifiant « naissance » et désignant un groupement socio-professionnel
auquel chaque Hindou appartient, du fait de la profession de ses parents.
En effet, dans les
sociétés traditionnelles, le fils reprenait souvent le métier du père.
Mais chaque jati a voulu
se différencier des autres par un ensemble de règles comportementales et sociales
particulières, plus ou moins contraignantes : pureté rituelle des habitudes quotidiennes,
notamment alimentaires, mais aussi mariage endogamique.
Les jati pourraient donc être considérés comme des castes plus petites, liées à la profession,
au sein du groupe plus large des Varna.
Néanmoins, elles n’ont de sens qu’à l’échelle locale :
très nombreuses (plus de 4300), leur place dans la hiérarchie sociale varie sensiblement
d’une province à l’autres.
Par ailleurs, avant l’indépendance, les pauvres pouvaient
seulement évoluer en dépassant leur jäti mais jamais s‘émanciper de leur Varna.
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Bien que le système de castes ait été défini en grande partie par les Ecritures hindoues, il est
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