Le dauphin se meurt pendant que la monarchie vacille
Publié le 30/08/2013
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Après la naissance en dé-cembre 1778 d'un premier enfant, Marie-Thérèse, future duchesse d'Angoulême, Marie-Antoinette a mis au monde le 22 octobre 1781 un fils, héritier ardemment attendu. Ce jour-là, le roi, manifestant les plus grands transports de bonheur, s'est exclamé : « Madame, vous avez comblé mes voeux et ceux de la France : vous êtes mère d'un dauphin «. La nou¬velle a été saluée par une explosion d'allégresse, de joyeuses embrassades dans les rues et de nombreuses réjouissances.

«
Sophie âgée de onze mois.
Du
cadet de ses fils Marie-Antoi
nette, qui s'occupe elle-même
de ses enfants, note avec ten
dresse : « C'est un vrai enfant
de paysan, grand, frais et gros.
»
On
ne peut malheureusement
en dire autant de l'aîné, qui
s'étiole
peu à peu.
L'état
de faiblesse de Louis
Joseph suscite
de vives contro
verses parmi les médecins :
les uns prônent
« la salubrité
de l'air» de La Muette, les
autres
« le terrain fécond » de
Versailles.
On opte en défini
tive pour Meudon, ce lieu de
résidence ayant été profitable
à Louis
XVI, qui a lui aussi été
un enfant maladif.
Mais en
1789, le corps médical a perdu
l'espoir de sauver le dauphin.
A la veille
de la réunion des
états généraux, les préoccupa
tions du couple royal ne sont
pas seulement politiques : leur
cœur est déchiré par l'agonie
du
petit prince, qui n'est plus
qu'une ombre souffrante, aux
articulations
et au visage en
flés, au corps tordu comme
celui d'un vieillard.
Conscient
de · sa fin prochaine, Louis Jo
seph fait preuve d'un courage
et d'une patience exemplaires
qui arrachent à
ses parents
bien
des larmes.
Un cœur patient
et affectueux
A Meudon, le malade reçoit
ses dernières visites, comme
celle
de la princesse de Lam
balle et de la comtesse de
Laage.
« Il est déchirant.
D'une
souffrance,
d'une raison, d'une
patience qui va au cœur !
Quand nous sommes arrivées,
on lui faisait la lecture.
Il avait
eu la fantaisie
de se faire cou
cher sur un billard ; on y avait
étendu des matelas.
Nous nous
regardâmes, la princesse
et
moi, avec la même idée que
cela ressemblait au triste lit de
parade après la mort.
Madame
LE CÉRÉMONIAL FUNÈBRE
EST RESPECTÉ
En 1789, les temps ne sont plus ce qu'ils étaient.
Louis XVI et Marie Antoinette demandent que mille messes soient dites à l'intention du
prince défunt.
Mais les caisses de l'État sont vides, et l'archevêque
de Paris se demande qui s'acquittera des frais : il faut que le roi
ordonne
de prélever la somme « sur les dépenses de l'argenterie ».
Le cérémonial est cependant respecté.
Le 7 juin, toutes les
personnes
présentes à la Cour viennent faire leur révérence de deuil
à la reine
et défilent en silence devant cette mère accablée,
adossée chancelante à la balustrade de sa chambre.
Conformément
à l'étiquette, le couple royal
est écarté des cérémonies du deuil.
Le
12 juin, c'est un des fils du duc d'Orléans qui va déposer le cœur de
Louis Joseph au Val-de-Grâce, assisté d'Osmond,
l'aumônier du roi.
Le lendemain, à huit heures
du soir, le corps du dauphin, enveloppé d'un
drap d'argent et placé dans un cercueil de
velours blanc, est escorté jusqu'à Saint-
Denis par le prince de Condé.
A la
basilique,
il est reçu par les moines
et,
après l'absoute, conduit à la
crypte, où
il reposera désormais.
de Lamballe lui demanda ce
qu'il lisait :
"Un moment fort
intéressant
de notre histoire,
Madame, le
règne de Charles
VII ; il y a là bien des héros." Je
me permis de demander si
Monseigneur lisait
de suite ou
les morceaux les plus frap
pants : "De suite, Madame, je
n'en sais
pas assez long pour
choisir
ce qui m'intéresse."
Ses
beaux yeux mourants se
tournèrent vers moi en disant
cela
», relate la comtesse.
Plusieurs visiteurs émus té
moignent du courage du petit
prince et de son affection
attentive pour
sa mère boule
versée.
Un soir, il l'invite à par
tager son dîner dans sa cham
bre et lui fait servir ses mets
préférés.
« Elle avala plus de
larmes que de pain.
Tout ce
que dit ce pauvre petit est
incroyable ; il fend le cœur de
la reine ; il est d'une tendresse
extrême pour elle », rapporte
madame
de Laage.
Marie-Antoinette
ne quitte
guère Louis Joseph, et le roi se
rend presque chaque jour à
Meudon.
Le 3 juin, il en repart
à dix heures
du soir.
Il ne re
verra plus son fils, qui expire à
une heure du matin.
Tandis
que la reine pleure au pied du
lit, douze cierges sont allumés
autour
du corps du défunt.
Mais
déjà d'autres devoirs
appellent les souverains, qui
n'ont
pas le temps de s'aban
donner à leur douleur.
Les
états généraux
ont commencé,
il faut se rendre à Versailles.
Le royaume est en proie à une
vive agitation.
Le dauphin, né
dans la liesse, s'éteint dans
une quasi-indifférence.
Et sa
disparition survient comme un
symbole à l'heure où sonne le
glas
de la monarchie absolue..
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