L'année 1968 dans le monde
Publié le 17/01/2022
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Des images apparaissent immédiatement si l'on évoque l'année 1968 dans le monde, images violentes, qu'il s'agisse des rues de Paris aux voitures en flammes et aux arbres abattus, d'une petite fille qui fuit, nue, tout l'horreur du monde sur le visage, après un bombardement au Viêt-nam ou des gardes rouges de Pékin obligeant des vieillards à s'humilier lors de séances d'autocritique. Mais entre ces trois images il semble difficile, a priori, de trouver des points communs, tant les problèmes, les conflits qu'elles évoquent paraissent éloignés les uns des autres. Pourtant on peut tenter de chercher, non pas une explication unique, mais des points de convergence, et surtout essayer de replacer ces événements dans un contexte qui permette de leur donner une logique. Nous sommes alors amenés à replacer toute cette année dans le cadre des rapports Est-Ouest, ceux-ci ont alors tendance à s'apaiser, ce qui permet aux forces de contestation présentes dans chaque bloc de s'exprimer mais qui n'a pourtant pas pour effet d'éviter les conflits périphériques comme la guerre du Viêt-nam, s'ils restent strictement localisés. Dans chaque bloc aussi, la jeunesse, nombreuse, exprime ses aspirations à de profonds changements, ce faisant elle révèle parfaitement les défauts de chacune des sociétés qu'elle conteste : capitalisme sans âme à l'Ouest, manque de liberté et dictature sur l'esprit à l'Est.
PLAN
Introduction : Une année agitée dans le monde entier, peut-on lui trouver un sens, des logiques ?
I. Maintien des conflits périphériques dans un contexte de détente.
A. La marche vers la détente...
B ...favorise les dissensions à l'intérieur des blocs...
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Le conflit sino-soviétique.
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Le printemps de Prague.
C ...et la persistance des conflits périphériques. II. L'apogée des mouvements contestataires.
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Un mouvement né aux États-Unis...
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...et qui s'étend au monde entier, mais surtout à la France.
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La jeunesse écrasée et utilisée à l'Est.
Conclusion : À regarder le bilan immédiat, cette année semble être celle des retours à l'ordre dans le monde entier, la perspective change si l'on a une vision sur un temps plus long.
«
I.
Maintien des conflits périphériques dans un contexte de détente
La marche vers la détente...
La crise de Cuba a marqué le paroxysme de la guerre froide.
Le risque d'une guerre atomique est apparu alors sigrand qu'il a favorisé la recherche d'une certaine entente entre les deux grands : celle-ci s'est d'abordmarquée par la création du « téléphone rouge » entre Moscou et Washington, puis par l'interdiction, en 1963,des essais nucléaires-atmosphériques, enfin en juillet 1968, c'est la signature (hi traité de non-prolifération desarmes nucléaires : trois ry.1 1;ssances nucléaires, les États-Unis, le Royaume-Uni et l'URSS, s'engagent à ne livrer à aucun État le secret de l'arme nucléaire, les autres États signataires s'engagent, eux, à ne paschercher à se doter de cette arme.
Deux puissances nucléaires refusent de s'associer à ces accords : laFrance et la Chine populaire (puissances qui toutes deux, justement, contestent la domination des deuxGrands).
Ce choix de la détente apparaît aussi dans le fait que l'URSS, si elle condamne la politique américaineau Viêt-nam et si elle aide les forces nord-vietnamiennes, assume parfaitement son rôle de deuxième puissancemondiale et mène une politique d'ouverture économique au monde qui favorise un certain apaisement dans lesrelations internationales, par ailleurs lors de la guerre des Six Jours en 1967, elle n'est pas intervenue.
A.
...favorise les dissensions à l'intérieur des blocs... B.
Dans la mesure où les tensions entre les deux Grands sont moindres, la solidarité à l'intérieur de chaque bloc seréduit et chacune des deux grandes puissances se voit plus ou moins contestée dans son propre camp; on passeainsi lentement d'un monde bipolaire à un mode multipolaire.
Dans le bloc de l'Ouest pourtant, la dominationaméricaine se maintient, seule la France depuis quelques années récuse le « leadership » des États-Unis, quittantl'OTAN, réclamant le remboursement en or des dollars de la Banque de France, critiquant la guerre du Viêt-nam ; parailleurs les États-Unis apparaissent toujours comme les « gendarmes du monde libre » surtout en Amérique latine oùdes conseillers militaires américains n'hésitent pas à intervenir contre les foyers de guérilla castristes.
En 1968 c'estsurtout le monde communiste qui semble connaître des tensions importantes :
Le conflit sino-soviétique : public depuis 1962 il atteint son apogée en 1967 quand les deux États rompentleurs relations diplomatiques, 1968 est une année de très forte tension entre les deux rivaux, desaffrontements armés ont lieu en 1969.
Les rivalités sont apparemment idéologiques : la Chine accuse l'URSS de« révisionnisme », de tiédeur, l'URSS critique violemment la Révolution Culturelle en cours à Pékin, en réalité lesdeux rivaux s 'affrontent pour la domination du camp communiste.
1.
Le printemps de Prague : après la période de libéralisation imposée par Khrouchtchev, les pays de l'Est etl'URSS connaissent, sous la direction de Brejnev, son successeur, un net retour en arrière : toute tentativedes intellectuels pour réclamer un peu de liberté se solde par des années de camp ou de relégation.
C'estl'apogée du règne de la « nomenklatura » communiste.
Pourtant les désirs de liberté persistent et ils se font jour en 1968 en Tchécoslovaquie.
Nommé secrétaire du parti communiste tchèque en janvier 1968, Dubcek vaprendre en compte l'aspiration à plus de liberté de l'ensemble de la population tchèque, lentement se fait jour àPrague une expérience originale de « socialisme à visage humain », où les acquis sociaux du communismecoexisteraient avec l'abolition de la censure, et les libertés individuelles.
Dans un immense espoir, Dubcekautorise donc une nette libéralisation du régime, celle-ci est insupportable pour Brejnev car elle risque depasser pour un modèle dans les autres pays de l'Est.
Aussi, après des avertissements répétés, les troupes dupacte de Varsovie envahissent la Tchécoslovaquie le 21 août et mettent fin à cet immense espoir du printempsde Prague.
Peu à peu, malgré le désespoir des Tchèques, la réprobation des pays occidentaux, et les critiquesde certains partis communistes occidentaux, la « normalisation » se met en place.
La logique des blocs sevérifie donc, il suffit d'ailleurs de constater la passivité des États-Unis pour en avoir la preuve.
Cette logique onla voit aussi à l'oeuvre quand on constate que la détente n'empêche pas le maintien de conflits périphériquespourvu qu'ils soient contrôlés et n'impliquent pas un face à face des deux Grands.
C.
...et la persistance des conflits périphériques
Si 1967 a vu s'enflammer à nouveau le Moyen-Orient, en 1968 c'est surtout l'Asie et notamment le Viêt-nam quiattirent l'intérêt.
Les Américains y ont pris le relais de la France dès 1955, soutenant des factions corrompues au Sudpour lutter conte l'influence communiste du Nord.
Celle-ci se renforce pourtant et il se crée au Sud un FNL (ouVietcong) décidé à installer le communisme.
En 1963 Kennedy décide l'envoi de « conseillers militaires » au Sud, c'est le début d'un dramatique conflit qui s'étendrapidement à la totalité du pays.
Dès 1965 en effet, le successeur de Kennedy, Johnson, autorise les raids aériens surle Nord, accusé de prêter main-forte au Vietcong; entre 1965 et 1968, on passe de 180 000 soldats américainsengagés au Viêt-nam à 550 000.
Le moyens mis en oeuvre par les États-Unis sont colossaux et visent à anéantir la capacité de résistance du Nord et du Vietcong : bombardements intensifs de digues par les B52, utilisation debombes au napalm, de défoliants.
Au début de 1968 Johnson croit pouvoir annoncer une prochaine victoire
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