La Saint Barthélémy
Publié le 03/02/2013
Extrait du document
«
devant une réaction qu’il n’avait ni prévue ni souhaitée, interprètent les ordres volontairement mal (ils veulent
protéger leur communauté et leur territoire), et se joignent à la foule, se livrant à un massacre des huguenots.
Hommes, femmes, enfants, tous sont tués des manières les plus déshumanisantes possibles : on défigure les
visages, on met à nu systématiquement, on mutile les organes sexuels pour empêcher la reproduction des
protestants.
L’évènement prend presque l’ampleur d’une guerre de religion, c’est l’exorcisme du « démon » que les
catholiques chassent de leur ville dans un bain de sang, le refus d’une paix entre les deux communautés
chrétiennes, la négation d’un doute possible, d’une conception différente de la sienne de la voie d’accès au Salut.
Si le massacre prend fin le 30 Aout, un mois d’insurrection s’en suit : les milices mènent une véritable politique de
la terreur, bloquent les portes de la ville, pillent les maisons…
Loin d’être un évènement horrible isolé au sein d’une succession de guerres de religion, le massacre de la Saint
Barthélémy a d’importantes conséquences.
Au niveau religieux, d’abord, il renforce l’union des protestants qui
voient dans la nuit du 24 une sorte de juste punition divine pour avoir cru possible une paix avec les catholiques :
ils se détachent, s’organisent et structurent l’Eglise Réformée.
Finalement, ils sont en quelque sorte, « libérés ».
Du côté de la confession du royaume, le fait que tous les huguenots n’aient pas été tués va pousser certains vers
l’extrémisme et participer à l’élaboration des premières ligues.
D’un point de vue politique, le Roi va se trouver
tout d’un coup face aux monarchomaques - qui proposent un pacte entre le Roi et ses sujets, basé sur l’obéissance
de ces derniers et l’engagement du Roi (dont ils attendent qu’il fasse son devoir en maintenant paix, sécurité et
bonheur pour le peuple) – et aux malcontents qui voient d’un mauvais œil l’implication des étrangers dans la
monarchie française, et surtout proposent de revenir à l’équilibre Roi/ 2 nd
ordre (la noblesse), réunissant nobles
protestants et catholiques.
Ces visions de la monarchie, celle du contrat, et celle de l’alliance, vont participer à la
construction d’une nouvelle version de la monarchie en France qui prend effet après la mort de Charles IX en 1574
et le règne d’Henri III : la monarchie absolue.
Si les sujets sont divisés au point de devenir incontrôlables, si les
Etats Généraux et le Parlement sont si faibles face à une volonté royale qui l’est tout autant, il faut à la France un
roi « sur-sacralisé », tout puissant, dont on respectera et appliquera les décisions.
Le massacre de la Saint-Barthélemy a donc « contribué » à marquer un tournant pour la monarchie française : si
l’on veut garder ce type de régime, si le Roi veut pouvoir préserver sa fonction et sa personne, il se doit d’acquérir
une dimension « supra-humaine ».
Louis XIV en sera l’exacte représentation.
Pour s’imposer à tous ses sujets,
l’Etat doit donc séparer les sphères religieuse et publique, distinguer la qualité de « croyant » de celle de « sujet »,
séculariser son mode de fonctionnement.
En quelques sortes, ce sont les premières bases de notre société moderne.
Sources :
Denis Crouzet, La nuit de la Saint-Barthélemy.
Un rêve perdu de la Renaissance, Fayard, coll.
« Chroniques »,
1994
Arlette Jouanna, La Saint Barthélemy, les mystères d’un crime d’état, Paris, édition Flammarion, 2007.
MIchel Péronnet, Le XVIe siècle, Hachette U, 1981, réédité en 2005.
Vidéo youtube « Le massacre de la Saint Barthélémy » postée par « Lostcathare » (qui a tiré ses informations de
Wikipédias) : http://www.youtube.com/watch?v=QpcQ_2Qcguo.
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