La Palatine n'épargne personne Même si son avenir est en jeu...
Publié le 30/08/2013
Extrait du document
La position de Madame à la Cour est d'autant plus précaire que le roi est au courant des commentaires acerbes dont elle a truffé sa correspondan¬ce avec sa parentèle alleman¬de. En 1694, déjà, le lieute¬nant de police La Reynie a montré à Sa Majesté certains morceaux choisis de ses let¬tres, dans lesquelles madame de Maintenon, l'épouse se¬crète de Louis XIV, est appe¬lée « la vieille «, « l'ordure «, « la chiffon «. Si le Roi-Soleil est furieux, il n'en reste pas moins amusé par les frasques littéraires et oratoires de sa belle-soeur, l'une des rares personnes de la Cour à ne pas user d'hypocrisie. Aussi a-t-il décidé de ne pas sévir. La Palatine, qui n'en sait encore rien, s'inquiète...
«
LA MAUVAISE
INFLUENCE DE LA MAINTENON En 1716, quelques mois
après la mort de Louis XIV ,
la princesse Palatine dresse
le bilan de l'influence
dévastatrice qu'a
eue , selon
elle ,
madame de Maintenon
sur le roi.
« Elle a occasionné
la persécution
des réformés ;
elle a fait enchérir les grains
et causé la famine ; elle a aidé les ministres à voler le roi ;
elle
est coupable de la mort
du roi, à
cause de tous les tracas qu'elle lui a donnés
avec la Constitution [relative à
l'opposition
des jansénistes
alliés
au Parlement contre la
papauté en 17131.
elle a fait le
mariage
de mon fils et voulu
mettre les bâtards sur le trône ,
en somme elle a tout ruiné et
mis en confusion .
» Si les
historiens trouvent souvent les
jugements
de la Palatine trop
partisans
et subjectifs, ce bilan est cependant confirmé , bien
que pour partie et en termes
plus modérés , par le duc de
Saint -Simon, le très sérieux
mémorialiste du
Roi-Soleil.
La bienveillance
de Sa Majesté
Pendant les trois rrtois suivant la
mort de Monsieur , Madame vit
dans l'angoisse de la disgrâce,
n 'ignorant rien
de s manigances
de la Maintenon , qui cherche à
l 'exiler
de la Cour .
Chacun sait
que l'épouse secrète du roi pos
sède de vieilles lettres, inter
ceptées par la censure royale,
dans lesquelles la
Palatine fait
ses chou x gras
de son mariage
avec Louis XIV, un secret
de
Polichinelle ...
Après une atten
te qui lui semble interminable,
Madame
peut enfin respire r.
Sa
Majesté a pardonné ! Et a décla
ré, en privé : «Je ne sais rien de
vos lettres .
Je n'en ai lu aucune ,
et tout cela n'a été qu ' une ima
gination .
» Louis XIV, dans sa
royale bienveillance , a absous
la péchere s
se à la langue trop
bien pendue .
Cependant, il a
posé une condition : si Madame
veut rester à la Cour , elle devra
faire amende honorable en
pu
blic ! On voit ainsi l 'implacable
épistolière sollicite
r, rageuse et,
pour une fois, perfide , « l'amitié
de la vieille » de v ant les courti
sans auss i sidérés qu'amusé s.
Après ce bref acte de contrition,
la
Palatine n 'en continue pas
moins à écrire
et à critiquer,
selon ses bonnes vieilles
habi
tudes .
Elle qui se soigne par les
plantes voue les médecins
fran
çais aux gémonies, les accuse,
par leurs continuelle s saignées,
de tuer les malades ...
Elle fus
tige les ministres , ces « courti
sans de profession », affuble la
Maintenon
du nouveau sobri
quet de « pantocrate » !
La mère du Régent
A la mort de Loui s XIV , en 1715,
le fils de la Palatine , le duc Phi
lippe d'Orléans , devient régent
du royaume.
Madame n'a ja
mai s ménagé sa propre famille ;
chaque fois
qu 'elle l'a estimé
nécessaire , ses
critiques ont
fusé .
Vis-à-vis de Monsieur , son
époux
défunt et débauché, elle
n'a fait preuve d'aucune
indul
gence .
Et chacun se souvient
au ssi de la gifle magistrale
qu 'elle a administrée à son fils
lors
de ses noces, en 1 692 ! Car
la prince s
se était fort mécon -
tente de voir le jeune Philippe
épou ser mademoi selle de
Bloi s, fille naturelle du roi et de
madame de Montespan, et-cir
constance aggravante ! - élevée
par madame de Maintenon .
Ce
n'est que contrainte et forcée
qu 'elle a accepté cette union
honteuse av ec une bâtarde .
Au fil de s ans , la Palatine prend
ses distances avec Versailles, la
Cour
et ses intrigues .
De plus en
plu s souven t, elle vit retirée,
jou issant du calme
de son do
maine de Saint -Cloud .
Là, elle
continue à rédiger une
corres
pondance-fleuve avec ceux de
«chez nous », ainsi qu'elle
appelle toujours son Allemagne
natale , où elle n'est pas
retour
née depu is son mariage, mais
où elle a laissé son cœur .
Au
terme d'un exil doré à la Cour du
Ro i-Soleil , qui lui a inspiré de s
m illie
rs de lettres devenues un
précieux témoignage historique ,
la Palatine s'éteint le 8 dé
cembre 1722, à l' âge de soixan
te-d ix
ans.
Elle laisse un aimable
souvenir à ses contemporains .
Aprè s
les obsèques de Madame
à la basilique
de $aint-Denis , un
avocat parisien note dans son
journal :
« On perd une bonne
princesse ,
et c'est chose rare.
».
»
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