Histoire de La Mauritanie Du royaume des Ghana à l'indépendance
Publié le 19/11/2018
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UNE CRÉATION ARTIFICIELLE
Née de la stratégie coloniale française qui consiste à réunir en un seul ensemble son empire d'Afrique du Nord et d'Afrique noire, la Mauritanie est une création totalement artificielle. Le contrôle militaire de cet immense territoire n'est acquis qu'à la veille de la Seconde Guerre mondiale, après des décennies de luttes contre les grandes tribus nomades du nord. La Mauritanie n'est guère alors qu'un satellite de seconde zone du Sénégal : c’est seulement en 1957 que ce territoire d'outre-mer est doté d'une capitale, Nouakchott, de création récente. L'édification de la Mauritanie indépendante doit beaucoup à son premier président Moktar Ould Daddah, lequel ne résiste pas à la crise avec le Maroc à propos du Sahara occidental. Quanta la longue présidence d'Ahmed Ould Taya, elle aura mis en évidence les rivalités entre les Maures arabo-berbères et les Négro-Africains.
DES ORIGINES AUX ÉMIRATS
• C'est au paléolithique, dans le cadre de conditions climatiques favorables, que s'épanouit une civilisation agropastorale Mais, à partir du néolithique, une sécheresse croissante s'installe durablement entraînant le déplacement des populations d'origines négroïde et berbère en direction du sud. Toutefois, quelques Berbères choisissent de se fixer dans les zones d'oasis. Pendant environ treize siècles, des Berbères Sanhadja occupent l'Ouest saharien.
• Vers le IIIe siècle de notre ère, l'introduction du dromadaire, venu de Tripolitaine par le Maghreb, leur permet de s'adapter par
le nomadisme à des conditions rendues difficiles par un milieu particulièrement hostile, marqué par une sécheresse endémique.
Le royaume du Ghana
• Vers le milieu du Ier millénaire
se constitue le royaume du Ghana, d'abord gouverné par une dynastie blanche, puis, à partir du vin' siècle, par des Noirs Soninké, ancêtres des Sarakolé actuels. La position géographique du royaume du Ghana lui assure une véritable prospérité. En effet, en contrôlant les routes du commerce transsaharien, c'est-à-dire celles qui relient le Maghreb aux régions de la boucle du Niger, les Soninké parviennent à prendre une part significative du trafic de l'or, des esclaves, du sel et des chevaux.
• L'apogée du Ghana se situe vers le xi' siècle : c'est à cette époque que le voyageur arabe El-Bakri visite le pays. Il laisse une description émerveillée de la richesse et des fastes des souverains ghanéens qui, raconte-t-il, «trônent sur des estrades d'or et attachent leurs chevaux à des blocs d'or massif».
• L'État, qui constitue d’abord une fédération de royaumes, se centralise progressivement ; le roi concentre tous les pouvoirs religieux, militaires et judiciaires.
On lui prête la possibilité de mobiliser une armée de 200 000 hommes. Sa capitale, Koumbi, est partagée en deux cités, l'une réservée aux musulmans, l'autre habitée par les Soninké et leur souverain. Malgré son animisme, le royaume du Ghana fait montre d'une évidente tolérance à l'endroit de l'islam. Toutefois, la situation va changer sous la pression des nomades ouest-africains.
Établissement du royaume du Ghana Pénétration des Almoravides Établissement des Émirats Protectorat français Colonie intégrée dans l'A.-O.F. Territoire d'outre-mer Proclamation de l'indépendance Élection du président Ould Daddah Putsch du colonel Ould Taya Renversement du président Ould Taya

«
•
!:administrateur français entreprend
de pacifier le pays pour mettre fin
aux rauias que les Maures lancent
régulièrement sur le nord du Sénégal.
Pour parvenir à ses fins, Coppolani
utilise des moyens plutôt pacifiques
en mettant en œuvre une politique
destinée à intégrer l'ensemble
des tribus maures dans la mouvance
française.
Cette politique prend
la forme d'un projet de constitution
d'une "Mauritanie occidentale».
En 1902, Coppolani reçoit l'allégeance
des émirs du Trarza, puis du Brakna.
En 1903, la Mauritanie est dite
"protectorat des pays maures».
Avec le soutien des tribus
maraboutiques, Coppolani soumet
l'émir du Tagant en avril 1905.
Mais il se heurte à la résistance
du Cheikh Mâ ei-Aïnîn, lequel
proclame la guerre sainte.
Coppolani
est assassiné le 12 mai suivant.
lES COLONNES GOURAUD
• La proclamation de la guerre sainte
a pour effet d'entraîner la conquête
militaire du pays.
Celle-ci est confiée
aux généraux Henri Gouraud et
Charles Mangin.
En décembre 1908,
les "colonnes Gouraud» partent
du Tagant pour rejoindre l'Adrar
et entrent dans Atar le 9 janvier 1909.
Battu, Cheikh Mâ ei-Aïnîn entreprend
de marcher sur Fès où il espère trouver
refuge.
Mais il est de nouveau vaincu
le 23 juin 1910 (bataille de Tadla)
et meurt le 28 octobre.
Son fils
reprend la lutte contre les Français,
mais échoue également.
En 1920,
la Mauritanie devient une colonie
intégrée dans le cadre de l'Afrique
Occidentale française.
L'ORGANISATION ADMINISTRATIVE
DE LA COLONIE
• Il appartient au commissaire général
du gouvernement, le colonel Montané
Capdebosc, de poursuivre l'organisation
administrative amorcée par Coppolani ;
à partir de 1917, c'est le gouverneur
Caden qui prend le relais.
Au cours
des dix ans de son manda� le pays
se couvre de postes administratifs,
tandis que
les unités de
méharistes
assurent la
paix.
Celle-ci
est en effet
menacée
par des
soulèvements
sporadiques,
en général rapidement contenus.
Toutefois, la révolte de l'émir de
l'Adrar, en 1932, oblige la métropole
à engager des moyens militaires
plus importants, ce dont témoigne
la mission de réduction des poches
de dissidence confiée en 1934 au
général Georges Catroux.
Dès lors,
la France peut considérer qu'elle
occupe la totalité du territoire.
Toutefois, compte tenu de la pauvreté
du pays et du nomadisme, les autorités
coloniales ne font guère d'effort
pour mettre en valeur la colonie.
UN TERRITOIRE D'OUTRE·MER
• En 1946, dans le cadre de la Constitution
française du 27 octobre, la Mauritanie
obtient le statut de territoire d'outre-mer
avec une assemblée locale, des
représentants au Grand Conseil de
l'Afrique-Occidentale française et
dans les assemblées de la métropole.
Elle se fait octroyer l'autonomie
interne en 1956, dans le cadre de
la" loi Defferre».
A la même époque,
d'importants gisements de minerai
de fer et de cuivre sont découverts,
ce qui n'est pas sans provoquer des
revendications de la part du Maroc.
• Le 28 novembre 1958, la République
islamique de Mauritanie est proclamée,
prélude à l'indépendance, qui est
octroyée le 28 novembre 1960 en
vertu des accords franco-mauritaniens
de restitution de souveraineté.
LA MAURITANIE DE
MOKTAR OULD DADDAH
DIFFICULTÉS ÉCONOMIQUES
• Élu président par l'Assemblée,
Moktar Ould Daddah fonde en 1963
le Parti du peuple mauritanien qui
regroupe diverses formations politiques
avant de devenir parti unique en 1965.
• Très rapidement, le président
est confronté à de fortes tensions
sociales consécutives aux difficultés
économiques que connaît le pays.
A partir de 19TI, le gouvernement
engage les réformes réclamées par
l'opposition :création d'une monnaie
nationale (1972), dénonciation
des accords de coopération avec
la France (1973), nationalisation
du secteur minier (1973).
• En 1975, le pouvoir s'oriente vers
un socialisme progressif respectant
les valeurs traditionnelles de la société
mauritanienne.
Une mesure qui
trouve un écho largement favorable
puisqu'une partie de la jeunesse
et la plupart des opposants décident
de rejoindre le parti unique.
Toutefois,
la stabilité politique du pays doit
moins à la coalition au pouvoir- dont
le caractère hétéroclite est frappant -
qu'à la personnalité du président
dont le prestige s'est peu à peu usé
avec la lutte que mène la Mauritanie
contre le Front Polisario.
LA POLITIQUE EXrtRIEURE
• En 1969, le Maroc renonce
à ses revendications territoriales sur
la Mauritanie.
Mais, en 1973, alors que
la Mauritanie vient tout juste d'intégrer
la Ligue arabe, le désengagement
de l'Espagne du Sahara ravive les
tensions avec Rabat qui, tout comme
la Mauritanie, entend prendre sa part
des territoires évacués.
Finalement
une solution est trouvée en novembre
1975 : en vertu des accords de Madrid,
le Maroc obtient la souveraineté sur
la Saguia El Hamra, la Mauritanie
exerçant la sienne sur le Rio de Oro.
Mais dans cette région, le président
doit faire face à la guérilla conduite
par le Front Polisario, qui ne reconnaît
aucunement le partage opéré dans
le cadre des accords de Madrid.
Les combattants du Front Polisario
portent la guerre jusqu'à l'intérieur de
la Mauritanie : attaque de Nouakchott
(8 juin 1976), coup de main sur la
ligne ferroviaire entre Zouerate
et Nouâdhibou (octobre et décembre
1977).
Bénéficiant du soutien de
l'Algérie, les Sahraouis entendent
déstabiliser, économiquement
et politiquement, le régime.
• La guérilla intensive menée
par le Front Polisario porte ses fruits
e� en 1978, la Mauritanie n'apparaît
plus en mesure de supporter l'effort
de guerre.
Tous les indicateurs sont
au rouge, l'économie est profondément
désorganisée et le mécontentement
grandit dans tous les milieux.
L'AIMtE.
AIIITIE
DESAMBmONS
UN RÉGIME INSTABLE
• Le 10 juillet 1978, le président Ould
Daddah est renversé par un coup d'État
militaire dirigé par le colonel Ould
Salek.
Celui-ci prend la tête d'un Comité
militaire de redressement national
(CMRN), suspend la Constitution
et tente, sans succès, de sortir la
Mauritanie du conflit saharien.
Le 6 avril 1979, le colonel Salek est à
son tour écarté par un Comité militaire
de salut national (CMSN) placé sous la
direction du colonel Ahmed Ould
Bouceif, lequel meurt accidentellement
le 27 mai.
Le colonel Ould Ahmed Louly
devient chef de l'État, tandis que la
direction du gouvernement revient
au colonel Ould Haidallah.
·Le 7 août 1979, un accord est signé
à Alger avec le Front Polisario aux
termes duquel la Mauritanie renonce
à toute revendication sur le Sahara
occidental.
Le colonel Haidallah,
qui cumule sa fonction de Premier
ministre avec celle de chef de l'État,
reconnaît officiellement, au début
de l'année 1984, la République arabe
sahraouie démocratique (RASD).
• En décembre 1983, la Mauritanie adhère
au traité de fraternité et de concorde
signé en mars par l'Algérie et la Tunisie.
• Le 17 décembre 1984, le président
Ould Haidallah est renversé et remplacé
par le colonel Maaouya Ould Tay a,
chef d'état-major de l'armée.
LA CRISE AVEC LE SÉNÉGAL
• !:arrivée au pouvoir de Ould Taya
a pour effet de renforcer la domination
des Arabe-Berbères sur la communauté
négra-africaine.
La tension croissante
pousse deux officiers noirs à tenter
de s'emparer du pouvoir en septembre
1987.
C'est un échec et les principaux
meneurs sont exécutés.
•
En février 1989, la Mauritanie
adhère à l'Union du Maghreb arabe
(UMA) fondée à Marrakech.
• En avril 1989, à la suite d'un
incident frontalier, des émeutes
antimauritaniennes éclatent à Dakar,
auxquelles répondent des émeutes
antisénégalaises à Nouakchott.
Alors
que plusieurs centaines de personnes
ont trouvé la mo� des milliers de
ressortissants sénégalais et de
naturalisés sont expulsés de Mauritanie.
• De nombreux Mauritaniens noirs
choisissent eux aussi l'exil, le jugeant
préférable à l'insécurité.
En dépit
de la constitution d'une commission
de médiation de l'Organisation de l'unité
africaine (OUA), la tension est à son
comble entre Dakar et Nouakchott :
le 21 août 1989, la rupture des relations
diplomatiques entre le Sénégal
et la Mauritanie est consommée.
Dans cette affaire, le Maroc soutient
le Sénégal, tandis que le gouvernement
mauritanien accuse Rabat de manquer
à la solidarité maghrébine et de songer
à la partition du pays avec le Sénégal
en fonction des clivages ethniques.
• !:année 1990 est marquée par le
soutien apporté à Saddam Hussein
lors de la guerre du Golfe.
Ce
positionnement met en évidence
combien la Mauritanie demeure
travaillée par des forces contradictoires :
islamistes contre baassistes partisans
de la laïcité, Maures contre Noirs
du fleuve, sans oublier l'émergence
d'un mouvement contestataire
des haratines (descendants d'esclaves
noirs) et plus largement des Noirs
de langue hasaniyya.
LA PRÉSIDENCE DE 0ULD TAYA
• Le 12 juillet 1991, une nouvelle
Constitution -la précédente avait
été suspendue en 1978 -est adoptée
par référendum et, le 24 juillet 1992,
Ould Taya est élu président de la
République avec 62,6% des suffrages
exprimés, non sans que l'opposition
ne conteste vivement le résultat.
Toutefois, le multipartisme est restauré.
Quant à la formation présidentielle,
le Parti républicain démocratique
et social (ROS), elle obtient 69
des 79 sièges à l'issue du scrutin
législatif.
Le même jour, les relations
diplomatiques avec le Sénégal
sont rétablies.
• En décembre 1997, le président
Taya est réélu avec 90,25 % des voix,
à l'issue d'une élection boycottée
par l'opposition.
• En 1998, la Mauritanie renoue ses
relations diplomatiques avec la Libye,
rompues après la reconnaissance
d'Israël par Nouakchott trois ans plus
tôt.
Cette reconnaissance, qui perturbe
le climat politique local, est dénoncée
par l'ancien président Moktar Ould
Daddah, qui réclame, en vain, la mise
en place d'un exécutif de transition.
• C'est donc dans un climat de tension
politique et sociale exacerbé et une
conjoncture économique fortement déprimée
qu'intervient le 8 juin
2003 une tentative de coup d'État.
Défaits après deux nuits de combats,
qui font seize morts au cœur de
la capitale, les auteurs de la tentative
de putsch réussissent à s'enfuir après
avoir brièvement investi le palais
présidentiel.
Ils créent le mouvement
des Cavaliers du changement,
qui s'adressera, à trois reprises,
aux Mauritaniens sur l'antenne
de la chaine satellitaire AI-Jazira.
Infirmant les prétentions de
"rassembleur» du président Ould Tay a,
cet épisode marque profondément
la société.
Il va considérablement
entamer le mythe d'invincibilité qui,
au fil des ans, s'est construit autour
du chef de l'État.
Pour autan� au lieu
de répondre à des aspirations de
changement déjà étouffées, le président
Ould Taya renforce encore, après
juin 2003, son contrôle sur le pays.
• Le divorce avec la population
est définitivement consommé
lors de l'élection présidentielle
du 7 novembre 2003 : à quelques
heures d'un scrutin qui augure,
à tout le moins, un ballottage, voire
une défaite pour lui, le président
fait arrêter son principal concurrent,
l'ancien président Ould Haidallah.
• Le 3 août 2005, Ould Taya est
renversé par un coup d'État militaire.
Le Conseil militaire pour la justice
et la démocratie (CMJD), qui devient
la nouvelle instance dirigeante du pays,
est présidé par le colonel Ely Ould
Mohamed Vall.
Un gouvernement de
transition, dont la direction est confiée
à Sidi Mohamed Ould Boubacar,
est nommé avec pour objectif
de rétablir la démocratie et de fixer
les prochaines échéances électorales.
Initialement prévue pour deux ans,
la période de transition est finalement
ramenée à dix-neuf mois et doit
s'achever par une élection
présidentielle qui doit se tenir
le 25 mars 2007.
LA POPULAIIrt DE
MOKTAI OULD DADDAH
• Pour l'immense majorité des
Mauritaniens, Moktar Ould Daddah
est encore aujourd'hui l'un des
hommes politiques les plus célèbres
de son pays, à l'instar de tous
les pères des indépendances africaines.
• Lors de son décès en octobre 2003,
un deuil de trois jours a été décrété
et les drapeaux mis en berne,
la radio ella télévision ne diffusant
que des extraits du Coran.
• Renversé par un coup d'É�
le 10 juillet 1978, Moktar Ould Daddah
aura connu la prison pendant quinze
mois, avant d'être exilé en France
durant vingt trois ans.
Son retour
triomphal en Mauritanie en juillet
2001 avait suscité chez ses partisans
l'espoir de le voir de nouveau jouer
un rôle sur l'échiquier politique..
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