Grégoire VII
Publié le 22/02/2012
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est alors plus instinctive que rationnelle, partant d'évidences immédiates et non d'une documentation et d'uneréflexion élaborées.
Grégoire n'a pas de “ bureaux ” où se soit accumulée l'expérience séculaire ; la Curie est à peine en formation, lesarchives sont mal conservées : même Nicolas II, le plus vigoureux initiateur, n'a presque rien laissé de sacorrespondance.
Grégoire cite rarement ses prédécesseurs, comme si la trace de leurs exemples s'était déjà perdue.En revanche, il revient sans cesse sur les textes qui commandent sa pensée, lui communiquent leur propre force etfont de ses activités les moments d'un effort spirituel vers le salut du monde.
Mgr Arquillière en donne la liste, quenous allons rappeler.
De l'Ancien Testament, les Psaumes sont utilisés pour nourrir la prière et la méditation du pape qui en tire des vuessingulièrement pessimistes, retenant les versets sur la misère morale de l'homme ; sans doute l'imagine-t-il commefont les miniatures qui montrent en David non un penseur solitaire, mais le membre d'une société, entouré du groupedes Bons en face des Méchants, souvent appuyé sur les remparts de sa ville ; il préfigurera le Christ en face del'Antéchrist.
Les Rois sont depuis les Carolingiens le Miroir des Princes, mais Grégoire cite surtout Samuel ; il se veuten somme Juge.
Il cite aussi Isaïe et Jérémie.
De l'Évangile, outre le Tu es Petrus, Grégoire cite volontiers saint Jean sur le Bon Pasteur : cette ecclésiologiepastorale fait contrepoids au renouveau du droit et de la discipline canoniques fondés sur les recherches d'archives,aux sanctions sévères contre les membres indignes du clergé, au recours à la guerre.
Il cite également l'Épître auxÉphésiens pour nourrir sa réflexion théologique et mystique.
A cette époque on connaît peu les Pères.
Nous parlons d'augustinisme politique mais Grégoire connaît saint Augustinà travers Grégoire le Grand.
En fait, Augustin n'avait pas proposé une doctrine mais fourni des thèmes, longtempsexploités comme celui des royaumes qui ne sont que de grands brigandages.
Grégoire VII s'inspira surtout de songrand prédécesseur, le Musterpapst, dont il consultait sans doute le registre, et qui lui fournit, outre une formulejustifiant la déposition de l'empereur, le souci en politique des motifs et des moyens apostoliques.
Cette bonneintention est-elle restée stérile ?
La correspondance des premières années confirme cette absence de plan d'action : même pas de théologiecohérente ; des improvisations, des solutions de fortune ; chaque fois le pape hésite ; souvent il revient sur unedécision ; mais il s'arc-boute sur des textes irréfragables.
Relevons les sujets principaux traités dans les quatre-vingt-six lettres du Livre I du Registre : onze ont un caractèreproprement spirituel, même les deux adressées à Mathilde ; dans une autre on lit : “ Malheur à moi si je n'évangélisepas ”.
Quatre traitent de questions canoniques évoquées par la Curie.
Dix concernent des monastères ou des chapitres.
Seize touchent à la question de la simonie et du nicolaïsme, dont huit pour la Lombardie et quatre pour la France.
Quatre nous renseignent sur les projets de secours à Byzance et de réconciliation avec l'Église grecque.
Plus de vingt sont adressées aux Églises locales, sept en Espagne, six en Bohême, trois en Angleterre, deux enAfrique.
Grégoire se montre là jaloux de sa prérogative, par exemple dans la lettre à Guillaume le Conquérant ; enEspagne il songe principalement à faire triompher la liturgie romaine.
Quatre lettres seulement dans ces débuts concernent les rapports du Sacerdoce et de l'Empire, elles sontempreintes d'esprit de concorde ; Grégoire regrette que l'évêque de Magdebourg soit en révolte contre Henri IV.
Au total, cette correspondance renoue la tradition des premiers Grégoire.
Grégoire VII n'est pas moins pasteur, maisil a une conscience plus nette des moyens nécessaires a la réforme.
Quoi qu'il en soit, Grégoire a fait le métier d'homme d'État : faire des plans de guerre, recruter des armées, chercherdes alliés, financer ses entreprises, justifier ses choix, plier ou tenir tête.
De quelles qualités a-t-il fait preuve ences occasions ?
Il n'est en aucune manière un intellectuel qui forme ses plans d'après les livres ou d'après un maître ; Urbain II sedira pedisequus de Grégoire ; celui-ci n'est le pedisequus de personne.
Il engage son caractère et sa volonté plus que son intelligence ; il s'agit d'une entreprise spirituelle qui appellel'intransigeance et l'obstination.
C'est la réforme qui est d'abord en question.
On a discuté pour savoir si ce pape futavant tout un homme de gouvernement, un réformateur des institutions et des structures, ou bien un ambitieuxavide de puissance profitant de la conjoncture pour soumettre à l'Église les royaumes de la terre.
Il paraît difficile delui attribuer une volonté arrêtée d'assurer à l'Église une domination temporelle.
Sans parler de ses dénégations, il atardé à porter des peines contre Henri IV, lui laissant le bénéfice du doute.
Il est surtout préoccupé de lancer unecroisade et d'en prendre la tête : ces lettres montrent en lui un mystique, pensant à la vocation eschatologique del'Église..
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