Expulsion, fuite et exil : le destin des juifs et des opposants au national-socialisme à l'étranger
Publié le 23/03/2019
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Immigration, départ en exil, expulsion - la dictature d'Hitler ne laisse pas d'autre choix à de nombreuses personnes s'ils veulent échapper à l'humiliation, aux camps de concentration et à l'assassinat. Des opposants politiques, des intellectuels et des scientifiques, et surtout les juifs, sont forcés de quitter leur pays. L'Allemagne souffrira de cette hémorragie culturelle comme aucun autre pays jusqu'alors. Bien des émigrants ne rentreront jamais.
Au feu les écrits de Kurt Tucholsky, de Thomas Mann et de Bertolt Brecht ! A peine au pouvoir, les nazis expriment, le 10 mai 1933, la façon dont ils comptent agir avec leurs opposants et leurs élites intellectuelles. Des arrestations sont à l'ordre du jour, et les premiers camps de concentration sont mis en place. Il ne reste bientôt qu'une seule issue : le départ en exil.
C'est en tout cas la dernière chance qui reste aux juifs. D'autres groupes y voient là le salut face à la suppression de liberté ou face au mépris social ; ils considèrent encore l'exil comme la possibilité de combattre politiquement le régime d'Hitler de l'extérieur.
De nombreux juifs font partie de l'opposition politique ou culturelle. Dans leur pays d'accueil, les lignes de séparation s'estompent. Ainsi, l'écrivain Lion Feuchtwanger écrit : << Il n'y a pas que des gens de différentes opinions politiques, on trouve aussi toutes les catégories sociales et tous les caractères.
Le physicien allemand Albert Einstein - ici en conversation avec sa collègue française Irène Jolliet-Curie -émigré depuis 1932 aux États-Unis
Maintenant, qu'ils le veuillent ou non, on leur a tous collé la même étiquette, ils sont tous dans le même bain. »
L'émigration juive. Après la prise de pouvoir par Hitler en 1933, 500 000 juifs allemands sont menacés par le fanatisme racial national-socialiste. La dictature les pousse à quitter le pays en leur faisant subir des humiliations, en édictant des arrêtés administratifs et en commettant des actes de violence contre eux. Pourtant, les chiffres de l'émigration restent longtemps en dessous des espoirs des nazis : ils ne doublent qu'en 1939, après le pogrom de la nuit du 9 au 10 novembre, latristement fameuse Nuit de Cristal, pour passer à 80 000. Les raisons qui poussent d'abord les juifs à rester sont nombreuses : les obstacles administratifs, même dans les pays refuges, les problèmes financiers, dans la mesure où l'on vole aux juifs leur gagne-pain, et le désir des persécutés de ne pas renoncer à leur identité et à leur pays en dépit de toutes les attaques.
«
1 Les
autorités cubaines refusent à des juifs qui fuient l'Allemagne de descendre à terre.
Le bateau
continue donc sa route vers un but inconnu.
Dif férentes maisons d'éditions se char
gent de propager la littérature, comme
Querido à Amsterdam, Bermann-Fischer à
Sto ckholm et Opr echt à Zurich.
Hitler
redoute tant le pouvoir des mots qu'il fait
lui -même persécuter et assas siner des
écrivains dans leur refuge, comme Jakob
Hoddis et Paul Kornfeld.
Le meurtrier du
phi losophe juif Theodor Lessing est
réco mpensé par Hermann Gëring en
personne qui lui remet une grosse somme
d'ar gent.
Hém orrag ie des scientifiques.
Les
sc ientifi ques su bissent après 1933 une
sen sible hémorrag ie.
Ils représentent
plus d'un quart de s émigr ants du
domaine culturel, et l'on trouve parmi
eux quelq ues céléb rités du siècle : 24
Prix Nobel, d'Albert Ei ns tein et Max
Born jusqu'à Otto Stern, de célè bres
économ istes, des sociolog ues et des
maîtres à penser comme Wilhelm Rëpke
et Joseph Schumpeter, Theodor Adorno,
Sigmun d Freud et Herbert Marcuse, des
hi storiens, des théologiens et des
phi losophes, comme par exemple Ernst
Blo ch, Karl Popper et Paul Tillich.
Les
scientifi ques ont l'avantage de ne pas
dev oir recomm encer de zéro à
l'étr anger.
Plus d'un tiers d' entre eux
peuvent conserver leur métier en exil,
sur tout les plus jeunes.
Pourtant, la
majorité d'entre eux est dans le besoin.
C'est pourquoi le path ologis te Philip p
Schwar tz fonde la communau té
d'ur gence des scientifiques allemands à
l' étra nger, qui comprend , en 1937, environ
1 BOO savants et procurent des
nomi nations vers Ankara et Istanbul.
La
Turquie, où une centaine de professeurs
trouvent une nouvelle patrie, devient,
avec les États- Unis, un des centres de
l'exil scientifique.
L'émigration politique.
Jusqu'en 1935,
6 000 sociaux-démo crates, B 000 commu
nis tes et 5 000 opposants doivent fuir.
On trouv e au ssi d'émin ents hom mes
politique s, comme les anc iens chance
lier s du Reich Heinrich Brüning et Josef
Wirth, et des nazis repentis comme Otto
Strasser.
Le nom bre total des réfu giés poli
tique s avant la gu erre est es timé à
30 000.
Ils se concentrent d'abord en
France, avec environ 9 000 d'entre eux,
et en Tchécoslov aquie qui accueille
1 500 émigr ants.
Après 1939, la plup art
fuient vers la Grande-Br etagne (5 000),
la Suisse (3 000) et la Suède (1 500) .
Plusieur s mill iers fuient vers l'Amérique.
Pour environ 2 000 réfugiés commu
nis tes, l'Union soviéti que devient une
nouvelle patrie.
L'émig ration pol itique s'appuie
rapidemen t sur des organ isations
étra ngèr es.
Ainsi, le SPD forme dès
mai 1933 à Prague une nouvelle direction
tenue par l'ancien président Otto Wels.
Ju squ'à ce que la gu erre éclate, les
organ isations en exil tentent de maintenir
le contact avec la résistance en Allemagne
et de la diriger le plus possible.
Des
fronta liers in trod uisent en fraude du
matériel d'information vers et à partir de l'Al
lem agne.
Les réfugiés lancent ainsi
une « offe nsive de vérité » pour informer
l'étranger de ce qui se passe dans le Reich.
Plus de 400 journaux et magazines sont
impliqué s dans ce combat.
Toutefois, cette activité pose souvent
des problèmes au pays d'accueil qui ne
veut pas voir ses relations avec le Reich
se détériorer.
Les tyrans organisent une
défense massive contre les émigr ants
dans leur pays.
Elle passe par la privation
des droits civiques et peut aller jusqu'à
l'enlè vement et au meurtre.
Pendant la guerre, l'objectif de
plu sieur s gr oup es d'e xilé s change : il
s'agit dorénavant de faire de la propa
gande pour.
»
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