Etats-unis d’amérique de 1980 à 1989 : Histoire
Publié le 01/12/2018
Extrait du document
Victoire conservatrice
L’élection présidentielle du 4 novembre 1980 constitue un échec important pour Jimmy Carter. Impopulaire auprès de l'opinion, le président sortant présente un bilan contrasté: en politique étrangère, malgré quelques succès, il échoue dans l'affaire des otages de l'ambassade des États-Unis à Téhéran. De plus, il présente un bilan économique peu satisfaisant. Aussi une majorité de votants se prononce contre son maintien aux affaires. Avec 51 % des suffrages exprimés, le républicain conservateur Ronald Reagan, qui entre en fonctions le 20 janvier 1981, le jour meme de la libération des otages américains de Téhéran, devient le 40e président des États-Unis. À la Chambre, le parti démocrate conserve la majorité malgré un net progrès du parti républicain, cependant qu’au Sénat ce dernier emporte la majorité absolue, pour la première fois depuis vingt-cinq ans. L’ampleur de cette victoire doit cependant être tempérée par le taux d'abstentions très élevé (plus de 50%) — quoique le phénomène ait été observé lors de chaque élection américaine — et par le fait qu’il s’agit plus d'un refus de Carter que d'un vote en faveur de Reagan. Cependant, une explication de la victoire de l'ancien gouverneur de Californie est le renforcement du courant conservateur au sein de l'opinion et le ralliement au parti républicain d'électeurs dont les suffrages se portent d’ordinaire sur les candidats démocrates. En effet, le nouveau président propose un redressement à la fois économique et moral en ces temps de récession économique et de perte de prestige des États-Unis, à la suite de l'affaire du Watergate et de la guerre du Viêt-nam. Affichant des idéaux conservateurs (moralisme contre décadence, exaltation de la grandeur de l'Amérique, liberté d'entreprise, coup d’arrêt à la réglementation de l’État), Ronald Reagan et le parti républicain proposent une nouvelle ambition, qui séduit une majorité et principalement des classes moyennes en expansion. L'objectif premier de la nouvelle administration est économique. Afin de restaurer le libre jeu du marché, l’entourage du président rompt avec les politiques précédentes, adopte les principes de Milton Friedman et souhaite l'application de la théorie de l'offre. Conformément à celle-ci, la diminution des impôts afin de relancer l'épargne et l’investissement permet la progression de l'emploi et de la production. L’augmentation de la masse de revenus imposables équilibre le budget. Dans le même temps, les dépenses de l'État sont fortement diminuées afin de s'attaquer aux «gaspillages» et aux «abus», à l'exception des dépenses militaires qui, elles, progressent.
Les principales mesures conformes à cette théorie sont adoptées dès l’été 1981 : d'une part, le taux d'imposition des particuliers doit diminuer de 25 % en trois ans et un dispositif fiscal avantageux est mis en place pour les entreprises. En outre, la diminution de l'intervention de l’État touche principalement les programmes sociaux et provoque la réduction des emplois fédéraux. Ces coupes budgétaires permettent enfin d'engager un ambitieux programme de réarmement et de recherche militaire, condition d’une position de force en politique étrangère.
Mais l'application de ce programme n'a pas les effets escomptés. La récession qui touche les États-Unis depuis 1980 se poursuit en 1981 et en 1982. Le taux de croissance du PIB est négatif. La production stagne. Les
faillites se multiplient. Les industries traditionnelles poursuivent leur déclin. Le taux de chômage, qui avoisinait les 7 % en 1980, dépasse à la fin de 1982 les 10 % de la population active et moins de la moitié des chômeurs reçoit des allocations. Certes l’inflation baisse de 13 % en 1980 à environ 4 % en 1982, mais la politique de l’offre échoue en raison de la non-reprise des investissements productifs. La relance n’ayant pas lieu, la diminution des impôts et l'augmentation des dépenses militaires aggravent d’autant le déficit du budget qui est supérieur à 200 milliards de dollars en 1983. De plus, cette situation n’est pas sans conséquences chez les partenaires occidentaux. Les taux d’intérêt américains restent très élevés afin de financer le déficit budgétaire et attirent les capitaux étrangers. Les Européens se voient contraints de ce fait de maintenir leurs propres taux à un niveau élevé afin d'empêcher la fuite des capitaux et le désinvestissement. Aux Etats-Unis, l’opposition à cette politique économique ne tarde pas à se manifester. Les syndicats se mobilisent pour la défense des acquis sociaux menacés, de même que les minorités ethniques, les femmes, fortement touchées par la récession et le chômage. Les controverses sur le programme économique sont au centre de la campagne pour les élections intermédiaires de novembre 1982. Le parti républicain perd vingt-six sièges à
«
Yuppies
er golden boys,
symboles de la génération
mo mance.
©John Dominis -Cosmos la
Chambre mais se maintient au
Sénat.
Malgré la progression
démocrate, Reagan ne paraît pas
menacé.
L'Amérique triomphante
À partir de 1983, les signes de reprise
économique sont très nets.
La
croissance du PNB est supérieure à
3 % et se poursuit dans des proportions
plus importantes en 1984 (plus de
6 %) _ Les entreprises réalisent des
bénéfices considérables et la reprise de
l'investissement productif permet un
redressement de la productivité.
L'inflation semble maîtrisée.
Le taux
de chômage tombe à environ 8%.
Des
millions d'emplois sont créés.
Les
revenus réels progressent.
La baisse de
l'imposition relance la consommation
des ménages, le déficit budgétaire
énorme alimentant la demande, au
prix d'un endettement extérieur
important, préjudiciable pour l'avenir.
Cette croissance retrouvée ne
s'effectue pas sans déséquilibres.
L'envolée du dollar, symbole d'une
économie forte et signe de la confiance
des milieux financiers dans la reprise,
accroît le déficit de la balance
commerciale.
En mai 1984, le système
bancaire est ébranlé par les rumeurs de
la faillite de la Continental Illinois,
septième banque américaine, qui
déclenchent un mouvement de panique
sur les places financières mondiales.
Dans le domaine industriel, tous les
problèmes ne sont pas résolus.
Le
marasme des secteurs industriels
traditionnels du Nord et de l'Est
(malgré quelques résultats
spectaculaires, notamment dans
l'automobile), affectés par un
mouvement de désindustrialisation
parfois sans reconversion et sans
politique sociale, contraste avec la
forte expansion des industries de
pointe, compétitives et dynamiques
(haute technologie notamment) et des
services, surtout dans le sud du pays.
Les yuppies et les golden boys ainsi
qu'une nouvelle génération DONNÉES
DÉMOGRAPHIQUES
ET ÉCONOMIQUES 1982
1984 1986 1987
Population totale (en millions d'habitants) 231,5
237
241,6 243,8
Taux d'urbanisation (en %) 78
74 74'
74
Population en âge de travailler (15 à 64 ans)
en % de la population totale 66 66 66' -
Taux de chômage (en % de la population
active) 9,5 7,4 6,9 6,1
Produit national brut (en dollars US par hab.) 13160
15 390 17 480 18 530
Produit intérieur brut (en milliards
4 185,53 4 497,2)
de dollars US) 3
009,6 3
634,6
Part du produit intérieur brut réalisée par
(en%): 22
l' agri cult ure 3
2 -
l'industrie 33 322 31 -
les services 64 66� 67 -
Importations (en milliards de dollars US)
254,9 338,2
387 422,4
Exportations (en milliards de dollars US) 212,3
216 217,3
252,6
Consommation d'énergie par habitant
(en kg/équiv.
pétrole) -
7 302 7 193 7 265
Taux brut de natalité (%o) 16
16 16 16
Taux brut de mortalité (%o) 9 9 9 9
Espérance de vie à la naissance (en années)
75 76 75 75
Nombre
d'habitants par médecin 500'
470 -
-
Soutc.es: Banque mondiale: Rapport sur le db•e/oppemem dans Je monde.
Pour le taux de
chômage.
BIT : Annuaire des srarisriques du travail, L988.
'En 1981.
' En 1983.
� Aux prix d'acquisition.
' En 1985.
d'ingénieurs et de techniciens sont les
principaux bénéficiaires des
bouleversements économiques des
années quatre-vingt et de la relance de
1983 et fournissent un soutien
important au reaganisme.
Mais tous les
Américains ne profitent pas de cette
prospérité.
L� réduction des dépenses
sociales de l'Etat accroît la pauvreté et
les inégalités.
Les emplois créés
apparaissent souvent précaires et mal
rémunérés.
De faible qualification, ils
n'offrent qu'une protection sociale
faible et concernent les services et le
commerce plutôt que le secteur
industriel.
De plus, le taux de chômage
reste important pour certaines
catégories de la population : les jeunes,
les femmes et les Noirs.
C'est dans ce contexte de croissance
retrouvée que se déroule l'élection
présidentielle du 6 novembre 1984.
Ronald Reagan est triomphalement
réélu avec 59 % des suffrages (la
participation s'élève à 53 %) contre
Walter Mondale.
Cette victoire
représente un succès personnel pour le
président sortant: incarnant les idéaux
de l'Amérique triomphante, le jouit d'une
popularité importante en raison de
l'image d'optimisme, d'assurance et de
force qu'il présente et que les
Américains avaient perdue dans les
années soixante-dix.
Sa réélection est
aussi facilitée par les divisions et les
atermoiements du parti démocrate qui ne
permettent pas d'offrir de solution
de rechange au reaganisme
triomphant.
Vers le réalisme ?
Ce second mandat ne s'annonce
toutefois pas sans difficultés.
Trois
questions dominent les débats et les
décisions des dirigeants: les déficits
(budgétaire et commercial), le dollar et
la conduite de la politique extérieure.
Même au sein du camp républicain, les
critiques se font de plus en plus vives
au sujet d'un déficit budgétaire,
devenu structurel, qui peut entraver la
poursuite de la croissance économique
et entraîner une crise financière.
Au
Congrès, bon nombre d'élus
demandent la réduction du déficit, qui
pèse sur les taux d'intérêts et la dette
publique, par la baisse des dépenses
militaires, jugées excessives, et par
l'augmentation des impôts.
Au cours
de l'année 1985, Reagan accepte de
limiter l'augmentation des dépenses
militaires à 3% par an.
À la fin de la
décennie, la diminution de l'effort de
défense est net.
Surtout, en décembre
1985, le Congrès adopte la loi Gramm
Rudman qui prévoit le rétablissement
progressif de l'équilibre budgétaire en
1991 par des coupes budgétaires
automatiques touchant les dépenses
civiles et militaires.
D'autre part, la
réforme fiscale annoncée en mai 1985
(et votée en septembre 1986) prévoit la
réduction de quinze à deux du nombre.
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