De Staline à Brejnev, principes et pratiques du « modèle idéologique» soviétique (1945-1982).
Publié le 02/04/2015
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Il ne saurait y avoir de socialisme sans la propriété collective des moyens de production. Il ne saurait y avoir de socialisme sans la participation des masses populaires les plus vastes à la gestion de la société et de l'État. Il ne saurait y avoir de socialisme sans que le Parti communiste, fort des idées du marxisme-léninisme et de l'internationalisme prolétarien, joue le rôle dirigeant [...]. Nous autres communistes, nous édi‑
fions le socialisme et le communisme dans nos pays respectifs : c'est pour nous le devoir le plus urgent. Mais nous demeurons néanmoins des internationalistes par nos convictions, par notre éducation, par le coeur, et jamais l'avenir de l'édification socialiste dans d'autres pays, ni la cause commune du socialisme et du communisme sur terre ne nous laisseront indifférents.
Discours de Leonid Brejnev au meeting de l'amitié soviéto-hongroise à Moscou (sept.-oct. 1968), dans URSS, Faits et Document, n° 5.
Voilà donc M. Brejnev maréchal, comme feu Joseph Staline, et sa photo en grand uniforme étalée sur toute la première page des journaux soviétiques. Faut-il voir dans cette consécration, coïncidant avec l'inauguration d'un buste monumental, la confirmation d'un retour au culte de la personnalité ? [...] Ce qui n'est pas discutable, en revanche, c'est que l'Union soviétique connaît actuellement des difficultés, et que celles-ci contribuent à expliquer la transformation des rapports entre la patrie du socialisme et les partis communistes du monde extérieur. Le XXVe Congrès a été informé de retards importants dans l'exécution du plan pour plusieurs secteurs industriels. Le déficit céréalier devient chronique. Les habituelles fantaisies de l'approvisionnement des villes ont été aggravées par un hiver particulièrement rigoureux et un jour sans viande a dû être institué chaque semaine. La presse de Moscou admet pour la première fois officiellement l'existence d'un déséquilibre du commerce avec l'Occident de près de 5 milliards de dollars. Les internements dans les hôpitaux psychiatriques n'ont pas plus réussi que l'expulsion de Soljenitsyne, de Pliouchtch et de plusieurs dizaines d'intellectuels dissidents à faire taire les contestataires. De mystérieux incendies, oeuvre d'une sorte de mafia locale, ont détruit une série de bâtiments publics en Géorgie. [...] Les raisons de ces difficultés tiennent en peu de mots. Les peuples de l'Est veulent vivre et consommer davantage, profiter enfin d'un nombre des bienfaits de cette société de consommation. [...] Le revenu national de l'URSS est en effet moitié moindre que celui des États-Unis, et le quart des Soviétiques continuent de travailler la terre sans parvenir à égaler la production agricole américaine, laquelle est assurée par 3 % de la population seulement.
A. Fontaine, Le Monde, 24 février 1976.
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Le rapport Khrouchtchev (1956) |
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Après la mort de Staline, le Comité central du Parti a commencé à mettre en oeuvre une politique d'explications concises et conséquentes du caractère intolérable et étranger à l'esprit du marxisme-léninisme de la glorification d'un individu, de son élévation au rang de surhomme doté de qualités surnaturelles comparables à celles d'un dieu [...].
Tout le monde ne saisit pas encore complètement les conséquences pratiques qui ont résulté du culte de la personnalité, le grave préjudice causé par la violation du principe de la direction collective du Parti. Tout le monde ne comprend pas encore complètement ce qui a résulté de l'accumulation d'un pouvoir immense et illimité entre les mains d'une seule personne [...].
Staline fut à l'origine de la conception de I'« ennemi du peuple «. [...] Pour l'essentiel et en fait la seule preuve de culpabilité dont il était fait usage, contre toutes les normes de la science juridique actuelle, était la « confession « de l'accusé lui-même, et comme l'ont prouvé les enquêtes faites ultérieurement, les « confessions « étaient obtenues au moyen de pressions physiques. [...] Staline s'était écarté de ces préceptes clairs et nets de Lénine. Staline permit au Parti et au N.k.V.D. d'employer la terreur de masse alors que les classes exploiteuses avaient été liquidées dans notre pays [...]. Cette terreur était en fait dirigée non pas contre les vestiges des classes exploitantes vaincues, mais contre les honnêtes travailleurs du Parti et de l'État soviétique ; on portait contre eux des accusations mensongères, diffamatoires et absurdes d'« espionnage «, de « sabotage «, de préparation de « complots « imaginaires, etc. Une grande partie de ces procès ont été maintenant révisés et un grand nombre d'entre eux ont été frappés de nullité parce qu'ils étaient sans fondement et falsifiés [...].
Le fait aussi de présenter dans toutes leurs ramifications les problèmes soulevés par le culte de l'individu, lequel est étranger au marxisme-léninisme, ainsi que ceux relatifs à la liquidation de ses conséquences, démontre la grande force morale et politique de notre Parti. (Applaudissements prolongés.) Nous sommes convaincus que notre Parti, armé par les résolutions historiques du XXe Congrès, mènera le peuple soviétique vers de nouveaux succès, vers de nouvelles victoires, en suivant la voie tracée par Lénine. (Applaudissements tumultueux et prolongés.)
Traduction empruntée à Branko Lazitch, Le Rapport Khrouchtchev et son histoire, Éd. du Seuil, 1978.
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