Commentaire de document Les aspects stratégiques de la crise de Cuba
Publié le 09/09/2014
Extrait du document

L'URSS [...] était en fait très en retard sur les États-Unis dans la course aux armements stratégiques : en 1962, selon l'Institut des études stratégiques de Londres, Moscou disposait de 75 missiles intercontinentaux basés à terre (ICBM) et n'en fabriquait péniblement que 25 par an. Encore ces engins étaient-ils si imprécis et si peu sûrs que, indique une étude, « on ne pouvait déterminer avec certitude qui ils menaçaient en réalité «. Les États-Unis, eux, avaient déjà 294 ICBM, et leur programme de construction, avec 100 engins par an, était quatre fois plus important.
[...] La situation du Kremlin était pis encore dans le domaine des missiles sous-marins (SLBM). L'URSS n'en possédait alors pratiquement aucun, alors que les États-Unis étaient, là aussi, au beau milieu d'un effort intensif avec le programme Polaris : 96 engins de ce type étaient opérationnels en 1961, 144 en 1962, 416 en 1964 pour s'arrêter à 656 en 1967, à bord de 41 sous-marins.
Si l'on ajoute que Washington disposait encore, en 1962, de 2 000 bombardiers intercontinentaux contre moins de 150 appareils soviétiques, la supériorité de John Kennedy était écrasante.
Il est incontestable que la supériorité des forces américaines classiques qui faisaient le siège de Cuba a été déterminante : c'est la menace d'une invasion ou au moins d'une « opération chirurgicale « contre ses fusées, une menace à laquelle il n'avait pas grand-chose à opposer sur le terrain, qui a fait fléchir Khrouchtchev. Mais la vraie question est ailleurs : Kennedy aurait-il formulé cette menace, et cette menace aurait-elle été crédible, si l'URSS avait eu la même capacité nucléaire globale que les États-Unis ?
[...] Le fait fondamental est que l'Amérique pouvait infliger à son adversaire infiniment plus de destructions que celui-ci ne pouvait lui en causer, et il est difficile d'imaginer que Kennedy n'ait pas tenu compte de ce fait lorsqu'il mit au point sa riposte.
[...] C'est à cette époque que Moscou mit au point un programme massif de réarmement, programme qui allait aboutir non seulement à un renforcement considérable des forces classiques, mais aussi à la constitution d'un arsenal de lanceurs stratégiques [...] supérieur à celui des États-Unis. Sans doute les stratèges soviétiques doivent-ils admettre dans leur for intérieur que la notion de « supériorité stratégique « n'est ni aisément quantifiable ni directement exploitable : chaque Supergrand, aujourd'hui, doit redouter la destruction totale, quel que soit le niveau de ses propres forces.
Michel TATU, « Les données stratégiques, tactiques et leur évolution «,
Le Monde, 16 et 17 octobre 1982.
ouvrait une nouvelle période de tensions entre les deux blocs. En effet, l'installation de missiles nucléaires en dehors du territoire des deux superpuissances constituait une violation de l'accord tacite de non-dissémination de l'arme nucléaire. Elle faisait aussi planer la possibilité d'un conflit nucléaire limité à l'Europe car — de portée intermédiaire — les missiles soviétiques SS-20 ne pouvaient pas atteindre le territoire des États-Unis. En outre, les États-Unis sont, en 1977, dans l'incapacité de déployer un tel dispositif. Au mieux, ils n'envisagent un déploiement que pour 1983. Mais, en cette même année 1983, Ronald Reagan annonce la volonté américaine de lancer une Initiative de Défense Stratégique, souvent appelée guerre des étoiles, destinée à redonner aux États-Unis la suprématie nucléaire sur l'URSS.

«
[ ...
] C'est à cette époque que Moscou mit au point un programme mas
sif de réarmement, programme qui allait aboutir
non seulement à un
renforcement considérable des forces classiques, mais aussi à la consti
tution
d'un arsenal de lanceurs stratégiques [ ...
] supérieur à celui des
États-Unis.
Sans doute les stratèges soviétiques doivent-ils admettre dans
leur for intérieur que la notion
de« supériorité stratégique» n'est ni aisé
ment quantifiable ni directement exploitable : chaque Supergrand,
aujourd'hui, doit redouter la destruction totale, quel que soit
le niveau
de
ses propres forces.
Michel TATU, «Les données stratégiques, tactiques et leur évolution», Le Monde, 16 et 17 octobre 1982.
Questions
1 - Rappeler brièvement les aspects essentiels de la crise de Cuba et
le contexte plus général dans lequel elle s'inscrit.
2 - Quelle explication le journaliste donne-t-il au
dénouement de
cette crise ? Quelle
donnée fondamentale de la guerre froide met-il
ainsi
en évidence ?
3 - Cet article a été écrit vingt ans après l'événement relaté.
Où en
sont les relations entre les deux Grands à ce moment-là?
+++++++++++++++++++++++++
MOTS CLÉS
Équilibre de la terreur, révolution cubaine, castrisme,
John
F.
Kennedy, Nikita Khrouchtchev, Fidel Castro,
Mur de Berlin, coexistence pacifique, Détente, crise
des euromissiles, accords d'Helsinki,
IDS ou guerre des
étoiles.
+++++++++++++++++++++++++
AVANT DE COMMENCER
L'épreuve de commentaire de document est une épreuve
courte: il est conseillé d'y consacrer une heure à une heure et
demie au maximum.
Par ailleurs, l'ensemble des réponses ne
doit pas dépasser une pagne manuscrite.
Il faut donc aller à.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Les aspects stratégiques de la crise de Cuba ?
- Caricature crise de Cuba
- Commentaire de document : Le général de Gaulle est mort
- Commentaire de document: La décolonisation vue par de Gaulle (conférence de presse du 11 avril 1961)
- Une crise économique n'a-t'elle que des aspects négatifs ? Faut-il vraiment la redouter ?