Chine de 1990 à 1994 : Histoire
Publié le 15/01/2019
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Les « événements de Tian’anmen », c’est-à-dire la très dure répression par l’armée des manifestations estudiantines de mai-juin 1989, ont pour effet immédiat de renforcer le clan des conservateurs et d’isoler la Chine sur le plan international ; en revanche, le rythme des réformes économiques n’est guère affecté. Pour briser l’isolement dans lequel cette répression l’avait confiné, le gouvernement de Pékin accorde rapidement à l’Occident quelques concessions de principe, afin de redresser son image de marque sur le plan international. En janvier 1990, la loi martiale est levée en Chine proprement dite, et des centaines de détenus, libérées ; le 1er mai, elle l’est également à Lhassa, capitale du Tibet, où de graves manifestations se déroulèrent au printemps 1989. De façon encore plus spectaculaire, en juin
1990, à la veille du sommet des Sept à Houston, le dissident Fang Lizhi, astrophysicien, réfugié à l'ambassade des Etats-Unis à Pékin, est autorisé à quitter le territoire chinois.
Statu quo politique
Toutefois, ces quelques mesures apaisantes, sans effets directs sur la population, ne s’accompagnent pas pour autant d'une démocratisation du régime. Dans le même temps, en effet, les exécutions capitales se multiplient, en principe pour lutter contre la délinquance et la criminalité. Les épurations se poursuivent dans les milieux intellectuels, artistiques ou religieux. Les campagnes contre le « libéralisme bourgeois » sont ininterrompues. La Chine revient à un socialisme rigoureux et ombrageux au moment même où celui-ci est dénoncé et abandonné dans le reste du monde communiste. Les conséquences de la tentative de coup d’État en URSS, en août 1991, inquiètent fortement la Chine populaire. La suppression du Parti communiste soviétique par Boris Eltsine est présentée, à Pékin, comme une « violation grossière de la Constitution soviétique » et la politique de Mikhaïl Gorbatchev est jugée responsable de la situation. Lors du 42' anniversaire du régime, le 1er octobre 1991, le Premier ministre Li Peng confirme la ligne intransigeante choisie par le Parti communiste chinois.
En octobre 1992, la réunion du 14e congrès du parti est l’occasion de quelques remaniements au sommet de

«
significative
sur la ligne du parti
chinois.
Certes, 1 'État prend diverses mesures
d'apaisement à intervalles réguliers:
ainsi, en février 1993, la libération du
dirigeant étudiant Wang Dan, l'un des
principaux meneurs du « Printemps de
Pékin ,.
de 1989, ou, encore, en
septembre 1993, celle du célèbre Wei
Jingsheng (d'ailleurs à nouveau arrêté
en avril 1994, à la veille de la visite en
Çhine du Premier ministre français,
Edouard Balladur).
Mais aucune de ces
décisions ne saurait masquer
l'immobilisme de la situation politique
chinoise.
En mars 1993, l'Assemblée
nationale populaire confirme cette
absence totale de réformes politiques
en avalisant la nomination de Jiang
Zemin, secrétaire général du Parti
communiste chinois, à la présidence de
la République et en reconduisant Li
Peng, l'homme de la répression de
1989, dans ses fonctions de Premier
ministre, pour cinq ans.
La relance permanente des campagnes
contre la corruption, le culte de
l'argent ou l'individualisme montre
bien que la Chine ne parvient pas à
stabiliser une situation sociale qui se
dégrade.
Dans les campagnes, les
incidents, voire les émeutes, se
multiplient.
La« population flottante>> ,
constituée de provinciaux à la
recherche de travail dans les grandes
villes, est estimée à environ cent
millions de personnes.
� Maintenir la
stabilité », tel est l'objectif essentiel du
régime.
Le gouvernement poursuit
sans relâche une politique de
répression : ainsi, une centaine
d'exécutions capitales ont lieu à la
veille de la fête nationale du
!"-Octobre 1993.
Progrès économiques
En revanche, les progrès économiques
du pays sont considérables durant la
première moitié des années quatre
vingt -dix.
Alors qu'à la fin de la
décennie précédente l'économie
chinoise avait enregistré un taux
d'inflation de 25 %, la situation
s'assainit progressivement à partir de
1990 : la hausse des prix est ramenée à
5 %, la production industrielle
augmente de près de 8 % en 1990, de
14% en 1991, et de 19% en 1992 ;
le commerce extérieur atteint 151
milliards de doUars en 1992, avec un
excédent de plusieurs milliards, et les
réserves monétaires s'élèvent à 50
milliards de dollars à la fin de 1992.
En 1993, le taux de croissance dépasse
13 %, avec une augmentation de la
production industrielle de 25 o/o et un
accroissement des investissements de
70 %.
Par ailleurs, le yuan est
partiellement convertible depuis le
mois de janvier 1994.
Les autorités
s'emploient donc, en 1993 et 1994, à
contrôler cette croissance excessive, à
juguler l'inflation, qui atteint de DONNÉES
DÉMOGRAPHIQUES
ET ÉCONOMIQUES 1990
1991 1992 1993
Nombre d'habitants (en millions)
1 102 1134 1162,2
1 175,3
Produit national brut (en doUars US/habitant)
410
440 470
490
Part du prod uit national brut réalisée (en %)
par: l'agriculture -
-
27 -
l'industrie -
-
34 -
les services -
-
38 -
Commerce extérieur (en milliards de dollars US)
exportations 62 71
81 -
importations 53 63,7
70 -
dene extérieure (en milliards de doUars US)
52,5 60,8
69,3 -
Taux brut de natalité
Taux brut de mortalité
Espérance de vie à l a naissance (en années)
hommes femmes
Source: Banque mondiale-.
nouveau 25 % dans les grandes villes
côtières.
Les résultats de ces plans
d'austérité sont très limités, sauf en ce
qui concerne le commerce extérieur,
qui redevient excédentaire.
Fin de l'isolement diplomatique
Le bilan est également assez positif en
matière de politique extérieure.
Après
la répression de 1989, la communauté
internationale avait pris des mesures
de représailles, isolant presque
totalement la Chine.
En outre, la chute
du mur de Berlin, l'écroulement des
régimes communistes en Europe de
l'Est et, finalement, la dissolution de
l'URSS en décembre 1991 avaient
renforcé cet isolement sur la scène
internationale.
Or le pays est parvenu
très largement à surmonter ces
difficultés.
Tablant sur l'immense marché qu'elle
représente et adoptant une attitude
modérée durant la crise du Golfe, la
Chine réussit à renouer de meilleures
relations avec les États-Unis dès
1990-1991.
Ainsi, Washington a
renouvelé chaque année la clause de la
nation la plus favorisée, qui permet à
Pékin d'écouler ses produits sur le
marché américain.
En 1994, le
président Clinton consent même à
dissocier la question du respect des
droits de l'homme de ce
renouvellement.
En revanche, la prolifération nucléaire,
balistique et chimique que favorise la
Chine res,te un point de discorde entre
les deux Etats.
Pékin est aussi
parvenue à normaliser ses relations
avec l'Europe de l'Ouest et le Japon,
également intéressés par le marché
chinois.
Toutes les sanctions prises en
1989 ont ainsi été levées.
Néanmoins,
les livraisons d'armes par la France à
Taiwan, les projets britanniques de
démocratisation à Hongkong et
1 'accroissement des dépenses militaires
chinoises restent des sujets de friction.
21
19,7 18,2 -
6,3 6,7 6,6 -
68,6 -
68 -
71,8 -
68 -
De plus, en mai 1991, la Chine et la
Russie signent un traité sur le tracé de
la partie orientale de leur frontière
commune, et Pékin ouvre des
négociations avec ses nouveaux voisins
de l'Ouest, le Kazakhstan, le
Kirghizistan et le Tadjikistan.
En dépit
du gouffre idéologique qui sépare
désormais Pékin et Moscou, la Chine
n'a cessé d'améliorer ses relations avec
la nouvelle Russie, à laquelle elle
achète même d'importantes quantités
d'armement.
Pékin renforce aussi ses liens avec
plusieurs États asiatiques.
La Chine
établit des relations diplomatiques avec
l'Indonésie, Singapour et Brunei en
1990-1991, et reconnaît la Corée du
Sud en 1992.
De même, la politique de
détente avec le Viêt-nam, entamée en
1989, se poursuit.
Mais des litiges
frontaliers et maritimes, ainsi que la
question cambodgienne, continuent
d' opposer les deux pays.
Enfin, depuis
1991, les relations avec l'Inde
s'améliorent.
En résumé, la Chine a réussi, entre
1989 et 1994, à développer
sensiblement son économie et à
réaffirmer son rôle dans les relations
internationales, sans pour autant
abandonner, du moins sur le plan
politique, sa ligne socialiste.
Toutefois,
la situation ne pourra pas être
stabilisée tant que ne sera pas réglée la
question de la succession de Deng
Xiaoping..
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