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Castelo Branco

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

" Je suis le curateur d'une faillite dont la masse est dans un désordre incroyable... Le travail est herculéen. Je compte sur beaucoup de gens, sur la patience du peuple et sur les aspirations d'une masse énorme de Brésiliens. Je ne me laisse pas abuser par des popularités trompeuses. En tout, j'essaye de voir avec simplicité et parfois avec humilité. Il semble que les militaires m'accordent leur confiance, mais il n'y a pas de politique militariste... "             C'est par ces mots que le nouveau président de la République des États-Unis du Brésil, porté au pouvoir par la Révolution de 1964, Humberto de Alencar Castelo Branco, décrit la tâche qu'il vient d'entreprendre dans un message manuscrit adressé à son fils et à ses petits-enfants.             Peu connu hors des cadres de l'armée, qui est ce général qui engagera le Brésil sur la voie de la modernisation dans le cadre d'un régime militaire contemporain ? Né le 20 novembre 1900 à Fortaleza dans l'État du Céara, en plein " polygone de la sécheresse ", ce Nord-Est brésilien où la vie est plus difficile qu'ailleurs, issu de petite bourgeoisie, il est fils d'officier. A dix-sept ans, il s'engage à son tour, et d'échelon en échelon, devient général de corps d'armée avant de quitter le service actif, avec rang de maréchal, pour assumer ses nouvelles fonctions de président de la République, le 11 avril 1964. Dès lors, ce soldat professionnel qui se veut " non pas l'émanation d'un groupe, mais le représentant de l'intérêt et de la volonté de la nation tout entière " ne sera plus jamais vu en uniforme. Il n'a ni la prestance, ni le " charisme " de ses prédécesseurs, les présidents " populistes ". Son tempérament sévère, accentué encore par son récent veuvage ­ il a perdu sa femme un an plus tôt, après quarante-trois ans de vie conjugale heureuse ­, son sens aigu de l'autorité et du devoir l'apparentent plus à Calvin qu'à Gambetta. " L'enrichissement illicite peut-il être sanctionné par la peine de mort dans la nouvelle Constitution ? ", demandera-t-il, par exemple, à son ministre de la Justice.   

« L'inflation galopante qui menaçait d'atteindre 144 % en 1964 est enrayée.

Priorité absolue est donnée à un plan dedéveloppement qui vaudra au Brésil dans les années suivantes des taux de croissance annuels de l'ordre de 11 %.Autour de ce plan s'ordonne, parallèlement, une vaste rénovation des structures politiques, économiques,administratives et sociales codifiée par un acte institutionnel, dix-sept actes complémentaires et quelque centquatre-vingt-onze décrets et lois.

Cet édifice législatif impressionnant est couronné, au début de 1967, par unenouvelle Constitution.

Rétrospectivement, malgré les tensions suscitées par les options choisies, il est indéniable que le régime instauré parCastelo Branco a cherché sa justification historique dans la nécessité d'implanter au Brésil un programmesystématique de modernisation économique.

A cette fin, toute l'activité politique a été placée au service du Plan, renversant ainsi l'ordre traditionnel desfacteurs qui veut que le Plan soit mis au service de la politique.

En fait, la planification est devenue le programme dugouvernement militaire.

Alors que, pour ses adversaires, le modèle castelien est un “ colonial-fascisme ”, l'étude de la période met en relief“ un indice élevé de cohérence ” grâce auquel une minorité de technocrates a réalisé “ pour la première fois unensemble de changements dans une perspective idéologique rigide de la réalité brésilienne ” visant à “ l'implantationd'un modèle économique cohérent et rigoureux ”.

Certes, le prix payé pour ce renouveau aura été élevé par rapport à une certaine conception de la démocratie,puisqu'il ne saurait y avoir de développement accéléré sans une certaine forme de contrainte.

Mais nul ne pourraitnier les résultats qui permettent au Brésil, dès 1975, d'aspirer au rôle du “ plus jeune des géants ”.

Le 15 mars 1967, Castelo Branco remet à son successeur, le maréchal Arthur da Costa e Silva, un paysirrévocablement engagé sur la voie de la modernisation.

Quatre mois plus tard, le 18 juillet, l'ancien président meurtdans un accident d'avion près de son lieu de naissance.

Paradoxalement, cette fin dramatique consolidera le régimemilitaire en renforçant la cohésion des forces armées, outrées par certains articles publiés par la presse d'oppositionau sujet de celui qu'elle nomme “ le petit Dieu mesquin ”.

Un de ces détracteurs va jusqu'à écrire : “ L'humanité apeu perdu, ou mieux encore, n'a rien perdu par la mort de Castelo Branco.

Avec l'ex-président, un homme froid,insensible, vindicatif, implacable, inhumain, calculateur, cruel, frustré, a disparu sans grandeur ni noblesse.

Un êtresec à l'intérieur comme à l'extérieur, au cœur semblable au désert du Sahara.

Tout au long de sa vie il n'a jamais niaimé, ni été aimé.

Le décès d'un tel homme ne peut susciter qu'indifférence.

” Injuste épitaphe pour celui qui, ayant choisi d'accomplir un travail de titan, dont le Brésil apprendra à lui être reconnaissant, disparaîtra incompriset impopulaire pour avoir accepté d'être “ le curateur de la faillite brésilienne ”, mission qu'il n'avait jamais désirée.. »

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