Azincourt : la fin de la chevalerie féodale
Publié le 05/09/2013
Extrait du document


«
pables de résister aux coups de
butoir -pourtant parfois déses
pérés -des Anglais .
Assurance et mépris
La déroute d'Azincourt s'expli
que en premier lieu par une
défaillance manifeste
du com
mandement.
Pour éviter que le
roi ne soit fait prisonnier , com
me Jean le Bon à Poitiers en
septembre 1356, les conseil
lers de Charles VI l'ont dissua
dé de prendre part au combat.
Mais, en l'absence du Valois
ainsi
que du dauphin Louis de
LA MANŒUVRE DU
PIQUET
A Harfleur et au cours du trajet jusqu'à Azincourt,
Henry V a perdu la plupart
de ses chevaux.
Faute de cavalerie, il compte sur
l'efficacité de ses
redoutables archers.
Ces fantassins parfaitement
disciplinés ont en outre été soumis à un sérieux
entraînement, en particulier
à celui de la « manœuvre du
piquet ».
Une partie d'entre eux a été équipée de piquets, pieux de bois de
près de deux mètres de long garnis à chaque extrémité
d'une robuste pointe en fer, qui sont destinés à être
fichés dans le sol en position légèrement inclinée afin de briser les charges de
la cavalerie ennemie.
A Azincourt, cette manœuvre
se révèle particulièrement
efficace.
Les chevaliers
français chargent en rangs si
serrés qu'une fois lancés ils
ne peuvent aller que de
l'avant.
De surcroît
gravement limités dans leur
marge de manœuvre par le
poids de leur équipement
et par le sol gorgé
d'eau dans lequel leurs
chevaux s'embourbent,
ils ne peuvent éviter
l'obstacle des piquets et sont
nombreux à s'y empaler.
Viennois -écarté pour les mê
mes raisons que son père-,
personne n'est clairement dé
signé pour assumer l'autorité
suprême .
Oui doit imposer ses
vues sur la
conduite des opéra
tions : le maréchal Boucicaut,
chef
de guerre reconnu et com
pétent, ou le connétable Char
les 1e• d'Albret, qui a le plus
haut grade dans la hiérarchie
militaire ? En outre, tenant à
leurs prérogatives, les princes
du sang n'hésitent pas à con
tester les décisions de l'un et
de l'autre .
Le reste de la no
blesse entend pareillement
faire valoir ses avis.
Ne rêvant
que de gloire (et de butin !),
tous ces preux finissent par
n'en faire qu'à leur tête .
Alors
que dans le camp anglais
Henry V assume seul
et pleine
ment le commandement ...
De
leur côté , les miliciens com
munaux sont mal préparés , et
l'exemple des grands ne les
incite guère à la discipline.
Quant aux archers et aux fan
tassins,
ils ont beau être bien
plus nombreux que leurs adver
saires, personne n'envisage d'y
avoir recours.
Les chevaliers
s'estiment seuls dignes de ser
vir le royaume et ont le plus
grand mépris pour cette « pié
taille », qu'ils cantonnent à l'ar
rière,
sans même songer à lui
offrir l'occasion d'intervenir.
Une armure
mortelle
Les chevaliers montent à l'as
saut sans suivre une stratégie
bien déterminée, persuadés
que leur vaillance suffira pour
vaincre l'ennemi .
Le champ de
bataille, fort resserré , n 'es t pas
favorable à une
attaque fron
tale.
Plus grave, au rebours des
archers anglais, les cavaliers ne
peuvent manœuvrer libre
ment.
Le terrain, gorgé d'ea u
par les pluies des jours précé
dents, est difficilement prati
cable : au lieu de s'élancer au
lfiIHllhED ITIONS Win ATLAS
galop, les chevaux ont du mal à
avancer,
s'embourbent.
Si les
chevaliers
sont protégés par
une lourde armure, leurs mon
tures (dont les protections ont
été réduites pour les soulager
d 'un surcroît
de charge) sont
beaucoup plus vulnérables, et
c'est contre elles que les
archers anglais règlent leurs
tirs .
Une fois à terre , les cava
liers , entravés par les quelque
trente kilogrammes de leur
cuirasse, de leur heaume, des
nombreuses autres parties de
leur armure et de leur épée
massive .
ne peuvent espérer
se relever sans aide : s'ils sont
désarçonnés au beau milieu
du camp adverse, ils ont peu
de chances d'échapper à la
capture -dans le
meilleur des
cas ! - ou à la mort .
Azincourt sonnera le glas
de la
chevalerie féodale.
Trop lour
de,
inapte à manœuvrer rapi
dement, composée pour partie
de privilégiés qui refusent de
se soumettre à l' autorité d'un
commandement unique, elle
révèle devant les troupes par
faitement disciplinées , organi
sées et préparées d'Henry V
d'Angleterre les graves défauts
de sa cuirasse .
Des années
plus tard, lorsqu 'ils préside
ront à la réorganisation de l'ar
mée royale, Charles VII, puis
Louis XI sauront tirer les leçons
de cette désastreuse défaite ..
»
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