Afrique noire française de 1910 à 1919 : Histoire
Publié le 12/01/2019
Extrait du document
En raison de la Grande Guerre, l’Afrique noire subit, durant la décennie dix, les bouleversements les plus considérables de son histoire depuis sa conquête par les grandes puissances impérialistes. Non que le conflit mondial y ait trouvé des théâtres de combats comparables à ceux d'Europe, mais l’effort qui est réclamé aux Africains fait de ces années un tournant décisif: l'Afrique noire, encore ancrée dans les traditions, entre brutalement dans la modernité et véritablement dans l’ère coloniale.
Installation du pouvoir colonial
En 1919, l'Afrique noire sous domination française est à peine structurée. La Fédération d'Afrique-Occidentale française, née en 1895. n'a pris réellement forme qu’en 1904. Celle de l'Afrique-Équatoriale française vient juste de se constituer (1910). Dans les deux cas. il s’agissait de coordonner la direction de territoires trop lointains de la métropole, énormes et encore mal connus. Des gouverneurs généraux, véritables proconsuls, sont investis des
pouvoirs de la République dans leurs capitales fédérales de Dakar et de Brazzaville. Ils disposent d'une administration centrale, de services communs et d'un budget fédéral alimenté par les revenus douaniers; ils sont seuls à pouvoir correspondre directement avec le ministre des Colonies à Paris, ce qui enlève toute autonomie d’action aux gouverneurs de territoires, désormais dénommés lieutenants-gouverneurs.
La géographie politique de cette Afrique noire n’est pas définitivement établie. En 1910. sept territoires
«
1913.
Le
cololltl Largeau ptiSse
ses troupes e11 re 1·u e tm Borkou.
da11s la régi011 till Souda11
sepremrio111d peuplt!r de
Sénoussis.
Ceux-ci en serow
clumés 1-ers la Libre.
La campag11e de porificorio•l
prer1dra ji11 e11 1919.
©Il.
Roger-Violier composent
alors en principe la
Fédération d' AOF (Sénégal.
Haut·
Sénégal- iger.
Guinée.
Dahomey,
Mauritanie.
Niger et Côte- d'I voire ).
quatre celle d'AEF (Gabon, Moyen
Congo.
Oubangui-Chari.
Tchad).
Mais.
ce découpage n'est pas définiti f
(en 1919.
le Haut-Sénégal-Niger sera
scindé en deux: Soudan et Haute
Voila).
les limites en sont encore
imp récises.
le commandement des
divisions administratives locales
(cercles en AOF.
circonscriptions en
AEF) est tantôt attribué à des civils.
tantôt à des militaires.
la sous
administration.
voire la non
adm inistrat ion .
quasi générale.
C'est que la pacification n'est pas
achevée : de nombreuses popu lations
demeurent inso um ises.
11 existe
toujours des régions militaires : le nord
de la bo ucle du Niger où les Touaregs
n'ont pas encore plié; les zones
frontalières entre la Guin ée.
la Sierra
Leone et le Liberia.
Plu s de la moitié
de la Côte-d'Ivoire est en rébellion: le
quadrillage systématique et les
opérations en tache d'huile y dureront
de 1908 à 1915.
Aux confins du Sahara.
le iger ct le Tchad resteront
territoires militaires jusqu'en 1920-
1922: en 1910.
1a lutte continue contre
les Touaregs.
les Toubous et les
Ouadaïens.
La situation n'est guère
plus brillante dan le territoires civils
où des régions entières éch ap pe nt à
l'autorité administrative: ainsi le
nord-est du Dahomey.
I'Atakora.
qui
n·a pou r ainsi dire jamais subi d'ordres
du Blanc.
ou le pays de l'Ouest· Volt a.
entre les fleU\·es Volta ct Nig er.
q ui
viennent à peine de passer sous
contrôle colonial.
En Oubangui-Chari
et au Congo.
d'immenses zones ont été
abandonnées au pillage de sociétés
concessionnaires qui ne s'imposent aux
populations que par une contrainte
brutale de ramassa2e du caoutchouc de
cueillette.
En 1910�1'Afrique noire
française «SOumi e» est certainement
encore bien moins étendue.
en
définiti\C.
que l'Afrique «insoumise».
ou tout simplement ig no rée.
Partout.
le po u,·o ir colonial français.
qui se pique d'administration directe.
dépend.
dans son application
quot idienn e.
d'auxiliaires et d'a lliés
locaux ind is pe nsab les: des interprètes.
à l'exe mple de ce Wn11grir1 mis en scène
av ec tant de verve par l'éminent
écrivain Amadou Hampaté Bâ.
des
«gardes-cercles».
dont les sous
officiers peuvent de,·enir de véritables
petits tyrans.
et urt out des chefs
indigènes.
Quand ils n'existent pas.
comme dans les ociétés lignagères.
on
les crée.
Ailleu rs.
on a souvent cassé
les vieilles princip au tés : on a placé à la
tête des provinces ou des cantons des
clients, des ho m me s nouveaux et.
plus
souvent encore.
des membres des
anciennes aristocraties qui ont accepté
de collaborer avec l'ad mini strat ion ...
Une
politique plus respectueuse des
hiérarchies authentiques de chaque
groupe ethniq ue est définie par le
gouverneur général Amédée William
Merleau-Ponty.
dit William Ponty,
(dont la perso nn alit é marquera
profondément la col on is a tion française
en Afrique-Occidentale de 1908 à sa
mort en 1915).
sous le nom de
«politique des races».
Mal interprétée
parfois par de subalternes animés de
pr éjug és contre les chefs.
elle eng en dre
des désastres.
Un autre gou,·erneur
général.
Joos Van Vollenhoven.
devra
redresser la barre en 1917 par une
cél�bre circulaire intimant aux
administrateurs de revaloriser la
position des chefs coutumiers.
Mais il
ne faut pas �·y tr o mper.
pour Van
Voll enho ven comme pour Ponty.
le
chef n'est qu'un auxiliaire privilégié du
pou' oir colonial.
une fois celui-ci
installé ...
ce qui est loin d'être partout
le ca' à la ,·cille de la guerre.
Contribution à l'effort de guerre
Cette Afrique va être soumise à un
ef for t sans préc éd en t pendant la
Grande Guerre.
Des officiers de la
c o nq uêt e.
a ppu yés par des hom mes
politiques.
ont lancé une campagne
d'opinion forcenée sur le thème de
l'appel à l'Afrique noire.
Charles
Mangin publie en 1910 son fameux
livre la Force noire.
Celle-ci devra
fournir les soldats qui vie ndr ont
compenser la défaillance
démographique de la métropole.
On
é vo qu e le s l égions que.
à l'imitation de
Rome.
la France pourrait lever dans
so n Empire: 50 000.
70 000.
150 000 ...
300 000 tirailleurs noirs peut-être.
dont
à la suite de Mangin on vant e le naturel
gu erri er ct les incroyables capacités
c omb atives qui permet traien t de
constituer les troupes de choc capabl es d'enfoncer
le front de l'adversaire.
c'est -à -dir e l' Al le m an d !
Cette propagande n'a qu'un écho
limité jusqu'au con Ait.
Mais la
désillusion devant la révélation que la
g ue rre ne sera pas courte et les
premie rs massacres détermi nen t
rapidement les dirig e ants militaires
métropolitains à utiliser l'Empire.
D'ailleurs.
ne les assure-t-on pas sur
place.
William Pomy en tête.
que les
populations brûlent de servir la «mère
patrie»? Dès septembre 191-1.
les
premiers contingents sénégalais
d éb arq ue n t en France.
en pro v en ance
du Maro c où ils participaient à la
conquête depuis 1912.
L'expérience
n'est pas concluante : ces soldats,
pourtant aguerris (sauf quelques
bataillons en provenance directe du
Sénégal).
finissent, malgré un héroïsme
admirable, paral ysé s et décimés, dans
la bouc glacée d'Ypres et de Dixmude.
Quoi qu ïl en wit.
le cycle des
recrutements ..
volontaires» est
enclenché.
En fait.
au tirailleur
sén égal ais.
soldat de métier.
sc
substitue le paysan conscrit, sans
vocation ni goût pour la ch os e militaire
et sans motivation pour la cause qu'on
veut lui faire épouser.
Au réel
mouvement d'enthousiasme des
débuts.
succède presque
immédiatement la crainte.
puis le
mécontentement et la résistance:
protestations de femmes, fuite de
populations en brousse ou dans les
colonies étrangères: devamles
c o m m iss ion s de rec ru tem ent,
présentation d'inaptes (très courante),
désertions ...
Plus que jamais.
la
collaboration des chefs est
indispensable.
Ceux-ci sont loyaux
dans l'ensemble, en particulier les
hauts responsables des grandes
confréries musulmanes, et acceptent
d'aider l'administration.
Certains,.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Inde française - Inde portugaise de 1910 à 1919 : Histoire
- Afrique-orientale allemande de 1910 à 1919 : Histoire
- Afrique du sud (UNION SUD-AFRICAINE) de 1910 à 1919 : Histoire
- Afrique noire française de 1920 à 1929 : Histoire
- Afrique noire française de 1900 à 1909 : Histoire