Afrique du sud de 1995 à 1999 : Histoire
Publié le 24/12/2018
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Apres les élections historiques d'avril 1994 et la victoire du Congrès national africain (ANC), l’Afrique du Sud tourne le dos au régime de l’apartheid et entreprend une véritable « refondation ». Dans l’histoire de la première puissance d’Afrique, cette période demeurera celle de l’avènement d’un régime démocratique. Elle reste marquée également par la recherche d’une légitimité et de mythes fondateurs nouveaux symbolisant la rupture avec l’apartheid (changement de drapeau, nouveaux jours fériés et/ou changement de nom des anciens jours fériés, nouvelles appellations des bâtiments publics et des infrastructures les plus importantes, discours et gestes d’hommes politiques prônant la réconciliation, larges débats sur la nouvelle Constitution, et l’hymne national). Cette « refondation » s’explique, en grande partie, par l’influence qu’exercent les structures associatives et religieuses sur le fonctionnement du pouvoir. D’autres mesures et événements confirmeront cette volonté de construction d’une nouvelle Afrique du Sud : la normalisation des relations avec les pays voisins, la contribution à la gestion de la crise du Lesotho et de la région des Grands Lacs, le retour au sein du Commonwcalth, ou la participation aux ensembles et organisations régionaux telle la SDAC (Southern African Development Community), à LOUA, à f Unesco et au mouvement des non-alignés. A cela s’ajoutent des événements politiques (élections locales d’octobre 1995) et sportifs (la Coupe du monde de rugby et la Coupe d’Afrique des nations de football, organisées et remportées par l’Afrique du Sud - à chaque fois, avec une équipe multiraciale, symbole de la nouvelle unité du pays). Cependant, les espoirs des premières années de l’après-apartheid ne peuvent faire oublier les fortes attentes de la population, dont les conditions sociales sont toujours difficiles : chômage, criminalité, drogue, prostitution, habitat précaire, frappent des pans entiers de la société. De même, la situation économique générale laisse planer le doute quant à la capacité du régime d’éviter, à terme, non seulement la marginalisation croissante d’une forte
minorité de la population, mais aussi sa radicalisation au profit d’organisations politiques plus révolutionnaires ou extrémistes. Le redémarrage de l’économie et l’optimisme des hommes d’affaires, qui ont commencé à recueillir les fruits du changement politique, laissent entrevoir des possibilités de réussite politique et, pour le pouvoir, la perspective de disposer de plus de ressources, utilisables notamment dans le cadre du plan de reconstruction et de développement (RDP) de la nouvelle Afrique du Sud.
L’Afrique du Sud après Mandela
Apres les deux premières années consacrées à l’enracinement des institutions démocratiques, le pouvoir s’est engagé dans une politique de normalisation, imposée par le refus du président Nelson Mandela de se représenter en juin 1999. La mise en ordre de l’économie et de l’organisation politique du pays devient ainsi un préalable pour empêcher que ce départ ne débouche sur des dysfonctionnements institutionnels et sur un affaiblissement du pays au point de l’entraîner dans l’instabilité politique et financière. La phase de consolidation entreprise à partir de 1997 reflète les progrès déjà réalisés dans la transformation du pays et le changement des institutions et du régime. Les efforts pour réformer l’économie se sont amplifiés après la forte dépréciation du rand, en 1996. et les retombées négatives de la crise asiatique, en 1997, sur la monnaie et l’économie sud-africaines : le déficit budgétaire et le taux d’inflation sont réduits, la structure de la dette est assainie, et les réserves sont augmentées. La politique d’assainissement, lancée dans le cadre du programme GEAR (Growth, Employaient and Reconstruction), accompagne le processus de restructuration profonde de l’économie. L’ouverture du pays et l’adhésion aux principes du libéralisme économique entraînent la levée des protections tarifaires et douanières, avec des résultats contrastés selon les secteurs (fragilisation des secteurs textile et minier face à la concurrence
internationale, mais opportunités de modernisation des télécommunications, du tourisme et des biens de consommation courante). L’État entreprend également la privatisation d’une partie de ses actifs industriels pour se procurer de nouvelles ressources, facilitant ainsi la promotion économique de la majorité noire. La politique de préférence à l’emploi (affirmative action) menée en direction des Noirs est stimulée dans tous les secteurs publics, et le mouvement Black Empowerment encourage la constitution d’un actionnariat, d’un capitalisme et d’une bourgeoisie d’affaires noirs. Ce processus, malgré quelques échecs
«
M"
Desmond n11u (à droite)
remet au président Nelson
Mandela le rapport tle !tt
commission • Vt!rité et
Réconciliatioll "·
C> Perer Andrews/Reuters/MaxPPP des
membres des trois groupes de
l'alliance.
Seule la perspective des
élections législatives et présidentielle
de juin 1999 et les divisions internes de
chaque mouvement vont empêcher ces
d iv erge nc es de se traduire en rupture.
La 50' réunion annuelle de l' ANC
(décembre 1997) perme t d'imposer la
li gne du président Mandela et de son
dauphin, le vice-président Thabo
M bek i.
Ce dernier, qui exerce le
pouvoir effectif depuis 1995, est
intronisé à cette occasion successeur
officiel de Mandela à la présidence de
la République.
Le durcissem ent du ton
vis-à-vis des conservateurs blancs
relève, dans ce contexte, aussi bien de la
strat ég ie po li tique interne à I'ANC
qu e de l' in ca pacit é du Parti national
(NP) de moderniser son discours et de
s'adapter à la nouvelle Afrique du Sud.
En effet, le retrait de Frederik De Klerk
(aoû t 1997) illustre cette inadaptation,
que confirme, par ailleurs, la démi ssio n
de Rolf Mey er, l' an cie n négociat eur
constitutionnel du NP.
L'entrée en
vigueur de la Constitution de 1996,
avec son Conseil national des neuf
provinces, la confirmation de certaines
Constitutions provinciales, ainsi que
1' importance prise par la Cou r
constitutionnelle dans le respect de la
séparation des pouvoirs, conftmlent la
consolidation des institutions politi qu es
et entérinent le rôle essentiel de
l'échelon r6 g io na l dans les mécanismes
démocratiques.
L'État de droit,
s 'a pp uyant sur un appareil jud ic iai re
solide et fiable, s'impose alors comme
une réalité concrète structurant les
compromis et str at égi es poli tiqu es,
au point de contraindre le présid en t à
rendre compt e au juge de ses choix
pol itiq ues.
Mais, dans le même temps, les vieilles
oppositions raciales et politiques,
occultées depui s 1994, refont surface :
les anciens privilégiés du régime
d 'apart heid sentent peser sur eux
les coûts finan cier s, éco nomi ques ct
sociaux de la démocratisation du
régime et se perçoi vent comme
les mal-aimés du nouveau pouvoir ;
les exclus constatent, quant à eux, la
lenteur des chang ements économiques.
Cette accentuation des tensions sociales ne
fait que traduire la fin de la période
" prophétique >> et la normalisation de
la nouvelle Afrique du Sud.
Les
difficultés rencontrées par la
commission «V érité et
R écon cil iat ion », présidée par l'évêque
Desmond Thtu pour obtenir la
coopération effective des anciens
leaders politiques de l'apartheid ou de
di rig eant s de l'ANC, et les blocages
e nregist rés dans certains milieux,
tels que lqu es cercles militaires ou la
fédération sud-africaine de rugby,
reflètent cette réalité.
En fait,
le pouvoir réel se fonde de plus en plus
sur l'association entre J'institution
gouvernementale, le patronat dont les
intérêts restent largement aux mains de
la minorité blanche, et les syndicats
avec leurs puissantes fédérations de
branches et de secteurs.
C'est dans
ce système néo-corporatiste, en œuvre
a ujou rd'hu i dans l'essentiel des grands
pays démocratiques, que l'Afrique du
Sud compte rechercher les fondements
d'une stabilité durable.
Cela confirme,
à la fois, la fin de l'ancien régime de
!;apartheid et la naissance du nouvel
Etat sud-africain.
Normalisé, ce dernier
se prépare à survivre à la sortie officielle de son fondateur et représentant emblém ati que, Nelson
Mandela.
En juin 1999, I'ANC obtient
266 sièges sur 400 à l'Assemblée et Thabo Mbeki accède à la pré si de nce du pays..
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