11 janvier 1923 : Les troupes françaises occupent la Ruhr.
Publié le 08/03/2012
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Trois divisions franco-belges occupent la Ruhr, cœur industriel de l’Allemagne, condamnant ainsi celle-ci à l’asphyxie. Rompant toute relation diplomatique avec les “ envahisseurs ”, le chancelier Cuno décrète la résistance passive.
«
En décidant de saisir des • gages productifs • dans le bassin de la Ruhr, la Franœ annexait le véritable cœur économique de l'Allemagne.
Baptisée du nom d'un affluent du Rhin, cette région siluée dans le Land de Rhénanie du-Nord-Weslaph s'étend sur une
œntaine de kilomètres de longueur
Poincaré, dés lors, a beau jeu de lier les deux problèmes : les sommes françaises dues aux Anglo-Saxons ne seront remboursées que si l'Allemagne paie elle-même scrupuleusement ses dettes .
Ln fiANÇAIS OCCUPfNT LA RUHI Début 1923, un retard dans une livraison de charbon de bois et de poteaux télégraphiques offre à Poincaré le prétexte pour passer à l 'action .
Aprés avoir fait constater le manquement allemand par la commission des Réparations , il ordonne à trois divisions d'IIM.str hl lluW . II bénéficie
concernée par les réparations .
Le 11 janvier, 60 000 soldats commandés par le général Degoutte occupent Düsseldorf, Essen et Dortmund.
Officiellemen~ ces troupes doivent assurer la sécurité de la Mission interalliée pour le cOIIIrile des IISiftS et des •hies , chargée d'organiser
la captation des ressources de la Ruhr vers la France et la Belgique .
Une Régie franco-belge des chemins de fer, fonctionnant avec des cheminots volontaires , se substitue à la Reichsbahn.
Un cordon douanier est mis en place, qui isole les territoires occupés du reste du pays.
ÉCHEC DE LA RÉSISTANCE PASSIVE
!:occupation déclenche l'indignation du régime de Weimar .
Le chancelier Wilhem Cuno décrète la rhist.ace pi/SSWe .
Il appelle les ouvriers
et une quarantaine de largeur, autour des viles d'fua, DOsseldorf, Dortmund et Duisburg.
le développement industriel de l'Allemagne Il partir du m< siède s'est en grande partie appuyé sur l'exploitation de la richesse du soos-sol de la Ruhr.
le bassin concentre en effel de gigantesques ressources en charbon, en fer et autres métaux, qui ont permis l'essor fulgurant de l'activité métallurgique et sidérurgique.
symbolisée par de grandes entreprises comme Krupp ouThyssen .
et fonctionnaires de la Ruhr à cesser le travail et annonce que leurs salaires seront pris en charge par le gouvernement.
A peine occupée, la Ruhr est paralysée.
VIOlfNTE ltACTION FJANÇAISE En riposte au mouvemen~ les autorités d'occupation réagissent de manière radicale .
En quelques semaines, des milliers de grévistes , refusant toujours de reprendre le travail , sont délogés de force et expulsés de la Ruhr par les soldats français .
On estime leur nombre à plus de 150 000 personnes, dont près de 40 000 fonctionnaires .
Pour les remplacer, Poincaré fait venir dans la Ruhr des mineurs français et belges , des ouvriers , des employés de chemin de fer, des ingénieurs , des comptables ...
Ce mouvement massif d'expulsions ne se fait pas sans violence.
Les heurts se multiplient.
Plusieurs manifestations dégénèrent dans le sang .
Des ouvriers allemands sont blessés, tués , des soldats français assassinés .
Le point culminant est atteint le 31 mars, quand la troupe tire sur les grévistes de l'usine Krupp à Essen .
On relèvera treize morts .
Par ailleurs , le général Degoutte avait proclamé le 1 " mars que tout acte de sabotage (des trains ou des machines) serait sanctionné de la peine de mort .
Il tient parole : le 26 mai, un jeune officier allemand est fusillé pour cette raison .
Plusieurs grands industriels , tel Gustav Krupp ou Fritz Thyssen , seront arrêtés par les forces d'occupation pour s'être opposés aux livraisons de charbon.
EFFONDREMENT DE l.'tCONOMIE AUE MANDE !:occupation de la Ruhr ne tarde pas à produire ses effets sur l'économie allemande .
La pénurie de coke et de charbon exacerbe la crise .
Le -rie s'tlfflllfln , l'inflation explose : début ao~ il faut débourser 3 ,3 milliards pour obtenir 1 dollar, et début octobre, 12 milliards de marks! Cette débacle financière contraint le gouvernement à suspendre la prise en charge des salaires des grévistes de la Ruhr.
La lassitude gagne la population .
Un nombre croissant d'ouvriers retournent à l'usine , attirés
par les salaires payés en francs (et non en marks dévalués) par les occupants.
Face à cette impasse, le cMIIKe/lrr Cno démissionne au mois d 'août Il est remplacé par GIISÜIV
~-·· · qui décide aussitôt de mettre fin à la résistance passive et de reprendre les négociations sur les réparations .
La politique de fermeté de la France semble porter ses fruits.
UN LENT RÈGLEMENT
L'OPINION fiANSAISE DMStE Le gouvernement de Raymond Poincaré est bientôt confronté à une série de difficultés nées de l'occupation de la Ruhr .
A commencer par son coOl !:opération ne se révèle en effet pas aussi rentable pour l'économie nationale que ses promoteurs l'avaient espéré.
Certes, les matières premières sont captées au profit de la France, mais, à l'inverse , les frais d'entretien des troupes expéditionnaires pèsent lourdement sur un budget déjà déficitaire.
Le président du Conseil lui-même le reconnaît dans une déclaration à la Chambre le 16 novembre 1923 : • !:occupation de la Ruhr a coûté 691 milliards de francs et lui a rapporté 520 milliards .
• Sur le front de la politique intérieure , l'unanimité des débuts n'a pas tardé à se fissurer .
Les partis de gauche -dans l' opposition -commencent à exprimer leur hostilité à la politique gouvernementale, semant le trouble dans l'opinion .
LHIIBiu•.
leader de la Section
favorisée par les appréhensions des milieux financiers internationaux face aux conséquences politiques et économiques de l'occupation de la Ruhr (crise économique allemande, crainte d'une résurgence de l'impérialisme français en Europe ..
.
).
Début 1924, Raymond Poincaré est contraint de procéder à une dévaluation , qui mécontente l'opinion .
Conséquence : le « Bloc national • de droite est défait aux élections législatives de mai 1924 , remportées par le Cartel des gauches.
l'opposition à la politique menée dans la Ruhr a été l'un des thèmes de campagne de cette coalition regroupant les radicaux et les socialistes de la SFIO.
tlloHrrl Herriot accéde à la présidence du Conseil.
Il se dit d'emblée partisan d'une solution négociée et réaliste .
LE l'LAN DAWES La victoire du Cartel des gauches permet de débloquer la situation .
En août 1924 , Herriot accepte les conditions proposées lors de la commission interalliée réunie à Londres par le négociateur américain , CIHirles lhlttfts.
Ce plan réaffirme le principe des réparations mais prévoit une réduction des montants versés au cours des quatre prochaines années , afin de permettre au pays de rétablir son économie dévastée.
Une hypothèque sur une partie du patrimoine industriel allemand (usines, chemins de fer.
..
) garantit les versements .
La France s'engage à se retirer de la zone occupée d1ci une année .
Parole tenue : le général Degoutte rapatriera progressivement ses troupes à partir d'octobre 1924 .
française de _,__ __ l'Internationale LES.._._..._ sum ET RN
ouvrière (SFIO), stigmatise le déficit comptable de l'opération e~ surtou~ dénonce son caractère belliciste.
!:opposition la plus virulente vient cependant du parti communiste français (PCF) -le premier parti de gauche -au nom de la solidarité internationale des travailleurs .
Afin de soutenir ses frères d'outre-Rhin, « pris en otage • par Poincaré, le PCF organise des meetings de solidarité avec les travailleurs de la Ruhr et appelle ses militants à manifester .
Soucieux d'éviter la contestation, le pouvoir n'hésite pas à emprisonner plusieurs députés communistes.
VIOOIIE DU (AKTU DES GAUCHES En cette fin d'année 1923, la France es~ elle aussi, victime d'un mouvement inflationniste -dans une moindre mesure qu'outre-Rhin , certes.
Cette inflation ~ entre autres causes,
Si elle en constitue le point culminant, la crise franco-allemand de 1923 n'a pas mis fin à l'épineux dossier des réparations.
le plan Dawes de 1924 avait été conçu pour une duree de cinq années.
Début 1929, un comité d'expert présidé par l'Américain 0..
..
...,
se réunit donc Il Paris pour fixer les IIOIM!IIes modalités de paiement Les négociations aboutissent ainsi Il l'adoption au mois d'aollt du • plan Young • : le nowel accord prévoit une baisse notable du montant des réparations (17 %) el rééchelonne les versements en ..
.
59 annuités, soit jusqu'en 1988 .
Cette relative mansuélude s'explique,
se solde finalement par une sorte de match nul, sans vainqueur ni vaincu.
Il est peut-être même possible d'affirmer que les deux protagonistes de l'affaire en sont sortis perdants.
Du côté français , cette opération militaire a coOté plus cher qu'elle n'a rapporté, justifiant les préventions d 'un Léon Blum.
Elle a surtout fait comprendre aux dirigeants nationaux que, malgré le prestige de la victoire de 1918 , malgré le staM de première puissance militaire mondiale , la France ne pouvait imposer unilatéralement sa loi à l'ennemi vaincu e~ partan~ à l'Europe .
Affaiblie par le conflit mondial, elle a besoin de ses alliés angle-saxons pour se relever , dans le cadre d'une réflexion collective sur l'avenir du contine~ fondé sur l'arbitrage et le désarmement Les conséquences en sont peut-être plus graves pour l'Allemagne .
1923 fut une annus horribilis pour la jeune république de Weimar , entre crise économique et financière, d'une part et contestation sociale et politique , d'autre part De fait, l'occupation française de la Ruhr sera l'un des éléments qui favorisera la résurgence du nationalisme allemand .
Au final, cet épisode de l'immédiat après guerre est une preuve supplémentaire que si les Alliés ont su gagner la guerre, ils n'ont pas su gagner la paix.
encore une fois.
par une wlonlé de ne pas compromeltre le fragile redressement financier et «onomique allemand, qui ne se remet que doucement de l'ellondrement du marit de 1923.
Signé quelques mois avant le aach de waa Slreel (octobre 1929),1e p1an Young en subira les conséquences à partir de 1931, quand l'Allemagne sera lison tour rallrapée par la crise mondiale.
Une crise qui sera fatale aux bénéficiaires des aéanœs alemandes.
Il commencer par la France : ~ cette date, les paiements seront suspendus.
racœssion au pouvoir de Hitler, deux ans plus tard.
les rendra définilivemenl caducs.
Au tolai,I'AIIemagne n'aura versé en toot et pour loo! que 36 miliards de marks-or de 1919 ~ 1931, au lieu des 132 initialement prévus.
Dans le même temps.
le pays aura reçu pour 33 milliards d'aide étrangère, principalement anglaise et américaine..
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