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Parcours associé Théâtre : Racine, Phèdre, Acte IV, scène 2 (extrait) Analyse linéaire

Publié le 05/01/2023

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« Parcours associé Théâtre : Racine, Phèdre, Acte IV, scène 2 (extrait) Analyse linéaire Introduction : (Les mots-clés autour desquels j’ai bâti cette introduction sont en caractères gras : ce sont les incontournables, c’est ce qu’on attend de vous) On commence par contextualiser en amorçant sur l’auteur et son époque : Lorsque Racine achève Phèdre, en 1677, il est au faîte de son ascension littéraire, commencée avec éclat dix ans plus tôt grâce au triomphe d’Andromaque.

Eclipsant la notoriété de son aîné et rival, Corneille, il s’impose alors comme le plus grand tragédien du Classicisme français. Admirateur des auteurs antiques comme tous les écrivains classiques, il puise son inspiration dans l’imitation de leurs œuvres, jugées infiniment supérieures.

Puis on contextualise l’œuvre : Pour Phèdre, tragédie de la parole, du silence et de l’aveu, c’est à Sénèque et Euripide qu’il emprunte son sujet.

Phèdre, « la brillante » en grec, fille de Minos et de Pasiphaé, est devenue princesse royale d’Athènes en épousant Thésée, le valeureux héros qui délivra la Crète du Minotaure.

Mais lorsque Phèdre arrive à Athènes, Vénus, qui s’acharne contre sa lignée, lui inspire un amour incestueux pour son beau-fils Hippolyte, fils de Thésée.

Elle lutte contre cet amour en s’exilant à Trézène où elle se laisse dépérir, mais la mort présumée de son époux et l’insistance de sa servante Œnone la poussent à l’aveu.

Réfugié lui aussi à Trézène pendant l’absence de son père, Hippolyte, épouvanté par les avances de sa belle-mère, fuit les appartements où elle l’a convoqué, oubliant son épée entre ses mains.

Le retour imprévu de Thésée à l’acte III va précipiter le destin de ces trois personnages : pour sauver sa maîtresse, Œnone prétend à Thésée que c’est son fils, Hippolyte, qui a tenté de la violenter.

Enfin on présente le passage à analyser, en expliquant ce qui se passe : Dans la scène que nous analysons, Thésée, rendu fou de colère par la fausse confidence d’Œnone lors de la scène précédente, se retrouve face à son fils, venu de son côté lui annoncer son amour pour Aricie.

L’hybris du héros tueur de monstres va se déchaîner dans cette scène de colère envers le sensible Hippolyte.

Il ne reste plus qu’à annoncer la problématique et le découpage du texte : Nous nous demanderons donc comment, dans cette scène, un père aveuglé par l’orgueil et la rage scelle irrémédiablement le destin de son fils, et, ce faisant, le sien et celui de Phèdre. Nous analyserons successivement les 3 étapes de ce texte : vers 1 à 9 pour la 1ère partie, vers 10 à 42 pour la 2ème, et enfin vers 43 à la fin. *** Le jour de l’oral, vous avez le choix de commencer par la lecture à voix haute, avant l’intro. Si vous ne l’avez pas encore fait, c’est le moment de lire le texte, ou au moins une partie, selon ce que vous indiquera l’examinateur. *** Partie I : Un quiproquo tragique, prélude au duel père-fils (vers 1 à 9) - Lorsque la scène commence, Thésée et Hippolyte marchent l’un vers l’autre animés par des pensées contradictoires.

Prévenu contre son fils, Thésée veut en découdre ; désireux d’avouer un amour interdit à son père (Aricie est la descendante d’une famille rivale et détestée), Hippolyte s’apprête à faire un aveu courageux à son père.

C’est d’ailleurs par un aparté que commence la scène : la 1ère réplique de Thésée ne - - - - s’adresse pas à Hippolyte mais dévoile sa pensée, formulée tout haut pour nous (= double énonciation). Cette pensée est dominée par le champ lexical de la vue, du dévoilement : « le voici, œil, brille, signes certains, reconnaître » car Thésée voit Hippolyte entrer dans la pièce et marcher vers lui, mais s’étonne du décalage entre ce qu’il croit et ce qu’il voit. Cette surprise se lit dans la ponctuation : points d’exclamation et d’interrogation. L’interjection « Ah ! » et l’apostrophe « Grands dieux ! » (v1) expriment un mélange d’impatience (Thésée s’est préparé à un duel) et de surprise (l’apparente « vertu » de son fils le désarçonne brièvement). Le décalage entre l’apparence d’Hippolyte et ce que croit Thésée (son fils est coupable) se voit aussi dans l’opposition des termes.

D’un côté, l’innocence visible : « noble maintien, brille, vertu, sacré », de l’autre, la culpabilité secrète : « trompé, profane adultère, cœur des perfides humains ». Thésée ne comprend pas (vers 2 et 5) que l’être et le paraître ne coïncident pas et voudrait (« Ne devrait-on pas… ? ») que des « signes certains » le détrompent. Pourtant, il ne s’interroge que peu de temps sur cette incohérence (Hippolyte n’a pas l’air d’un criminel, au contraire, l’innocence « brille sur son front »), et semble ici, paradoxalement, aveuglé par sa rage : il se sent « trompé » par la perfidie de son fils. Cette 1ère réplique met donc en place le quiproquo tragique dans lequel le père et le fils vont s’enfermer. En effet, la 1ère réplique d’Hippolyte, qui amorce réellement le dialogue, scelle ce quiproquo : pas plus que son père, Hippolyte ne devine le motif réel qui les réunit sur scène face à face, et il interprète lui aussi faussement ce qu’il voit sur le visage « auguste » de son père : ce « funeste nuage » v7 lui semble être le signe d’un « secret » douloureux, qu’il invite son père à partager avec lui, son fils respectueux.

La rage de Thésée est perçue comme un simple « trouble », et Hippolyte encourage son père à l’aveu « Puis-je vous demander … ? » v7, « N’osez-vous confier ce secret à ma foi ? » v9.

La rime signifiante « nuage/visage » v7 et 8, exprime avec délicatesse l’inquiétude d’un fils pour son père.

Il est intéressant de noter un effet de calme avant la tempête à cause de ce quiproquo : Thésée s’interroge tout haut et suspend un court instant sa rage au lieu de foncer tête baissée dans le combat, et Hippolyte, qui a quelque chose à avouer, suspend cet aveu pour encourager celui de son père.

Ce faisant, il se jette littéralement dans la gueule du loup, car Thésée prend sa sollicitude pour une insolente provocation : en deux répliques, c’est l’impasse : l’attaque peut commencer. Partie II : L’hybris de Thésée (Tirade de Thésée en entier, vers 10 à 42) Vers 10 à 18 : Le réquisitoire de Thésée - - Cette attaque se caractérise dès le début par un véritable déchaînement verbal, signe de la démesure de Thésée, de son hybris, donc.

Tout d’abord, Thésée lance la joute en reprenant l’adjectif « perfide » v10, en écho au vers 6, puis en donnant une rime restée en suspens au dernier vers de son fils : le nœud tragique s’exprime dans cette rime signifiante « foi/moi ».

En effet, Hippolyte lui propose sa « foi » v9, c’est-à-dire de lui faire confiance, ce qui fait s’étrangler Thésée de rage : « moi ? » v10. Cette rage se lit bien sûr également dans les insultes de Thésée à son fils, soit en début de vers « Perfide, Monstre, Reste impur (c’est-à-dire : déchet) » v10 à 12, soit en fin de vers « ta fureur, une tête ennemie, ton infamie » v15 à 18.

Elle se lit aussi dans la ponctuation exclamative (v15 et 16) et dans les 2 questions rhétoriques, qui ouvrent et - ferment ce 1er mouvement de la tirade.

Par ailleurs, la reprise en chiasme du verbe oser : « oses-tu bien » v10/ « Tu m’oses » v15 souligne son indignation, comme la rime signifiante « horreur/fureur », v13-14. Enfin, Thésée renie son fils.

D’abord en lui rappelant ses crimes : l’inceste « un amour plein d’horreur » v13, « jusqu’au lit de ton père » v14, et le viol « transport/porté ta fureur/infamie » v13-16.

Puis en l’assimilant non à sa lignée glorieuse mais au rang des « brigands » dont il a « purgé la terre » : il lui en aurait donc échappé un, et non des moindres ; et en souhaitant son exil au-delà des frontières du monde connu des grecs : « sous un ciel inconnu » v17, « Des pays où mon nom ne soit point parvenu » v18. Thésée s’étonne d’ailleurs que les dieux n’aient pas encore éliminé le coupable : « qu’a trop longtemps épargné le tonnerre » : il est grand temps qu’il reprenne du service ! Ce faisant, il rappelle à son fils sa propre gloire de héros guerrier, et ricane de la médiocrité de son rejeton : Hippolyte n’est encore que le « fils de », celui qui n’a encore rien accompli… Le tutoiement de Thésée (v10,14,15,16), après le vouvoiement respectueux d’Hippolyte, accentue encore ce mépris. Vers 19 à 30 : La rage de Thésée monte d’un cran - - - - Chez Thésée, la rage semble nourrir la rage, c’est un combustible hautement inflammable, mais qui ne saurait nuire à l’éloquence : en effet, la tirade est magistralement construite.

Après 9 vers qui exposent avec force la situation (début de la tirade), commence ici un 2ème mouvement, qui vise à anéantir psychologiquement Hippolyte. En effet, l’exil, simplement souhaité aux vers 15 à 19, est ici martelé selon un rythme ternaire, en anaphore et à l’impératif : « Fuis, traître », « Fuis », « Fuis, dis-je », aux vers 19, 25 et 29.

Trois autres verbes à l’impératif complètent cet ordre : « Ne viens point » v19, « Prends garde » v27 et « purge » v30.

Tous sont menaçants, comme la violence physique que brandit Thésée aux vers 20 « tenter un courroux que je retiens à peine », et 21 « t’ajoute aux scélérats qu’a punis cette main » : on imagine que sur scène Thésée joint le geste à la parole. Par ailleurs, les insultes se poursuivent « Traître, criminel, scélérat », soulignées par deux rimes signifiantes opposées, celle du fils et celle du père : éternel/criminel, mémoire/gloire.

L’aveuglement de Thésée, débordé par sa rage et son orgueil de héros, est ici manifeste : son fils, sur le front de qui brillait malgré tout « de la vertu.... »

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