L’évolution de la bourgeoisie du 19ème au 21ème siècle

« Empereur des Français.

Cette époque voit alors un développement fulgurant du chemin de fer qui relie désormais les grands centres urbains aux côtes, et notammentles transports entre Paris et Deauville, Carolles, Trouville et d'autres villes de bords de mer.

A côté des établissements de cure, se dressent aussi de luxueuses zonesrésidentielles comme le casino Mauresque d'Arcachon.[pic]Les bourgeois se distinguent donc par un style de vie, une certaine culture (le baccalauréat devint le brevet de la bourgeoisie), mais aussi par un certain confortdévoilé par un habillement spécifique et une domesticité.Nous pouvons reconnaître dans les romans de Zola, notamment Germinal, l'évocation du confort, du luxe et de la sérénité des familles bourgeoises et de leursdomestiques:« La propriété des Grégoire, « la Piolaine », se trouvait à deux kilomètres de Montsou, vers l'est, sur la route de Joiselle.

C'était une grande maison carrée, sans style,bâtie au commencement du siècle dernier.

Des vastes terres qui en dépendaient d'abord, il ne restait qu'une trentaine d'hectares, clos de murs, d'un facile entretien.

Oncitait surtout le verger et le potager, célèbres par leurs fruits et leurs légumes, les plus beaux du pays.

D'ailleurs, le parc manquait, un petit bois en tenait lieu.L'avenue de vieux tilleuls, une voûte de feuillage de trois cents mètres, plantée de la grille au perron, était une des curiosités de cette plaine rase, où l'on comptait lesgrands arbres, de Marchiennes à Beaugnies.Ce matin-là, les Grégoire s'étaient levés à huit heures.

D'habitude, ils ne bougeaient guère qu'une heure plus tard, dormant beaucoup, avec passion; mais la tempêtede la nuit les avait énervés.

Et, pendant que son mari était allé voir tout de suite si le vent n'avait pas fait de dégâts, Mme Grégoire venait de descendre à la cuisine, enpantoufles et en peignoir de flanelle.

Courte, grasse, âgée déjà de cinquante-huit ans, elle gardait une grosse figure poupine et étonnée, sous la blancheur éclatante deses cheveux.- Mélanie, dit-elle à la cuisinière, si vous faisiez la brioche ce matin, puisque la pâte est prête.

Mademoiselle ne se lèvera pas avant une demi-heure, et elle enmangerait avec son chocolat...

Hein! Ce serait une surprise.La cuisinière, vieille femme maigre qui les servait depuis trente ans, se mit à rire.- Ca, c'est vrai, la surprise serait fameuse...

Mon fourneau est allumé, le four doit être chaud; et puis, Honorine va m'aider un peu.Honorine, une fille d'une vingtaine d'années, recueillie enfant et élevée à la maison, servait maintenant de femme de chambre.

Pour tout personnel, outre ces deuxfemmes, il n'y avait que le cocher, Francis, chargé des gros ouvrages.

Un jardinier et une jardinière s'occupaient des légumes, des fruits, des fleurs et de la basse-cour.Et, comme le service était patriarcal, d'une douceur familière, ce petit monde vivait en bonne amitié.

Mme Grégoire, qui avait médité dans son lit la surprise de labrioche, resta pour voir mettre la pâte au four.

La cuisine était immense, et on la devinait la pièce importante, à sa propreté extrême, à l'arsenal des casseroles, desustensiles, des pots qui l'emplissaient.

Cela sentait bon la bonne nourriture.

Des provisions débordaient des râteliers et des armoires.

»Une famille bourgeoise dépensait en moyenne :- Pour le chauffage et la domesticité : 12,3%- Pour le logement : 13,3%-Pour l'habillement : 14,1%-Pour la nourriture : 21,8%-Pour les impôts : 3%-Et pour la santé, transports, loisirs, éducation: 35,5%.La bourgeoisie est aussi une vision de la vie accompagnée d'une sage moralité.

En effet, le mariage bourgeois unissait au 19ème siècle deux familles autant que deuxindividus qui parfois se connaissaient à peine lorsque s'engageaient les tractations.

En voici un exemple : « Henri Monroë, une fois sa licence de droit achevée à Paris en 1842, revient à Lyon, sa ville natale, pour commencer son stage d'avocat.

De nouveau placé sous lacoupe familiale, la grande affaire devient celle de son mariage.

En mars 1844, il peut annoncer à Bailly l'heureux événement:J'épouse Mademoiselle Gavinet fille unique de veuve, appartenant à une des plus honorables familles de Lyon ; elle n'est pas jolie, mais sa figure a une expression dedouceur et de bonté qui charme ; elle a été admirablement élevée ; élevée comme une jeune personne doit l'être pour devenir un jour maîtresse de maison et bonnemère de famille ; elle joint à cette première et précieuse qualité, de l'esprit, un excellent caractère et une grande fortune c'est une des riches héritières de notre ville,vous comprendrez, monsieur, qu'il m'était impossible de rien désirer de mieux, et je bénis la providence d'un bienfait qui doit nous rendre si heureux.Ce mariage s'est noué sous des auspices tellement honorables que je suis fier de vous en parler ; les négociateurs ont été M.

Octave Vincent de Saint-Bonnet avocat,ancien bâtonnier de notre ordre et M.

Serizian vice-président du tribunal civil de Lyon parent lui-même de la famille Gavinet, le nom seul de ces deux hommes étaitune recommandation, il était aussi pour moi une garantie d'honneur que j'acceptais avec gratitude.

Fortune, considération sociale, éducation : tout cela compense largement une beauté qui laisse un peu à désirer et des sentiments à peu près inexistants entre lesjeunes gens.

La fortune du jeune avocat devient considérable.

En 1872, elle est évaluée à 300 000 francs en propre auxquels il faut ajouter 1 100 000 francs enimmeuble et en capitaux lui provenant de son mariage ».b) Regards croisés- La bourgeoisie enviée et copiée par les autres classes sociales La bourgeoisie se distingue par un style de vie spécifique : le non assujettissement au travail manuel, la propriété de valeurs mobilières et immobilières et une aisancede moyens avec un certain « train de vie ».

Elle se définit aussi par l'honorabilité, le prestige et l'attachement à des valeurs morales et sociales traditionnelles et de« savoir vivre » dont la société capitaliste des 19 ème et 20 ème siècles est imprégnée.Les classes moyennes regroupent les petits boutiquiers, les artisans installés à leur compte, les employés de bureau, les commerçants, les petits rentiers, et lesjournalistes dont le nombre augmente.

Leurs revenus sont moins élevés que ceux de la grande bourgeoisie, mais ces classes se distinguent des paysans et des ouvrierspar leur niveau d'instruction et leur volonté d'imiter les modes de vie de la bourgeoisie.

En effet, ils font faire des études à leurs enfants, à l'inverse des ouvriers.

Onles surnomme les « cols blancs ».

Proudhon, célèbre sociologue de l'époque distingue nettement bourgeoisie et classes moyennes.

Il écrivit dans une lettre datant de1850 « La classe moyenne se compose des entrepreneurs, boutiquiers, fabricants, cultivateurs, savants, artistes vivant comme les prolétaires et à la différence desbourgeois, beaucoup plus de leurs produits personnels que de celui de leurs capitaux et propriétés, mais se distinguant du prolétariat en ce qu'ils travaillent à leurcompte, qu'ils ont la responsabilité des pertes de leur état comme la jouissance exclusive des bénéfices, tandis que le prolétariat travaille à gage et moyennantsalaire ».

Les classes moyennes ne sont pas les seules à aspirer à une vie meilleure.

L'inégale industrialisation de l'Europe engendre des flux migratoires : en France,l'immigration belge, polonaise et italienne vient gonfler les effectifs ouvriers spécialisés qui négocient sur le marché du travail leur savoir-faire et un sous prolétariatsaisonnier, ou qui travaillent à domicile, comme les femmes dans le textile.

Au 20ème siècle, avec la diffusion du « taylorisme », le travail s'uniformise, ce quientraîne dans l'entre-deux-guerres, un nivellement de la condition ouvrière.

Les ouvriers ont le sentiment de partager une identité commune et une nouvelle« conscience de classe » émerge.

La menace de chômage est permanente et les crises jettent des familles entières dans la misère.

La condition ouvrière reste marquéepar la précarité : au 19ème siècle les enfants sont souvent mis au travail très jeune et dans les années 1930, les ouvrières parisiennes s'interdisent d'avoir des enfantspour conserver un travail, et ainsi un niveau de vie plus élevé.

Sur toute la période, les conditions de travail s'améliorent néanmoins avec des aides sociales.Grâce à l'avènement du chemin de fer, et à l'accroissement du temps de loisir, l'attrait des stations balnéaires s'exercent sur toutes les classes sociales, et pas seulementsur la bourgeoisie : La venue de « gens de la ville », tant bourgeois qu'ouvriers, nécessite la transformation de petits villages de pêcheurs en centres touristiques : leshôtels, les pensions, centres de cure se multiplient.

Quant à la noblesse, elle adoptait certains usages de la société nouvelle car elle commençait à prendre consciencede la nécessité de s'adapter à un monde nouveau.Dès la Restauration monarchique des Bourbons (période comprise entre la chute du Premier Empire en 1814 et la révolution des « Trois Glorieuses » de juillet. »