Grand Oral du Bac: LE CAPITALISME : UN LIBERAL-DIRIGISME ? - Dirigisme et libéralisme
Publié le 07/11/2018
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Dirigisme et libéralisme ont souvent été opposés mais bien que contradictoires, ces deux tendances historiques du capitalisme au xxe siècle recèlent des caractères communs et complémentaires. Car si les périodes de crises (politique, sociale ou économique) ont favorisé le plus souvent des mesures dirigistes, et les périodes les plus stables le principe libéral classique du « laisser-faire laisser-passer », l'intervention de l'État a toujours coexisté avec le libre fonctionnement du marché.
LE DIRIGISME
Situé en quelque sorte « à mi-chemin » entre socialisme et libéralisme, le dirigisme - ou économie dirigée - est un système économique capitaliste dans lequel l’État, considéré comme le garant de l’intérêt général, intervient de façon directe ou indirecte dans la sphère économique. Écartant le socialisme car respectant et protégeant la propriété privée, le dirigisme se différencie singulièrement du libéralisme puisqu'il contrarie le libre jeu des initiatives individuelles et privées. D’autre part, il possède un caractère « provisoire » : les mesures préconisées sont transitoires et ne sont pas destinées à perdurer. Historiquement, c'est la crise économique de 1929 qui a engendré la forme la plus accomplie de dirigisme tout d'abord aux États-Unis, touchés de plein fouet par le krach de Wall Street. Cette « prise en charge » des structures économiques par l’État révélait une des faiblesses et contradictions du mode de production capitaliste : seul l’État avait les moyens nécessaires pour faire face à une telle défaillance du système libéral.
Dans le même temps, la crise de 1929 avait entraîné ou renforcé la défiance à l'égard du libéralisme en Amérique comme en Europe tandis qu'en Union soviétique, la NEP (Nouvelle économie politique) était abandonnée et une intense vague de collectivisation lancée.
Dans les systèmes capitalistes, le dirigisme fut pour l'essentiel un ensemble de mesures destinées à éviter la menace d'un effondrement économique. On retrouvera une situation comparable au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec la reconstruction.
Système économique hybride, qui satisfait aussi bien ceux qui y décèlent l’ébauche d'un régime socialiste que ceux qui n'y voient qu'une entrave mineure et passagère ou un « moindre mal », le dirigisme a longtemps été plébiscité par l'opinion publique.
Le mercantilisme
S'il a acquis ses lettres de noblesse avec la crise de 1929 et la Seconde Guerre mondiale, le dirigisme a des racines historiques plus anciennes. En effet, l'intervention de l'État au cœur des activités économiques d'un pays fut une pratique couramment utilisée au fil du temps. Dès le xviie siècle, le courant mercantiliste s'était développé en Grande-Bretagne et en France. Réhabilitant l'activité économique tenue pour suspecte pour des raisons morales et religieuses, les mercantilistes (Thomas Mun en Angleterre ou Antoine de Montchrestien en France) défendaient non seulement l'enrichissement individuel mais considéraient également qu'intérêt privé et intérêt de l'État étaient convergents : la puissance d'une nation allant de pair avec celle des marchands, le pouvoir politique devait favoriser le commerce afin d'augmenter la richesse monétaire et le développement industriel du pays.
Jean-Baptiste Colbert, contrôleur général des Finances de Louis XIV, incarna la version française du mercantilisme : estimant qu'il fallait attirer l'or dans le pays afin de stimuler l’activité économique nationale, et constatant que l'industrie française n'était pas en mesure d'accroître les exportations par rapport aux importations, il décida d'encourager le développement économique du pays par une série de mesures qui laissèrent des traces profondes dans l'histoire politique de la France. Sous son impulsion, l'État
«
les échelons économiques et de nombreuses nationalisations ont vu le jour.
Toutefois, si les théses keynésiennes prônaient l'intervention de I'Éta~ elles n'en restaient pas moins de tendance globalement libérale, ce qui peut expliquer en partie les transformations du dirigisme.
Loin de s'opposer, les entreprises privés et l'État sont en effet devenues de plus en plus partenaires.
La haute fonction publique, incarnée en France par un grand commis de l'État tel François Bloch Lain é, s'est profondément transformée après la Seconde Guerre mondiale .
Le premier plan de modernisation et d'équipement (1947- 1951 ) a ainsi mobilisé industriels, hauts fonctionnaires et experts comme leon Monnet , également à l'origine
de la CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier) .
D'autre part, l'État a progressivement mis en place une véritable politique industrielle (« plan calcul » par exemple lancé dans les années 1960).
Il a favorisé des opérations de concentration industrielle et financière dans le but d'insérer l'économie sur les marchés internationaux.
Le dirigisme a ainsi évolué pour devenir de plus en plus volontariste et de moins en moins défensif .
L'interpénétration entre État et marché s'est accentuée.
En France, le phénomène du « pantouflage » (ou le passage de hauts fonctionnaires à la tête des grands groupes privés) s'est progressivement accru et les sociétés d'économie mixte se sont multipliées.
Mais à partir du milieu des années 1980, la tendance s'est en partie inversée :l'État a commencé à se désengager de plus en plus d e secteu rs
d ' activité par la « rationalisation » c'est-à-dire en leur appliquant les mêmes règles de gestion que celles du secteur privé ou en les privatisant.
L'accé lération de la mondialisation commerciale et financière à compter du début des années 1990 n'a fait que renforcer cette tendance.
Les sociétés capitalistes entrent ainsi dans une phase néo-libérale distincte à la fois du libéralisme triomphant du x1x' siècle, de la social-démocratie ou du libéralisme social du xx' siècle.
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Concept à la fois politique et économique, le libéralisme connaît sa consécration à la fin du XVIII' siècle avec la Déclaration des droits de l'hom me et du citoyen.
Au JMr siècle déjà, on peut trouver chez les philo sophes rationalistes tels Descartes
du libéralisme mais la doctrine libérale s'épanouit avant tout avec la philosoph ie des Lumière s en France et l'utilitarisme en Grande-Bretagne.
De son côté, la première école de pensée économique, la Physiocratie (du grec phusis , nature et krotos, pouvoir, autrement dit « pouvoir de la nature ») naît en France au milieu du XVIII' siècle.
Cette école (certains parlent de « secte » et c'est à ce moment que l'on parle pour la première fois des «éco nom istes») a pour fondateur Fronçois Quesnoy.
Auteur du Tableau économique (1758), cet ancien médecin est un homme des Lumières .
Collaborateur de l'Encyclopédie dans laquelle il rédige les articles Fermier et Grains, Quesnay considère que la terre est « la mère de tous les biens » car seule l'agriculture produit plus que ce qui est nécessaire à sa production.
La prospérité d'un « royaume agricole » comme l a France dépend donc de l 'importance du « produit net» dégagé dans l'agriculture , et l'objet des réformes doit être de favoriser l'activité des fermiers (les seuls à l'origine de ce surplus) en la rendant plus p rofitable.
D'où la nécessité de lever les entraves au commerce des produits agricoles et de privilégier avant tout la « classe productive >> (les agriculteurs) plutôt que la « classe stérile >> (les artisans et les commerçants) et la « classe des propriétaires >> (les propriétaires terriens qui perçoivent la rente foncière ) .
Bien que reflétant les caractéristiques d'une économie essentiellement agra ire, la doctrine physiocratique -tout en tombant assez rapidement dans l'oubli -eut une influence très importante sur le libéralisme économique et sur l'école classique incarnée par l'économiste et philosophe britannique Adam Smith .
Sa métaphore de la « main invisible >> utilisée dans Recherches sur la nature et les causes de la riches se des nations (1776), illustrant la capacité d'un marché de libre concurrence à assurer la compatibilité mutuelle des intérêts privés et de ce fait la prospérité générale de toute une nation , est au cœur de la théorie libérale.
LES PRINCIPES DE BASE DU LIBÉRALISME Les notions de liberté et de responsabilité individuelles forment donc le socle du libéralisme économique.
Le système le plus efficace est ainsi celui qui garantit le libre jeu des initiatives individuelles et l e fonct ionnement spontané du marché .
L'Homo œconomicus, est un être égoïste, certes, mais aussi rationnel.
Comme l'écrit Adam Smith, «ce n'est pas de la bienvei llance du boucher , du marchand de bière ou du boulanger , que nous attendons notre dîner , mais bien du soin qu'ils apportent à leurs intérêts.
Nous ne nous adressons pas à leur hum anité, mais à leur égoïsme; et ce n'est jamais de nos besoins que nous leur parlons, c'est toujour s de leur avantage>>.
Autrement di~ les échange s effectués sur tel ou tel marché , s'ils sont volontaires, ne peuvent se faire que si les différentes parties en présence y voient leurs intér êts propres et en tirent chacune des bénéfices .
Les libéraux encouragent la concurrence car elle permet de faire correspondre qualité des produits et besoins des consommateurs et participe ainsi à la stabilisation des prix.
En second lieu, la division du travail ou la spéciolisotion des trovoilleurs ,
des usines ou des pays -considéré par Adam Smith comme la cause principale de la richesse des nations - est néce ssaire car elle est une source d'accroissement de la productivité.
Enfin , souhaitant la libre entreprise et donc l'atté nuation des réglementations, le libéralisme n'accorde à l'État qu'un rôle réduit qui peut toutefois se transformer en un interventionnisme légèrement plus soutenu lorsque les conditions économiques eVou socia les l'imposent.
LE TOURNANT LIBÉRAL DES ANNÉES 1980 A partir du milieu des années 1970, on assista à un tournant libéral assez fort dans certains pays, notamment au Royaume Uni à partir de 1979 avec la victoire deMorgoret Thotcher .
Son gouvernement entreprit de remodeler l'économie dans un sens plus libéral.
Après avoir brisé l'influence du mouvement syndical, il engagea un vaste programme de privati sations, valorisa la notion de profit et réduisit le poids de l'État.
Le Royaume-Uni retrouva alors un taux de croissance supérieur à ceux de ses concurrents européens .
Ces succès économiques expliquent en partie la victoire de la Dame de fer lors des élections générales de 1983 et, dans une moindre mesure , de 1987.
Mais ce libéralisme avait ses limites : la dégradation des grands services
sociaux (santé, éducatio n ) et la politique fisca le, symbolisée par l'impopulaire poli tax (taxe sur les loyers ) suscita l e mécontentement des classes moyennes , soutien traditionnel du parti conservateur, tandi s que la politique économique laissait de côté un nombre croissant de pauvres ou de « nouveaux pauvres >>.
Plus tard, le gouvernement travailli ste de Tony Blair a tenté moins de revenir sur le libéralisme thatchérien que d'en compenser les effets par quelques mesures sociales (instauration d'un salaire minimum, de trois semaines de congés payés) et par la priorité donnée à la réforme de secte urs tels
Ce qui fut baptisée la
« Reaganomics >> désigne une politique d 'ultralib éralisme économique et de désengagement de l'État dans les secteurs sociaux.
Les inéga lités et la misère s'accrurent : en 1988, le pays comptait 35 million s de pauvres (contre 18 millions en 1981) .
Si ces politiques ont donné des résultats mitigés et si elles ont été en partie sanctionnées politiquement, elles se situent dans un vaste mouvement de privatisation et de déréglementation , comme en témoigne notamment l'acco rd général sur le commerce des
serv ices, (AGCS ou GATS en anglais) signé à l'issu du cycle dei'Uroguoy (1986-1994) de I'OMC.
LIBÉRALISME, LIBRE-ÉCHANGE ET MONDIALISATION En plaçant le concept de liberté au cœur des processus économiques, le libéralisme a considérablement bouleversé les écha nges et entraîné une modification radicale de la conception de frontière.
En effet, a lors que le mercantilisme , le colbertisme ou plus encor e, le protectionnisme limitent l 'espace économique à la nation et prônent donc le contrôle ou la limitation des importations par des barrières douanière s, le libéralisme défend la libre circulation des marchandises et des personnes, et, plus récemment , des capitaux.
Le privilège accordé aux exportations plutôt qu'aux importations n'est pas compatible avec la division du travail et l'allocation optimale des ressources .
L es restrictions imposées aux importations doivent être assouplie s ou supprimées .
Le principe du« laisser-faire laisser -passer >> tient une place fondatrice (il s'agit d'une expression des économistes
physioc rates) et toujours fondamentale dans la pensée libérale .
C'es t ainsi que l e l ibéra lisme gagnant du terrain , des zones de libre-échange ont peu à peu été mises en place entre différents États.
C ette ère de libre -échange s'est ouverte en 1846 , lorsque l'Angleterre abo lit les corn laws (lois sur les blés ) qui prot égea ient le prix du blé sur le marché angla is grace à des tarifs douaniers et s'est poursuivie avec le traité franco-anglais de libre-éc hange en 1860 .
Aprés des phases de repli protectionniste (à la fin du XIx' siècle, et entre les deux guerres mondiales particulièrement) , le libre-échange a été relancé après 1945 et institut ionnalisé au sein du GATT puis de I 'OMC.
En prônant la suppression des frontières économiques et le libre échange, le libéralisme veut encourager et favoriser le multilatéralisme des échanges .
Il constitue sans aucun doute , l'un des principau x moteurs de la mondiali sation et de la globa lisation des échanges.
Pour autant, le dévelop pement d'Internet- indice d'une mondialisation des échanges, de plus e n plus virtuels - a engendré davanta ge de dirigi sme.
Les États sont en e ffet confrontés à un flux d'informations et d'échange s qu'ils doive nt réguler et contrôler (sites pédophiles , négationnistes, extrémistes, etc.) .
LA PLAC E ET LE R6LE DE i.'tTAT DANS LE LIBÉRALISME S'il existe quelques courants intransigeants minoritaires jugeant que l'économie devrait se passer entièrement de I'Éta~ la plupart des libéraux tendent à penser que l'État doit malgré tout tenir un rôle qui aurait pour fina lit é d' aboutir à un marché de type libéral et à terme , de le préserver.
L'État« veilleur de nuit >> ou « gendarme >> a selon eux, une mission d'observation et de régulation.
En effet, les intérêts individuels et le libre fonctionnement du marché doivent certes prédominer mais les agents économiques sont néanmoins tenus de respecter un certa in nombre de règles sans lesquelles le système ne peut fonction ner.
À cet égard, les libéraux dema ndent à l'État de prévenir certains abus et de sanctionner si nécessaire le contrevenant.
Ainsi « l'abus de position dominante >> ou la concurrence déloyale peuvent être combattus.
D'autre part, les libéraux reconnaissent que l 'interve ntion mesurée et restreinte de l'État permet de créer des biens et donc des échanges qui n'existeraient pas sans elle : les biens collectifs.
Non seulement l'État demeure indispensable dans ce secte u r « indivisible >> mais il est une des cond itions de la reproduction et de la stabilité du système libéral.
Enfin, conscients des imperfections des marchés, les libéraux comptent sur un État fort et efficace pour pallier ces défaillances ..
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