René Caillié
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
CAILLIÉ
IJgg-r838
RENt CAILLit est le fils d'un bagnard.
Au moment où il vient au monde à Mauzé, le
r 7 novembre r 799, son père, boulanger de profession, entre, non loin de là, pour n'en plus
sortir,
au bagne de Rochefort : lourdes· suites d'une obscure histoire de vol insignifiant, greffée
sur de malencontreux exploits d'ivrogne.
C'est
à Rochefort, avec sa mère, qu'il passe les douze
premières années de sa vie; puis,
quand celle-ci meurt, il rentre à Mauzé où, ses brèves études
terminées,
il devient, sans goût, par la volonté d'un oncle, cabaretier et son tuteur, apprenti
cordonnier.
Peut-être le
malheur infamant qui frappe les siens est-il à l'origine d'un certain
repliement sur lui-même,
d'un désir passionné de réhabilitation par un exploit à sa portée;
encore faut-il
que le terrain s'y prête.
Quel que soit le moment où il commence à penser à Tombouctou, en juin 18 r 6, pour gagner
le Sénégal, il
s'embarque comme domestique d'un officier.
Par un bienheureux hasard, au lieu
de
monter sur la Méduse dont le naufrage est resté célèbre, il prend place sur la Loire dont le
voyage s'accomplit sans histoire.
Sitôt arrivé ou presque,
il apprend qu'en Gambie une expédition
anglaise
se prépare, une fois de plus, à pénétrer à l'intérieur des terres.
La bourse vide, il quitte
Saint-Louis à pied
pour la rejoindre, s'arrête épuisé à Gorée et échoue finalement à la Guade
loupe.
Il
n'y reste guère.
Par le détour de Mauzé, il revient en Afrique, réussit cette fois à rejoindre
la mission anglaise et participe, après son échec, à son lamentable retour (r819).
Malade, il rentre
en France.
Au bout de quelques années, un commerçant bordelais lui facilite une nouvelle instal
lation
à Saint-Louis (1824).
Nous approchons du grand voyage, mais nous n'y sommes point
encore.
Pensant
partir de chez les Maures Brakna pour s'enfoncer au cœur du continent, il va
vivre près d'un an de leur vie.
Mais désespérant d'obtenir des autorités françaises le concours
pécuniaire
qu'il juge alors nécessaire, il renonce à son plan et offre ses services aux Anglais.
Ceux
ci lui confient, au Sierra-Leone, la direction d'une fabrique d'indigo, mais restent sourds à ses
projets d'exploration.
Il les quitte alors et, sans appui officiel, sans bruit, gagne enfin Kakondy,
à l'entrée du Rio Nuiiez (1827).
Il est à pied d'œuvre.
Voilà dix années qu'il piétine, semble-t-il,
mais
qu'il assure, en fait, le succès de son entreprise.
Il comprend qu'un voyageur riche, chrétien, européen sera assassiné ou pour le moins ran
çonné jusqu'à épuisement et refoulé.
Déjà il n'a pu séjourner chez les Maures Brakna qu'en se
donnant pour un Français désabusé aspirant à se convertir à l'Islam.
Désormais, il se dit musul
man : né à Alexandrie, ce qui doit justifier la couleur de sa peau, la religion qu'il prétend professer
et
la route poursuivie, il est un esclave des chrétiens évadé ou libéré que les soldats de Bonaparte,
lors de l'expédition d'Egypte,
ont ravi en son jeune âge et qui cherche à regagner sa ville natale.
Vêtu en musulman, pourvu au départ d'une médiocre pacotille et de trois cents francs soigneu
sement dissimulés, vivant plus enéore de dons et d'hospitalité, il progresse presque
jusqu'au bout
en s'agrégeant à des troupes successives de commerçants.
Que de dangers malgré son expérience,
son subterfuge
et ses précautions! Il est à la merci d'une maladresse de sa part, de la curiosité.
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