La comédie (fiche de culture générale)
Publié le 17/01/2022
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LA TRAGI-COMEDIE
Introduit en France par Robert Gamier
(Bradamante, 1582), le genre est tres
a la mode dans la premiere moitie du
xvir siecle (Hardy : la Force du sang, 1626 ; Rotrou : l'Hypocondriaque,
1628).
Ses plus beaux fleurons sont
la Tempete de Shakespeare (1611),
La vie est un songe de Calderon (1635)
et le Cid de Corneille (1637).
Pratiquant le mélange des genres,
elle met en scene des sujets flirtant
avec le romanesque et connaissant
gendralement un denouement
heureux...
mais pas toujours :
Belisaire de Rotrou se termine par
la mort du hems (tandis qu'une pure
tragedie comme Cinna de Corneille finit
bien).
La frontiere entre comedie et
tragedie est floue dans la tragi-comedie.
Cymbeline ou Troilus et Cressida de
Shakespeare sont des tragedies non
depourvues de comique ; quanta sa
sombre Mesure pour mesure, elle n'a
de comedie que le nom.
Trois cents ans
plus tard, en France, la creation
de la « comedie herdique » Cyrano
de Bergerac (1897) d'Edmond Rostand
(1868-1918) verra le triomphe d'un
theatre oir le rire ne craint pas remotion.
en mdlant les genres : les pieces
philosophiques y cotoient les comedies de cape et d'epee,
le merveilleux, les
satires sociales, les
pieces bibliques,
les comedies
d'intrigue...
La
comedia culmine
avec ['oeuvre
gigantesque de
Lope de Vega
(1562-1635) -
mille huit cents pieces (9, plus un
Nouvel Art de faire des comedies
(1609) - et celle de Calderon de la
Barca (1600-1681), qui maltrisent tous
les genres.
La comedie au sens courant
est plus specifiquement defendue par
Francisco de Rojas Zorrilla (1607-1648)
qui en ecrit une soixantaine, Ruiz de
Alarc6n (1581-1639), dit «le Terence
espagnol», et Tirso de Molina (v.
1583-
1648), auteur du fameux El burlador
de Sevilla (le Trompeur de Seville et
le Convive de pierre, v.
1625).
Ce chef-
d'oeuvre lance le mythe de Don Juan
qui connaitra une belle fortune au
theatre, a ['opera, au cinema...
En France, le
prestige du
theatre est tel que
des ecrivains non
dramaturges s'y
essaient, comme
Paul karma
(1610-1660),
('auteur du
Roman comique, qui - deux cents ans
avant le Capitaine Fracasse - narre les
aventures d'une troupe de comediens
dans lodeleL le maitre-valet (1645).
Cyrano de Bergerac (1619-1655)
s'adonne lui aussi
A la comedie avec
le Pedant joue
(1654), dont
Moliere se
souviendra dans
ses Fourberies de
Scapin.
Un pur
dramaturge
DE LAS COME DIAS
comme Jean de Rotrou (1609-1650)
compose avec une belle fantaisie des
comedies imitees des Latins (les Sosies, 1636, d'apres l'Amphitryon de Plaute),
des Espagnols (la Bogue de I'oubli,
1632, d'apres Lope de Vega ; les Deux
Pucelles, 1636, d'apres Cervantes) et
des Italiens (la Sceur, 1645, d'apres
Della Porta a qui Moliere empruntera,
lui, les repliques en pseudo-turc du
Bourgeois gentilhomme).
CORNEIUE (1606-1684)
Cet immense auteur de tragedies
debute au theatre avec une comedie
(Melite, 1629).
Quatre autres vont
suivre en deux ans : la Veuve et la
Galerie du Palais (1632), la Suivante
et la Place royale (1633), couronnees de succes.
Apres
un detour par
la tragedie de
Medee, Pierre
Corneille revient
a ses premieres
amours avec
comique (1636).
C'est le
triomphe du Cid la mdme armee qui
rentrainera sur la voie tragique (a
('exception de deux dernieres comedies
en 1643 et 1644: le Menteur et la Suite
du Menteur).
Contrairement a Racine
- qui se frottera une fois au comique
(les Plaideurs, 1668) avant de retrouver
la tragedie qui lui convient mieux -
Corneille a un vrai sens de la comedie,
comme le prouve l'Illusion comique ou
son Matamore, haut en couleur et fort
en gueule, couronne avec éclat la
longue tradition du soldat fanfaron.
MOLIERE (1622-1673)
Son nom seul (un nom de theatre
que s'est choisi Jean-Baptiste Poquelin)
symbolise la grande comedie classique.
Quinze annees durant, depuis les
Precieuses ridicules en 1659 jusqu'au
Malade
imaginaire en 1673 (il meurt
en sortant de
scene), Malian
enchaine une
collection de
chefs-d'oeuvre qui
font de lui le plus
grand auteur comique de la litterature mondiale.
Directeur de troupe et de
theatre, metteur en scene, prodigieux
comedien comique, it tree ses propres
pieces et s'attaque a tous les travers avec
un humour et une finesse psychologique
qui, les siecles passant, font toujours
mouche.
II compose aussi bien des
comedies legeres (le Medecin malgre lui)
ou grincantes (George Dandin) que
des comedies de mceurs satiriques
(les Precieuses ridicules, les Femmes
savantes) ou des comedies-ballets cheres
A Louis XIV (le Bourgeois gentilhomme).
II signe trois chefs -d'oeuvre de haute
yoke : le Misanthrope, Dom Juan et
le Tartuffe, interdit deux fois en 1664 et
1667 pour sa virulence contre les faux
devots, et dont il ne reste que la derniere
version de 1669.
DES LUMIERES AU ROMANTISME
La succession de Moliere est difficile...
Le comedien Dancourt (1661-1725) s'y
attelle pourtant avec energie, auteur
d'une centaine de pieces aujourd'hui
oublides.
Le romancier Alain Rene
Lesage (1668-1747) livre a la scene une satire des financiers qui fait date :
Turcaret (1709).
Les pieces de Jean-
Francois Regnard (1655-1709) sont
reussies (le Legataire universe!, 1708),
mais sans atteindre la profondeur
psychologique de celles de Moliere.
II
faut attendre Marivaux et Beaumarchais
pour voir revivre la grande comedie.
Moumux (16116-1763)
II axe son theatre sur ('observation
psychologique de ['amour, en particulier
('amour naissant, plus propre a la
comedie avec ses jeux de seduction.
Marivaux prete a ses amoureux un
badinage raffine auquel it laisse son
nom : le marivaudage.
Its sortent
vainqueurs de tous les obstacles.
Ce Triomphe de !'amour (titre de ('une
de ses meilleures pieces) &late des
son premier succes : Arlequin poll
par l'amour (1720).
Les epreuves qui
attendent ses hems dechires entre le
&sir et la peur d'avouer leur flamme
hantent la Surprise de l'amour (1722),
la Double Inconstance (1723) ou le
Prince travesti (1724).
Son art culmine
dans les annees 1730 avec le Jeu de
ramour et du hasard (1730) et les
Fausses Confidences (1737).
BEAUMARCHAIS (1732-1799)
Deux chefs-d'oeuvre assurent sa gloire.
Le sujet du Barbier de Seville (1775) est
simple et tient dans son sous-titre, la
Precaution inutile : le barbon Bartholo
tient enfermee sa jeune pupille Rosine
pour la garder pour lui (on reconnalt
le theme de l'Ecole des femmes de
Moliere), mais le comte Almaviva la lui
vole grace aux ruses de l'inventif Figaro (le valet de comedie a son apogee).
L'originalite tient a la vivacite des
dialogues, au rythme endiable des
peripeties et A ('atmosphere de joyeuse
fantaisie.
La piece qui fait suite, le
Ma fiage de Figaro (1784), est plus
enlevee encore (comme I'annonce
son sous-titre : la Folk Journee)
mais aussi plus riche et plus complexe.
Les deux pieces fugurent en bonne
place au pantheon des classiques
de la comedie francaise.
Immortalisees
par les musiques de Rossini pour la
premiere, Mozart pour la seconde, elles
sont aussi des piliers du repertoire de
('opera- comique dans le monde entier.
Entre Marivaux et Beaumarchais,
le theatre italien volt paraitre deux
dramaturges comiques de premier
plan.
Carlo Goldoni (1707-1793) -
Moliere italien» - sort la comedie du
cadre etroit de la commedia dell'arte
et remplace ses bouffonneries par de
piquantes etudes de caractere.
II brosse
une etonnante galerie de portraits au fil
d'une bonne centaine de comedies dont
les plus connues sont regulierement
reprises de nos jours : la Locandiera
(1753), les Rustres (1759), la trilogie
de la Villegiature (1762).
Carlo Gozzi
(1720-1806) no pose en defenseur de
Ia commedia dell'arte et compose des
pieces qui jouent sur le merveilleux.
Ses
deux meilleures feeries servent de livrets
a des operas : !Amour des trois oranges
(1761, adapte par Prokofiev en 1921)
et Turandot (1762, mis en musique par
Busoni en 1925 et par Puccini en 1926).
LIPOQUEROMMODQUE
Le temps n'est plus A la separation des
genres et les auteurs n'hesitent pas a
meter le drame au comique.
A ('inverse
du theatre de Marivaux, celui d'Alfred de Mussel (1810-1857) n'est pas abonne
au « happy end» : le jeu de la comedie
est au rendez-vous avec son ton Leger,
ses malentendus, ses deguisements
mais it n'empeche pas les Caprices de
Marianne (1833) et On ne badine pas
avec ('amour (1834) de finir mat.
Ailleurs, dans A quoi revent les jeunes
filles ? (1832) ou fine faut jurer de rien
(1836) par exemple, la touche poetique,
la merveilleuse legerete du dialogue, la
jeunesse reveuse des personnages font
oublier qu'on danse sur un ablme.
En Allemagne, en Russie, la satire vire
au noir.
Heinrich von Kleist (1777-1811)
applique a la comedie le theme
tragique d'ffdipe roi de Sophocle
(le detective decouvrant qu'il est, lui,
('assassin qu'il traque) : la Cruche
cos& (1803) met en scene le proces
A rebondissements d'une tentative
de viol oil le vrai coupable n'est autre
que le juge.
Rare rayon de soleil dans
sa vie et son oeuvre, Amphitryon (1807)
est une version personnelle de la piece
de Moliere (comme au siècle suivant
Giraudoux avec Amphitryon 38...
ainsi denomme parce qui! a recense
trente-sept comedies anterieures sur
le sujet I).
Georg Richner (1813-1837)
ecrit sa seule comedie, Leonce et Lena,
sur le theme de ('ennui, en 1836, entre
deux tragedies aussi desesperees
que la Mort de Denton et Woyzeck,
quelques mois avant de disparaltre
alors qu'il n'a que 24 ans.
La meme
armee, le jeune Nicolas Gogol
(1809-1852) donne au theatre russe
le Revizor, detonant melange
de realisme satirique et de !lye
fantastique, creant un univers
angoissant comme un cauchemar.
DU VAUDEVILLE AU BOULEVARD
Dans les annees 1820-1850, Eugene
Scribe (1791-1861) regne sur la scene
parisienne pour laquelle it ecrit trois
cent cinquante pieces, livrets d'opera
et - surtout - vaudevilles.
La comedie
de vaudeville (divertissement reposant
sur les bons mots, les quiproquos et
autres rebondissements) a la faveur
du public qui en redemande sous le
Second Empire.
Eugene Labiche (1815-
1888) en compose de remarquables,
comme rendiable Chapeau de paille
d'Italie (1851) et rlrresistible Voyage
de M.
Perrichon (1860), chef-d'oeuvre
de drOlerie et de psychologie.
FEYDEAU (1862-1921)
Dans Monsieur chasse (1892), le
Dindon (1896), Un fit c) la patte (1894),
la Dame de chez Maxim (1899), La
main passe (1904), la Puce er !Oreille
(1907), On purge bebe (1910) et tant
d'autres, Georges Feydeau porte le
vaudeville a sa perfection, donnant
des pieces petillantes mais aussi Idgeres
comme des operettes d'Offenbach.
Loin de se demoder, son theatre ne
au xor siecle et qui connalt son apogee
a la Belle Epoque recele un Ude retro
qui ajoute encore a son charme : les
reprises de ses pieces, A la Comedie
franoaise ou ailleurs, connaissent
un succes qui ne se dement pas.
Georges Courteline (1858-1929)
&nonce plaisamment dans ses
meilleures pieces, la Paix chez soi
(1903) et surtout Boubouroche (1893 -
armee du triomphe de Madame Sans-
Gene, amusante comedie de mceurs
sur fond historique de son end Victorien Sardou), les travers de la vie
conjugale.
Un theme dont Sacha Guitry (1885-1957) fera ses delkes entre les
deux guerres : Mon Ore avail raison
(1920), Desire (1927), le Nouveau
Testament (1935)...
Des Les annees
1930, sans pour autant delaisser
la comedie Oilson esprit fait des
efincelles, Guitry se tourne vers le
cinema, comme Marcel Pagnol (1895- 1974) dont les triomphes au theatre
(Topaze, 1928 ; Marius, 1929 ; Fanny,
1931) sont vice fixes sur la pellicule.
Le tendre Jean de la lune de Marcel
Achard (1899-1974) est lui aussi pork A Moran peu apres sa creation en 1929,
comme Pest en 1933 l'illustre Knock
de Jules Romains (1885-1972), cruelle
et hilarante satire de la medecine et des manipulateurs, creee sur scene dix ans
plus t8t.
Le theatre de boulevard est
une entreprise de pur divertissement,
mais le meilleur y c6toie le pire,
comme le prouve la quake des
comedies d'un Jacques Deval (Tovarich,
1930), d'un Jean Anouilh (le Bal des
voleurs, 1938) ou dun Andre Roussin
(la Petite Hutte, 1947), pour ne titer
que trois auteurs deja Presque
« dassiques ».
Plus recemment, des
pieces a succes comme la Cage aux
folks (1973) de lean Poiret, avec Michel
Serrault, le Diner de cons (1993) de
Francis Veber, Cuisine et dependences
(1993) d'Agnes Jaoui et Jean-Pierre
Bacri, Art de Yasmina Reza (1998),
Cravate club de Frederic Jardin (2001)
ou Un petit jeu sans consequence
(2002) de Jean Dell et Gerard Sibleyras
montrent que ('art bi-millenaire
de la comedie est bien vivant.
L'ANTI- COMEDIE
II existe une forme d'anti-comedie
Mt Ia farce cotoie le tragique et ou
le grotesque &nonce rabsurdite du
monde : c'est le theatre de Jerry (Ubu
roi, 1896), d'Apollinaire (les Mamelles
de Tiresias, 1917), de Pirandello (Six
personnages en quete d'auteur, 1921),
de Genet (les Bonnes, 1947), d'Adamov
(Parodie, 1949), de Vian (les Batisseurs
d'empire, 1957)...
Fascine par le theatre
de marionnettes qui represente si bien
A ses yeux le derisoire de la condition
humaine, Michel de Ghelderode met en
scene des heron fantoches, des pantins
mus par un dentin incomprehensible.
Son Barabbas (1929) evoque la Passion
du Christ a I'envers, vue non plus par
les Evangelistes, mais par la lie de
I'humanite.
Libere a la place de Jesus,
le criminel Barrabas ne comprend pas
sa grace qui signifie la mine a mort dun
juste.
L'Innocent et le Coupable periront
finalement en metre temps.
Le non-
sens de la vie, rincommunicabilite entre
les etres inspirent des pieces acides
comme Huis dos de Sartre (1944) ou
Caligula de Camus (1945) avant d'offrir
A ranti-comedie ses plus beaux fleurons
avec les chefs-d'oeuvre de lonesco (la
Cantatrice chauve, 1949 ; les Chaises,
1951) et de Beckett (En attendant
Godot, 1953; Oh, les beaux fours, 1961)..
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