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Cours français

Publié le 02/06/2014

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Thème 5 : Les Français et la République Chapitre 9 : La République, trois républiques Introduction : Depuis la Révolution française, nombreux sont les hommes politiques français à la recherche d'un système politique stable, pérenne, capable d'être accepté par la plus grande majorité des Français. Cette recherche explique la multitude de régimes que connaît le pays à partir de 1789 : monarchies, empires, républiques, tous plus ou moins libéraux et/ou autoritaires, se succèdent jusqu'à la chute du Second Empire, le 4 septembre 1870. Est alors fait le choix d'un nouveau régime, républicain, qui apparaît pourtant très contesté, non seulement à cause de l'opposition nette d'une partie de la classe politique monarchiste ou bonapartiste, mais aussi à cause de la division entre les républicains eux-mêmes. Les premières années de la IIIe République sont donc des années de questionnement et de combat pour les républicains, qui doivent définir ce qu'est pour eux la République afin d'assurer le fonctionnement de ses institutions et d'éviter qu'elle ne disparaisse. Progressivement, une idée clé se met en place : en France, seule la République1 peut incarner la démocratie2. La victoire de la République est donc aussi celle de la démocratie, ce qui explique que, depuis 1870, ce système politique n'a véritablement été remis en cause qu'une seule fois, entre 1940 et 1944. Cependant, la République n'est pas figée : trois systèmes successifs (IIIe, IVe et Ve Républiques) ont été appliqués en France en un siècle et demi, ce qui montre bien l'importance des débats politiques, encore présents aujourd'hui, autour des valeurs de la République et de la démocratie. Problématique : Quel est le caractère complexe de la République en France et comment ce modèle s'est-il enraciné depuis les années 1870, sans pourtant être exempt de crises et de remises en cause ? I. L'enracinement de la culture républicaine dans les décennies 1880-1890 : Comment l'enracinement de la culture républicaine contribue-t-il à rendre incontournable la République en France dans les années 1880-1890 ? A. Une République minoritaire dans les années 1870 : Documents à utiliser : discours de Léon Gambetta du 9 octobre 1877, document 2 p. 303. Document 1 : L'éloge du suffrage universel et du système républicain : Aujourd'hui, citoyens, si le suffrage universel se déjugeait, c'en serait fait, croyez-le bien, de l'ordre en France, car l'ordre vrai - cet ordre profond et durable que j'ai appelé l'ordre républicain - ne peut en effet exister, être protégé, défendu, assuré, qu'au nom de la majorité qui s'exprime par le suffrage universel. (Très bien ! très bien ! - Bravo ! bravo !) Et si l'on pouvait désorganiser ce mécanisme supérieur de l'ordre, le suffrage universel, qu'arriverait-il ? Il arriverait, Messieurs, que les minorités pèseraient autant que les majorités ; il arriverait que tel qui se prétendait investi d'une mission en dehors de la nation, d'une mission que l'on qualifierait de providentielle, en dehors et au-dessus de la raison publique, que celui-là irait jusqu'au bout, puisqu'on lui aurait donné la permission de tout faire jusqu'au bout... 1 Forme d'organisation politique dans laquelle les détenteurs du pouvoir l'exercent en vertu d'un mandat conféré par le corps social - en ce sens « république » s'oppose à « monarchie », mais ne se confond pas avec « démocratie », dans l'hypothèse, par exemple, d'une restriction du suffrage -, 2 Fondé sur la valorisation de l'individu et sur l'égalité juridique, l'idéal démocratique moderne émerge à l'aube du XVIIIe s. d'une nouvelle conception de l'homme dans laquelle celui-ci, libre et doué de volonté autonome, n'est plus soumis à la divine Providence. La liberté est définie comme une faculté inhérente à la personne humaine et se réalise pleinement à travers la reconnaissance de droits naturels, inaliénables et sacrés. 1 Thème 5 : Les Français et la République Chapitre 9 : La République, trois républiques Mais, Messieurs, il n'est pas nécessaire, heureusement, de défendre le suffrage universel devant le parti républicain qui en a fait son principe, devant cette grande démocratie dont tous les jours l'Europe admire et constate la sagesse et la prévoyance, à laquelle, tous les jours, de tous les points de l'univers, arrivent les sympathies éclatantes de tout ce qu'il y a de plus éminent dans les pays civilisés du monde. Aussi bien, je ne présente pas la défense du suffrage universel pour les républicains, pour les démocrates purs ; je parle pour ceux qui, parmi les conservateurs, ont quelque souci de la modération pratiquée avec persévérance dans la vie publique. Je leur dis, à ceux-là : Comment ne voyez-vous pas qu'avec le suffrage universel, si on le laisse librement fonctionner, si on respecte, quand il s'est prononcé, son indépendance et l'autorité de ses décisions, - comment ne voyez-vous pas, dis-je, que vous avez là un moyen de terminer pacifiquement tous les conflits, de dénouer toutes les crises, et que, si le suffrage universel fonctionne dans la plénitude de sa souveraineté, il n'y a plus de révolution possible, parce qu'il n'y a plus de révolution à tenter, plus de coup d'État à redouter quand la France a parlé ? (Très bien ! très bien ! Applaudissements.) C'est là, Messieurs, ce que les conservateurs, c'est là ce que les hommes qui, les uns de bonne foi, les autres par entraînement et par passion, préfèrent le principe d'autorité au principe de liberté, devraient se dire et se répéter tous les jours. C'est que, pour notre société, arrachée pour toujours - entendez-le bien - au sol de l'ancien régime, pour notre société passionnément égalitaire et démocratique, pour notre société qu'on ne fera pas renoncer aux conquêtes de 1789, sanctionnées par la Révolution française, il n'y a pas véritablement, il ne peut plus y avoir de stabilité, d'ordre, de prospérité, de légalité, de pouvoir fort et respecté, de lois majestueusement établies, en dehors de ce suffrage universel dont quelques esprits timides ont l'horreur et la terreur, et, sans pouvoir y réussir, cherchent à restreindre l'efficacité souveraine et la force toute puissante. Ceux qui raisonnent et qui agissent ainsi sont des conservateurs aveugles ; mais je les adjure de réfléchir ; je les adjure, à la veille de ce scrutin solennel du 14 octobre 1877, de rentrer en eux-mêmes, et je leur demande si le spectacle de ces cinq mois d'angoisses si noblement supportées, au milieu de l'interruption des affaires, de la crise économique qui sévit sur le pays par suite de l'incertitude et du trouble jetés dans les négociations par l'acte subit du seize mai, je leur demande si le spectacle de ce peuple, calme, tranquille, qui n'attend avec cette patience admirable que parce qu'il sait qu'il y a une échéance fixe pour l'exercice de sa souveraineté, n'est pas la preuve la plus éclatante, la démonstration la plus irréfragable que les crises, même les plus violentes, peuvent se dénouer honorablement, pacifiquement, tranquillement, à la condition de maintenir la souveraineté et l'autorité du suffrage universel. (Profond mouvement.) Je vous le demande, Messieurs : est-ce que les cinq mois que nous venons de passer auraient p...

« Thème 5 : Les Français et la République Chapitre 9 : La République, trois républiques 2 Mais, Messieurs, il n'est pas nécessaire, heureusem ent, de défendre le suffrage universel devant le parti républicain qui en a fait son princ ipe, devant cette grande démocratie dont tous les jours l'Europe admire et constate la sagesse et la prévoyance, à laquelle, tous les jours, de tous les points de l'univers, arrivent les sympathi es éclatantes de tout ce qu'il y a de plus éminent dans les pays civilisés du monde.

Aussi bie n, je ne présente pas la défense du suffrage universel pour les républicains, pour les démocrates purs ; je parle pour ceux qui, parmi les conservateurs, ont quelque souci de la mo dération pratiquée avec persévérance dans la vie publique.

Je leur dis, à ceux-là : Comment n e voyez-vous pas qu'avec le suffrage universel, si on le laisse librement fonctionner, s i on respecte, quand il s'est prononcé, son indépendance et l'autorité de ses décisions, – comm ent ne voyez-vous pas, dis-je, que vous avez là un moyen de terminer pacifiquement tous les conflits, de dénouer toutes les crises, et que, si le suffrage universel fonctionne dans la pl énitude de sa souveraineté, il n'y a plus de révolution possible, parce qu'il n'y a plus de révo lution à tenter, plus de coup d'État à redouter quand la France a parlé ? (Très bien ! très bien ! Applaudissements.) C'est là, Messieurs, ce que les conservateurs, c'es t là ce que les hommes qui, les uns de bonne foi, les autres par entraînement et par passion, pr éfèrent le principe d'autorité au principe de liberté, devraient se dire et se répéter tous les j ours.

C'est que, pour notre société, arrachée pour toujou rs – entendez-le bien – au sol de l'ancien régime, pour notre société passionnément égalitaire et démocratique, pour notre société qu'on ne fera pas renoncer aux conquêtes de 1789, sanctio nnées par la Révolution française, il n'y a pas véritablement, il ne peut plus y avoir de stabi lité, d'ordre, de prospérité, de légalité, de pouvoir fort et respecté, de lois majestueusement é tablies, en dehors de ce suffrage universel dont quelques esprits timides ont l'horreur et la t erreur, et, sans pouvoir y réussir, cherchent à restreindre l'efficacité souveraine et la force tou te puissante.

Ceux qui raisonnent et qui agissent ainsi sont des conservateurs aveugles ; ma is je les adjure de réfléchir ; je les adjure, à la veille de ce scrutin solennel du 14 octobre 1877 , de rentrer en eux-mêmes, et je leur demande si le spectacle de ces cinq mois d'angoisse s si noblement supportées, au milieu de l'interruption des affaires, de la crise économique qui sévit sur le pays par suite de l'incertitude et du trouble jetés dans les négociations par l'act e subit du seize mai, je leur demande si le spectacle de ce peuple, calme, tranquille, qui n'at tend avec cette patience admirable que parce qu'il sait qu'il y a une échéance fixe pour l'exerc ice de sa souveraineté, n'est pas la preuve la plus éclatante, la démonstration la plus irréfragab le que les crises, même les plus violentes, peuvent se dénouer honorablement, pacifiquement, tr anquillement, à la condition de maintenir la souveraineté et l'autorité du suffrage universel .

(Profond mouvement.) Je vous le demande, Messieurs : est-ce que les cinq mois que nous venons de passer auraient pu maintenir l'union, l'ordre, la concorde, l'espér ance et la sagesse, laisser à chacun la force d'âme nécessaire pour ne pas céder à la colère, à l 'indignation, aux mouvements impétueux de son cœur, si chacun n'avait pas eu la certitude que le 14 octobre il y aurait un juge, et que, lorsque ce juge se serait exprimé, il n'y aurait pl us de résistance possible ?...

(Vive approbation et bravos prolongés.) C'est grâce au fonctionnement du suffrage universel , qui permet aux plus humbles, aux plus modestes dans la famille française, de se pénétrer des questions, de s'en enquérir, de les discuter, de devenir véritablement une partie prena nte, une partie solidaire dans la société moderne ; c'est parce que ce suffrage fournit l'occ asion, une excitation à s'occuper de politique, que tous les conservateurs de la Républi que devraient y tenir comme à un instrument de liberté, de progrès, d'apaisement, de concorde.

C'est le suffrage universel qui réunit et qui groupe les forces du peuple tout enti er, sans distinction de classes ni de nuances dans les opinions.

Léon Gambetta, discours devant l’assemblée national e, 9 octobre 1877.. »

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