ZOLA: NANA (Fiche de lecture)
Publié le 22/11/2010
Extrait du document
«Ce carnaval des dieux, l'Olympe traîné dans la boue, toute une religion, toute un poésie bafouée, semblèrent un régal exquis. La fièvre de l'irrévérence gagnait le monde lettré des premières représentations ; on piétinait sur la légende, on cassait les antiques images.« «Elle était là chez elle, le poing à la taille, asseyant Vénus dans le ruisseau, au bon du trottoir.«
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créer un lien entre ces deux univers apparemment aussi éloignés que la Terre peut l'être du Soleil, il invente Nana.La trajectoire de la fille de Gervaise et de Coupeau part du taudis de la Goutte-d'Or et la mène dans un hôtelparticulier de l'avenue de Villiers, où elle s'établit, «rentière de la bêtise et de l'ordure des mâles».
Elle est devenuela maîtresse du comte Muffat, chambellan de l'empereur Napoléon III.
Entre-temps, à la vitesse d'une comète, Nana a parcouru tous les échelons de la société, dont elle révèle la soif dejouissances faciles et la profonde corruption.
Zola observait d'un oeil sans complaisance le relâchement moral duSecond Empire.
Paris devient l'image de cette dépravation, dont Nana est en quelque sorte le symbole.
Dès le début du roman, lespectacle Blonde Vénus, qui fait découvrir Nana au grand monde, proclame avec éclat que les dieux sont morts.
«Ce carnaval des dieux, l'Olympe traîné dans la boue, toute une religion, toute un poésie bafouée, semblèrent unrégal exquis.
La fièvre de l'irrévérence gagnait le monde lettré des premières représentations ; on piétinait sur lalégende, on cassait les antiques images.»
Cette frénésie iconoclaste prélude au triomphe de Nana :
«Elle était là chez elle, le poing à la taille, asseyant Vénus dans le ruisseau, au bon du trottoir.»
Blonde Vénus est une féroce parodie des opérettes d'Offenbach, l'un des artiste; les plus fêtés de l'époque, que Zola haïssait.
Il y voyait la victoire de la bêtise et de la vulgarité sur cette poésie authentique que plus personne nerespectait.
À la place des anciennes valeurs, de la beauté et de la morale, se dresse la nudité provocant( de l'idoledes temps modernes, la femme vénale, qui se vend au plus offrant.
L( théâtre des Variétés est la cathédrale de cenouveau culte, qui rassemble, sous se lustres tapageurs, une «cohue d'hommes aux lèvres sèches, aux yeuxardents, tout brillants encore de la possession de Nana».
«Paris entier va défiler à votre théâtre>, dit aimablementun critique au directeur.
Mais celui-ci le reprend pour lui lance' crûment cette vérité :
«Dis donc à mon bordel, bougre d'entêté !»
Parti de ces coulisses, le mal se répand dans Paris à la vitesse de l'éclair, el gagne bientôt le sommet de la pyramidesociale.
Il se glisse dans le salon de la comtesse Muffat, dont la demeure respire «une mélancolie de couvent».
«On entrait dans une dignité froide, dans des moeurs anciennes, un âge disparu
exhalant une odeur de dévotion.»
Mais, tandis que les dames, frileusement rassemblées autour de la cheminée, parlent religion et fournisseurs, leshommes, à voix basse, se passent le mot : demain, chez Nana !
«Et l'on aurait cru, à les voir cravatés et gantés de blanc, qu'ils traitaient en phrases choisies quelque sujet grave.»
La gangrène du vice s'insinue partout et brasse dans une fraternité suspecte toutes les classes sociales.
Muffat, ledévot Muffat, finit par installer la petite théâtreuse dans un somptueux hôtel particulier.
Éclate alors le scandale quel'hypocrisie mondaine avait jusqu'alors réussi à dissimuler.
La courtisane a pris la place du directeur de conscience.Elle ne se contente plus de parader et de jouer à la femme chic.
Elle règne sur l'esprit du comte, auquel elle imposecomme gendre l'un de ses anciens amants.
Elle règne sur Paris.
Elle a pris la stature d'un mythe.
«Ce fut l'époque de son existence où Nana éclaira Paris d'un redoublement de splendeur.
Elle grandit encore àl'horizon du vice, elle domina la ville de l'insolence affichée de son luxe, de son mépris de l'argent qui lui faisaitfondre publiquement les fortunes.»
2.
«LA MOUCHE D'OR»
Nana n'est pas seulement le pendant social de L'Assommoir (le premier titre montrant la décomposition d'une société par la luxure, le second la déchéance du monde ouvrier par l'alcool).
L'ampleur du roman dépasse la simplevisée sociologique, et même le but «moral» que Zola dit s'être fixé.
Nana est une incarnation terrifiante de lapourriture et de la mort.
La «blonde Vénus» aux cheveux d'or est une créature maléfique dont le pouvoir érotiqueest un pouvoir de mort.
Elle est «la mouche d'or», selon la formule que Zola met sous la plume de l'un despersonnages du roman, un journaliste.
«Avec elle, la pourriture qu'on laissait fermenter dans le peuple remontait et pourrissait l'aristocratie.
Elle devenaitune force de la nature, un ferment de destruction [...] corrompant et désorganisant Paris entre ses cuisses deneige.»
Un peu plus loin, se trouve la comparaison qui fait de Nana l'emblème du Second Empire, par le détournementironique de l'abeille choisie par Napoléon: «Une mouche couleur de soleil, envolée de l'ordure, une mouche qui prenaitla mort sur les charognes tolérées le long des chemins, et qui, bourdonnant, dansante, jetant un éclat de pierreries,empoissonnait les hommes rien qu'à se poser sur eux, dans les palais où elle entrait par les fenêtres.»
Mais Nana, qui apparaît à son amant comme «une bête d'or», «toute velue, et dont l'odeur seule gâtait le monde»,.
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