WACE : sa vie et son oeuvre

WACE (XIIe siècle). Auteur anglo-normand, il fut chanoine de Bayeux après 1165 et servit les ducs de Normandie. Son œuvre, rédigée pour la plus grande partie en couplets octosyllabiques (à l’exception de certains éléments du Roman de Rou), comprend des poèmes historiques ou pseudohistoriques (Roman de Brut, Roman de Rou) et des poèmes hagiographiques (Vie de sainte Marguerite, Conception Nostre Dame, Vie de saint Nicolas). Ces derniers sont essentiellement des traductions de Vies latines. Dans la Vie de sainte Marguerite, le style de Wace est encore dépouillé : pas d’interrogations oratoires, pas de rhétorique pompeuse, pas de redondances. Mais il évolue peu à peu : l'introduction devient prologue, les ornements apparaissent en même temps que les explications d’auteur. Dès la Conception Nostre Dame se manifeste l’un des procédés caractéristiques de l’œuvre à venir : la répétition immédiate d’une même phrase. La Vie de saint Nicolas voit fleurir la juxtaposition de synonymes, souvent soulignée par des allitérations (« Et desconfit et despesçat », vers 362). L’apostrophe à l’auditeur devient également plus fréquente. Surtout, on y constate pour la première fois (mais est-ce volontaire?) le procédé de la brisure du couplet d’octosyllabes (le second vers du couplet se rattachant syntaxiquement au couplet suivant, ou le premier au précédent). Cette nouveauté est encore rare : on sait que Chrétien de Troyes passe pour en être sinon l’initiateur, du moins le premier divulgateur.

Wace atteint vraiment sa maturité poétique avec ses deux œuvres historiques. Le Roman de Brut est une adaptation de l’Historia regum Britanniae de Geoffroi de Monmouth; son importance pour l’histoire littéraire est considérable, puisqu’il s’agit du premier texte roman consacré — en partie seulement — à la légende arthu-rienne [voir Arthur et la légende arthurienne]. A cette source principale s’ajoutent quelques textes sacrés et, sans doute, les Gesta regum Anglorum de Guillaume de Malmesburv; mais on peut supposer que Wace avait également connaissance de traditions (orales? écrites?) sur le roi Arthur et sur la Table ronde, pour la première fois mentionnée dans notre littérature.