Voyages de Gulliver
Publié le 10/04/2013
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Les idées et l'ironie politiques de cet ouvrage ont incité Swift à le publier, non sous son nom, mais sous celui de son héros Gulliver, à Londres en 1726. Sympson, cousin imaginaire de Gulliver, se serait chargé des démarches auprès de l'éditeur et aurait établi le texte. Il existe d'ailleurs une lettre de Gulliver (retiré dans son cottage) à Sympson, lui reprochant les nombreuses libertés prises avec son journal. Cependant, on ne fut pas dupe et on reconnut rapidement la plume de Swift, qui ne fut pas inquiété pour avoir écrit ces Voyages philosophiques.

«
1 1! f ..
«U n stardral, ou
écuyer du roi, vint
ordonner à mon maître
de
m'amener sur ie-champ à la cour pour le divertissement de
la reine et de toutes
ses
dames.»
EXTRAITS
L'effet des pistolets, devenu
banal pour nous, est renversant
pour les Lilliputiens
Après quoi, il voulut voir un de mes «piliers
creux
en fer », désignant par là mes pisto
lets de
poche.J'en tirai un et sur sa de
mande lui expliquai du
mieux que je pus à quoi
cela servait,
puis je le
chargeai, mais seule
ment à poudre (la
mienne était restée
sèche, grâce à
la pré-
caution que
prend
tout marin expéri
menté de la tenir tou
jours dans une saco
che hermétique).
Je
recommandai à
l' Em-
pereur de ne
pas
prendre peur, et je tirai
en l'air.
L'effet en fut
bien plus terrible que
n'avait été la vue de mon
sabre ; des centaines de sol
dats, comme foudroyés, tombèrent à
la ren
verse, et même le Prince , qui pourtant était
resté ferme sur ses jambes, mit quelques ins
tants à reprendre ses esprits.
Gulliver éteint l'incendie du palais
selon une technique toute rabelaisienne
Ce magnifique Palais allait être réduit par
le feu jusqu'au sol, lorsque soudain, avec
une présence
d'esprit qui ne m'est pas
habituelle , j'eus l'idée d'une solution :
j'avais bu la veille de grandes quantités
d'un vin délicieux appelé Glimigrin (les
Blefuscudiens l'appellent Flunec, mais le
nôtre est plus apprécié) qui est très diuré
tique.
Et par le plus grand hasard, je n'avais
pas encore vidé ma vessie.
En m'approchant
ainsi des flammes et en travaillant dur à les
éteindre,
je m'échauffais tellement que le vin
commença à opérer :
j'eus envie d' uri
ner ; et
je le fis si abondamment et en visant
si juste qu'en trois minutes le feu était noyé.
Et le reste de ce noble édifice, qui avait
coûté tant de siècles de travail,fut préservé
de la ruine.
Chez les géants, Gulliver n'est jamais,
à cause de sa taille, vraiment pris
au sérieux
Déjà auparavant, il m'avait joué un tour
pendable, qui avait
bienfait rire la Reine ,
tout en la mécontentant beaucoup ; elle était
prête à congédier son nain sur-le-champ,
mais j'avais eu la générosité de demander
sa
grâce; Sa Majesté avait
pris un os à moelle,
l'avait
vidé dans son assiette,
puis l'avait replacé de
bout dans le plat, où
elle
s'était servie.
Le
nain, qui avait guetté le
moment où Glumdal
clitch * allait vers la
desserte, grimpa sur le
tabouret
d'où elle me
servait et, me saisissant
à deux mains tout en
.
maintenant mes jambes
serrées, il m'enfonça
jusqu'à la taille dans
l'os, où
je restai coincé,
dans une posture
fort
ridicule.Je crois qu'il se passa
bien une minute entière
avant qu'on
s'aperçût de mon sort, car j'eusse trouvé
indigne de
moi de pousser des cris.
Heureusement , comme les Princes mangent
rarement chaud,
je ne fus pas brûlé, mais
mes bas et pantalon sortirent de là en
piteux
état.
* Sa jeune protectrice
Traduction
de Jacques Pons
« La reine prenait
plaisir à causer avec
moi de mes voyages
et ne laissait aucune
occasion de me
distraire
quand j'étais mélancolique ...
»
NOTES DE L'ÉDITEUR « Homme du monde et poète, il a inventé la
plaisanterie atroce, le rire funèbre, la gaieté
convulsive des contrastes amers.
( ...
)
Philosophe contre toute philosophie, il a
créé l'épopée réaliste, parodie grave, dé
duite comme une géométrie, absurde
comme un rêve, croyable comme un conte,
avilissante comme un torchon posé en guise
de couronne sur la tête
d'un dieu.
»
Hippolyte Taine, Histoire de la littérature
anglaise,
1863.
noir,
comme le véritable initiateur.
»
André Breton, Anthologie del' humour noir,
Sagittaire, 1940.
« Le savant Doyen (Swift) s'inquiète
qu'on puisse croire que ses récits de
voyages soient une simple fiction sortie de
son propre cerveau
et laisse, en tout cas, à
ses lecteurs judicieux et candides , le soin de
rétablir cette matière comme
il leur plaît ,
c'est-à-dire de substituer l'esprit à la lettre.
»
Eugène Canseliet, L' Hermétisme dans la
vie de Swift et dans ses voyages, Éditions
Fata Morgana, 1983.
« Tout le désigne, en matière d'humour
1 Jonathan Swift par Burford (1744) / Edimédia 2, 3, 4 lithographies de A.
Robida, Henri Lauren s é dite ur, Pari s, 1928 / D .R .
« Swift écrivit avec une grande simplicité,
pour être compris du peuple, spécialement
de son peuple d'Irlande.
Mais si la destinée
voulut
qu'il fit figure de conteur pour
enfants devant la postérité, il fut aussi un
profond politique et
l'un des plus grands
critiques de mœurs.
»Préface anonyme,
Le Conte du tonneau, Swift, Bibliopoli s,
1911.
SWIFr0 2.
»
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