Vie D'UN SIMPLE (la), d'Émile Guillaumin
Publié le 22/05/2019
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Vie D'UN SIMPLE (la), roman d'Émile Guillaumin (1904). C'est la première fois que la vie rurale, avec ses ruses, sa grandeur et sa complexité, se trouve directement évoquée par un paysan. Amoureux d'une terre qui ne lui appartient pas, un métayer, le père Tiennon, né en 1823, ne s'intéresse qu'incidem-ment à tout ce qui n'est ni sa vie ni la vie de sa terre. Mêlant étroitement ces deux « vies », Guillaumin donne à la paysannerie, au-delà de tous les « réalismes », une dimension et une résonance inconnues jusqu'alors en littérature.
«
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)GUILLAUMIN Émile
(1873-1951).
Émile Guillaumin,
à l'aube du xx• siècle, a bouleversé la tradition du roman
rustique français, devenu, grâce à lui, l'expression du
paysan par lui-même et pour lui-même.
Né à la ferme
de la Neverdière, près d'Ygrande (Allier), Guillaumin
trouva assez de ressources dans ses seules études primai
res pour dire la vie de l'exploitant agricole qu'il devait
rester toute sa vie.
Il refusa résolument et les peintures
idylliques qu'affectionnaient les successeurs de George
Sand et les noirceurs inspirées par la Terre de Zola.
Ainsi naquirent, sous la plume d'un écrivain-laboureur
qui aborda la littérature à «journée faite», « les mains
avivées des morsures de la paille�·.
les Tableaux cham
pêtres (1901), scènes réalistes inspirées par la suite des
saisons, puis les Mémoires du métayer Tiennon Bertin,
que Stock publia en 1904 sous le titre la Vie d'un simple.
La perplexité de son entourage n'eut d'égale que la sur
prise ravie des notables parisiens, dont l'un, Daniel
Halévy, fit le voyage d'Ygrande pour découvrir la singu
larité de cet auteur inconnu.
Le récit de la vie d'un
paysan au XIX" siècle, la dénonciation de l'exploitation
des journaliers et des métayers du Centre eurent un reten
tissement qui gagna jusqu'au parlement, et qui incita
Guillaumin à poursuivre son œuvre romanesque avec
Près du sol ( 1905), Rose et sa Parisienne (1 907), la
Peine aux chaumières ( 1909), Baptiste et sa femme
(19 10), puis à l'élargir en développant le syndicalisme
rural.
Devenu une sorte de Cincinnatus littéraire respecté
et écouté, Guillaumin fit montre jusqu'à sa mort d'une
activité inlassable.
Son œuvre eut des échos bien au-delà
des frontières françaises, en Allemagne, aux États-Unis
et au Japon en particulier, en raison de 1' exemplarité
de sa vie et de l'authenticité de son témoignage sur la
condition paysanne française.
La Vie d'un simple offre un miroir sans apprêt des
travaux ruraux, de l'existence quotidienne d'une famille
paysanne.
Elle en suit les événements, les déménage
ments, la peine jamais assez mise en lumière; elle expose les
rudesses d'une vie fruste, les incertitudes des récol
tes, les tracasseries des rapports avec le propriétaire.
Les
faits et jugements de ce récit à peine romancé sont d'une
étonnante pertinence.
L'écrivain va à l'essentiel, que
celui-ci tienne à la précision d'un détail, à la réticence
d'une parole ou à l'embarras d'une démarche.
Il dit sur
le même ton la joie d'une belle récolte et la résignation
à l'inévitable.
Héritier de Charles-Louis Philippe, son
ami, auquel il consacra un volume (Charles-Louis Phi
lippe, mon ami, 1942), comme d'Eugène Le Roy, dont
Jacquou le Croquant l'avait fortement impressionné,
Guillaumin, avec la Vie d'un simple, occupe pourtant
dans la littérature rustique une place où, selon Ja formule
de Maurice Genevoix, il est « indispensable et seul».
Le syndicalisme, forme concrète de 1' action sociale
entrevue, l'accapara à partir de 1908.
Guillaumin épaula
Michel Bernard, qui avait fondé les premiers syndicats
agricoles, et raconta avec objectivité son « aventure»
dans le Syndicat de Baugignoux ( 1912).
Il se tourna enfin
vers le journalisme et collabora aux Primaires, au Tra
vailleur rural, à Pages libres, mais aussi à des revues ou
journaux parisiens comme la Revue des Deux Mondes
et l'Humanité (ancienne formule).
Enfin, il appuya les
tentatives des paysans qui s'efforçaient de s'exprimer,
dans un volume paru posthumement, Paysans par eux
mêmes (1953).
Sa correspondance, inédite à ce jour, est
considérable.
Guillaumin a pleinement assumé la voca
tion d'éducateur social à laquelle il s'était senti appelé.
Avec des ouvrages comme A tous vents sur la glèbe
(1931), Sur l'appui du manche (1949), il a laissé l'image
d'un sage, justifiée par son sens de la mesure, le pragma
tisme de ses vues, sa volonté de ne pas se dérober à ses
responsabilités.
Inclinant au socialisme (voir Six Ans de
luttes syndicales, articles du Travailleur rural, réunis en
1977), il ne se départit jamais, cependant, d'une attitude
prudente, jugeant les hommes à leur efficacité plus qu'à
leurs promesses ou à leurs principes.
Passionné d'éman
cipation mais soucieux de la discipline ancestrale, il
estima que «le mieux social ne p(ouvait) être que la
résultante de l'effort individuel généralisé».
Son pres
tige ne cessa de grandir et sa personnalité retint l' atten
tion des historiens, des sociologues comme des critiques
littéraires, tous intrigués par l'étonnante fécondité d'une
œuvre qui contribua grandement à une évolution décisive
de la paysannerie française au xx• siècle..
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