VICTOR ou les Enfants au pouvoir (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
Publié le 06/11/2018
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VICTOR ou les Enfants au pouvoir. Pièce en trois actes et en prose de Roger Vitrac (1899-1952), créée dans une mise en scène d'Antonin Artaud à Paris à la Comédie des Champs-Élysées le 24 décembre 1928, et publiée à Paris chez Gallimard la même année.
Pour ses neuf ans, Victor Paumelle, fils « uni que » à tous points de vue, tant son intelligence, son langage et sa taille sont au dessus de son âge, a décidé de devenir quelque chose de « neuf». L'enfant modèle commence par briser un vase de Sèvres et menace la bonne, Lili, de l'accuser du fo rfait : même s'il avoue, ses parents refuse ront de le croire. La jeune Esther Magneau lui raconte la scène galante qu'elle surprit entre Thé rèse, sa mère, et Charles Paumelle, le père de Victor. Comme pris d'un délire soudain, Victor déclame, parodiant les stéréotypes surréalistes
«
12
42 1 VICTOR
( « Les fleurs changent de panache.
Les trou
peaux se défrisent.
Les forêts s'écartent.
Dix mil
lions de mains s'accouplent aux oiseaux.
Chaque
trajectoire est un archet »), et accuse Esther
d'a voir cassé le vase.
Thérèse s'inquiète pour son
mari, Antoine, frappé de démenc e.
Victor encou
rage la fo lie d'Ant oine et entre de plain pied dans
le monde du démen t en ravivant, Petit Larousse
à l'appui, son obsession de la guerre de 1870.
Puis il mime, avec Esther, la scène rapportée plus
haut, et.
devant les parents atterrés, demande au
génér al Lonségur, un ami de la fam ille, de faire
le che val (Acte 1).
Au salon, Charles et Thérèse
cons tatent amèremen t que les enfants les ont
tr ahis.
Victor surgit, toujours déclamant ce qu'il
prétend être sa proc haine rédacti on.
Émilie Pau
melle prend son mari à partie : l'a tmosphèr e se
dégrade.
Apparaît alors l'étrange Ida Mortemart,
affligée de la mala die du pétomane.
Elle fait fuir
Esther dans le jardin et tous se préc ipitent pour
l'em pêcher de se noyer dans le bas sin.
On la
ram ène ensangl anté e.
Ant oine rentre chez sa
fe mme et sa fille.
Demeuré seul avec son épous e,
Charles lui lit /e Matin (l'édition de la pièce repro
dui t de véritab les coupur es d e presse) pour
re tard er la scène de ména ge qui poin t (Acte Il).
Tr ès lasse, Émilie lui pardonne son infidéli té.
Souff rant d'un atroce mal de ventre, Victor ne
parvient pas à s'en dormir : ses cris ponc tuent le
di alogue de ses parents, affligés par le vent de
fo lie qui souffle alentour .
Appa raît Thérèse à la
re cher che d'Est her ; on appr end que son mari
s'est suicidé.
Victor à l'a gon ie meur t avant d'avoir
pu révéler à ses parents les « ressorts de I'Uni
qua t » (Acte Ill).
Ap rès avoir quitté le groupe surréa
liste, Vitrac fonda avec Artaud le théâ
tre Alfred-Jarry, association peu conf or
miste dont le principal titre de gloire
fut précisé ment la création de Victor.
Cette deuxième pièce de Vitrac (après
les Mys tères de l'amour, 1926 ) fit scan
dale.
Centrée sur le point de vue des
deux enfants, trop grands (à la lettre,
puisque Victor mesure 1,80 rn au lever
du rideau, et 2 rn au dénouement) pour
leur âge, elle dénonce l'abjection des
adultes et heurte le sens logique des
spec tateurs avec la même force, le
même humour macabre que l'on trou
vera plus tard chez un Ionesco.
Enfant prodige
voué à l'autodestruction, Vic
tor -tout comme la petite Esther, que
sa mère à la moindre occasion gifle à
tour de bras - désigne la nostalgie de
l' enfance menacée qui hante l'auteur.
Par opposition, le monde des parents
s' impose comme le lieu de la conven
tion et de l'absurde.
Charles trompe
Émilie avec Thérè se et ces turpitudes
bourg eoises sont comme redoublées
par l'irrup tion de la malheureuse Ida
Mor temart : le corps grotesque de la
visiteu se défie l'ordre rationnel appa
rent ; il représente l'élément morbide
mais aussi la force de mort qui fait écla
ter le cadre étroit et convenu d'un
repas d'annivers aire.
Ida incarne la
figure moquée de l'amour et souffle
l' haleine puante du néant.
Parodiant la
co médie de Boulevard, Vitrac sème un
vent de folie sur la scène : la dynami
que de l'action est, en effet, portée par
la montée du délire , soit objectif chez
Antoine, soit mimé par Victor, dans la
durée même de la représentation théâ
tra le.
Dans cet affolement progressif de
l'intrigue, l'ordre familial n'est bientôt
plus qu'un vernis qui s'écaille à la
faveur d'une cons tante mise en abyme
destinée à dégrader l'image des adul
tes : les enfants parodient la scène
surprise entre les deux amants, Victor
copie les attitudes et le ton de ses
pa rents, et s'acharne à ridiculiser
l' image de l'héroïsme en contraignant
le général à jouer les bouffons ou en
stimulant les effets dévastateurs de la
guerre de 187 0 sur l' esprit d'Antoin e.
Ainsi, Victor réitère la comédie
humaine : il la met lui-même en scène.
Cette dénonciation de la mo rale so
ciale se double d'une remise en cause
des conventions théâtrales : alors que
la tension entre les Paumelle et les
Magneau est à son comble, seule l'arri
vée d'Ida Mor temart ( « Le miracle ! >>,
commente Victor) permet au dialogue
de se poursuivre.
Se moquant des pré
tendues grandes personnes -alors que.
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