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UNE SAISON DANS LA VIE D'EMMANUEL. Roman de Marie-Claire Blais (résumé et analyse de l'oeuvre)

Publié le 27/10/2018

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UNE SAISON DANS LA VIE D'EMMANUEL. Roman de Marie-Claire Blais (Canada/Québec, née en 1939), publié à Montréal aux Éditions du Jour en 1965. Prix Médias 1966.

 

Né sans bruit par un matin d'hiver, Emmanuel écoute la voix de sa grand mère : « Elle semble diriger le monde de son fauteuil. » C'est un bien mauvais moment pour naître, la famille n'a jamais été aussi pauvre. La mère est silencieuse, le père violent. tandis que la grappe d'enfants s'accroche aux jupes de grand mère Antoinette : jean le Maigre, tuberculeux qui lit frénétiquement et écrit des poèmes, le Septième, voleur aux cheveux orange et qui boit, les petites A (Héléna, Maria... ), les grandes A (Aurélia, Anita, Anna), et puis Pomme, Alexis, Héloïse qui sort du cou vent - seize en tout -, et tant d'autres qui sont morts. Jean le Maigre et le Septième s'enferment dans la cave pour boire. jean le Maigre est envoyé au noviciat (chap. 1-3). Il tousse et crache le sang. Bientôt cloué au lit, il écrit son autobio graphie : « Dès ma naissance... mon regard brillait

« déjà d'un feu som bre et tourmenté.

» Incendiaire et suicidaire, il a hérité de l'ex emple de son frère Léopold qui s'est pendu dans sa robe de sémi na riste.

À l'école, M.

le cur é avait appris à jean la géogr aphie, l'orthogr aphe, et il laissait traîner dans la ma ison ses versions grecques, ses fables, ses tragé dies, que le pèr e faisait dispara?tre à mesur e dans les latri nes.

Avec le Sep tième, il avait aimé Marthe, la petite bossue, puis mis le feu à l'école avant de partir pour la maison de correction où il avait été enfermé dans une cel­ lule réservée aux pyromanes.

Cette nuit là, jean le Maigre meurt tandis qu'Héloïse se consume en d'étranges noces.

Grand mèr e Ant oine tte, Pom me et le Sep tième arrivent au nov iciat, pour entendre la me sse dite à la mémoir e de jean.

Hé loïse, après un demier regard sur le berceau où dort Emmanue l, quitte la maison (4 5).

Depuis la mort de Jean, grand-mère Antoine tte, mue tte, est plongée dans la lect ur e des manus crits laissés par le poète.

Pomme et le Sep tième sont placés comme apprentis en ville (6).

Hél oïse, qui travaille chez Mme Octavie à l' auberg e de la Rose, écrit chaque jour à grand­ mèr e Ant oinette à qui elle prétend être cuisi nièr e, et envoie de l'ar gent pour Pomme hospita­ lisé, qui a perdu ses doig ts dans une machine de la man ufacture où il trav aille avec le Sept ième.

Une saison s'est écoulée dans la vie d'Emmanuel.

Grand mèr e Ant oine tte le tien t dans ses bras et lui murmur e à l'oreille que le print emps sera beau (7).

L'univers romanesque de Marie­ Claire Blais est celui des déshérités : petits paysans pauvres, drogués, enfants des villes, artistes ratés, etc.

Plutôt qu'une intrigue, Une saison dans la vie d'Emmanuel livre des « tranches de vie>> d'une famille qui n'est située ni dans le temps ni dans l'espace.

Plu­ sieurs points de vue gouvernent le récit : celui de grand-mère Antoinette, celui de Jean le Maigre, celui d'Emma­ nuel, et des voix différentes se croisent, orchestrées alternativement par le nar­ rateur et Jean le Maigre, pour former cette parabole familiale où chacun des membres de la tribu vient à son tour sur le devant de la scène raconter et commenter l'événement.

Grand-mère Antoinette domine l'en- semble du roman.

C'est elle qui a dis­ pensé la vie à l'origine de cette famille, c'est elle qui accorde la nourriture, le nom du baptême, la sécurité et les sanctions.

Elle semble là depuis l'éter­ nité, inaltérable.

L'âge lui a conféré la sagesse, la liberté et l'autorité.

Abritant sous ses jupes une nichée d'enfants, elle figure à la fois la mère paysanne et la Sainte Mère des litanies.

Elle fédère, rassemble, intègre les valeurs et fait res­ pecter les rites.

Mais elle échoue à maintenir la cohésion familiale autour d'elle.

Figure valorisée d'une sorte de matriarcat rural, elle incarne la nostal­ gie d'une structure familiale unitaire au moment où le Québec connaît l'éclatement de la famille tradition­ nelle et la rupture des liens avec la terre.

Jean le Maigre, lui, est en quelque sorte le héros, à la fois triomphateur et malheureux.

Il meurt, victime du combat pour la lucidité, mais laissant derrière lui la victoire de son texte.

S'il descend bien aux enfers , c'est visible­ ment le seul chemin de la libération, et si Antoinette possède le faire, Jean le Maigre possède le dire, il dispense la poésie.

Une saison dans la vie d'Emmanuel périme l'image parentale : la mère, «toujours épuisée et sans regard», est absente, fantomatique ; quant au père, borné et indifférent, il « chasse ses enfants dès qu'ils ne se nourrissent pas tout seuls comme des hommes».

Aucun des personnages ne se révolte ouvertement contre les réalités fami­ liales, matérielles, sociales.

Chacun s'accommode de la circonstance, au besoin par l'acte clandestin.

Cette sai­ son dans la vie d'un jeune enfant est une saison aux enfers car, à la rudesse du climat et des mœurs, se mêle la per­ versité juvénile de Jean le Maigre et de son frère le Septième, balayant s'il en était besoin, l'image d'Épinal de l'inno-. »

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