Un meurtre que tout le monde commet de Heimito von Doderer (fiche de lecture)
Publié le 29/09/2013
Extrait du document
L'ensemble du récit consacre l'évolution du personnage: il conquiert difficilement son identité au travers d'une investigation que le titre du roman désigne comme universelle et symbolique. En fait, il faut qu'il tue le vieil homme en lui pour pouvoir exister vraiment mais cette quête se résout en suicide, par personne interposée, car même sa mort n'appartient pas au héros - sinon le drame prendrait un sens, s'orienterait en fonction d'une décision personnelle. Agi par les faits, Conrad ne se remet pas de son imprégnation initiale. Pendant son enfance, les jalons sont posés, pour toujours. Il ne parviendra pas à sortir du cercle, sauf à perdre la vie. La volonté démonstrative de la narration fait fi de l'anecdote: von Doderer se soucie peu de la vraisemblance policière.
«
cisme et la philosophie de saint Thomas d'Aquin (1939).
Il refuse, en effet, toute idéologie politique et tous les
«démons» de la collaboration nazie.
Par la suite, il sera
considéré comme
le représentant idéal du système politique
autrichien
de coalition.
Historien de fonnation,
il évoque la déréliction de l'homme
moderne dans une histoire collective qui ne lui donne pas
les clefs explicites de sa destinée.
Il définit, en effet, la
notion de
Menschwerdung («hominisation») : l'humain ne
s'oppose pas tant à l'animalité
qu'à sa dégénérescence pro
grammée par une aliénation consentie à
«une réalité se
conde» (Zweite Wirklichkeit) ou fausse réalité forgée à
partir des illusions humaines.
D'un point de vue esthétique,
il souscrit au dogme flaubertien de l'impersonnalité: !'écri
vain ne doit pas apparaître dans son œuvre.
Ces postulats
fondent sa vision du monde et structurent ses grandes
fresques romanesques.
Leur construction imperturbable re
produirait
le détenninisme issu de sa conviction que «la
profondeur est au-dehors».
Un meurtre que tout le monde
commet (
1938) s'impose comme son premier roman d'im
portance.
Il sera suivi par de longs romans-fleuves, L 'Esca
lier de Strudelhof (
1951) et Les Démons ( 1956), roman
complexe et énigmatique, qui évoque la société autrichienne
de la première république et s'achève le
15 juillet 1927 sur
l'évocation de l'incendie du palais de justice, annonce de
l 'Anschluss.
Puis il envisage une tétralogie dont il écrira
deux volets seulement :
Les Chutes de Slunj ( 1963) et La
Forêt frontalière
(1967).
Il meurt, en effet, en 1966.
Chez Doderer, la narration exploite
le caractère métapho
rique propre à toute représentation relevant de la fiction :
elle met en place une stratégie qui suggère et finit par rendre
visibles les imbrications, les intrications et les interactions
complexes de faits qui entrent en résonance pour donner la
signification profonde d'une existence.
Aussi convient-il de
situer von Doderer dans la tradition des romanciers psycho
logiques qui se sont attachés
à mettre en perspective les
diverses strates du conscient et de l'inconscient.
Il se révèle
proche de Flaubert par son interprétation pessimiste et iro-.
»
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