TROU DE MÉMOIRE d'Hubert Aquin : Fiche de lecture
Publié le 21/11/2018
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TROU DE MÉMOIRE
Hubert Aquin. Roman, 1968.
Pierre X. Magnant, québécois, pharmacien et révolutionnaire dévoué à la cause séparatiste, a tué Joan, sa maîtresse. C’est l’histoire de cette étrange passion qui l’a mené jusqu’au meurtre et le mènera peut-être jusqu’au suicide qu’il tente de récapituler, inlassablement, dans une autobiographie exubérante à laquelle l’érotisme, la drogue et un goût marqué pour la transgression confèrent un ton à la fois jubilatoire et douloureux. La tentation désespérante et narcissique de l’aveu coexiste avec son contraire, le silence, le secret, le
«
AQUIN Hubert
( 1929-1977).
Aquin aura tout fait- il
le disait lui-même -pour ne pas être écrivain.
Pourtant,
après avoir d'abord été étudiant en philosophie à l'uni
versité de Montréal, puis, entre 1951 et 1964, employé à
Radio-Canada et à l'Office national du film avant de
devenir courtier en valeurs mobilières et membre de la
direction du parti indépendantiste R.I.N., Aquin engage
rapidement son existence dans une perspective tout à fait
littéraire, romanesque.
Dès 1948, année où il publie ses
premiers textes dans le Quartier latin, ses réflexions et
ses prises de position apparaissent indéniablement struc
turées par une conscience d'écrivain où s'exprime une
vision très engagée de l'art et de l'action.
En 1959-1960,
il écrit un premier roman, l'Invention de la mort, qu'il
ne publie pas.
Devenu en 1963 vice-président du R.l.N.
pour la
région de Montréal, Aquin rencontre bientôt à Paris
Albert Memmi, puis revient à Montréal, où il est arrêté
(en juillet 1964) pour port d'arme illégal.
Aquin, qui
avait déclaré quelques mois plus tôt qu'il prenait le
maquis en signe de protestation contre les conditions
politiques et sociales du Québec sous le régime fédéral,
était pour cette raison soupçonné d'activités subversives,
et il fut incarcéré durant quelques mois.
Libéré sous
caution en octobre 1964, il publiait 1 'année suivante Pro
chain Épisode, un roman écrit en captivité, dont la paru
tion allait avoir dans le milieu culturel québécois l'effet
d'une véritable bombe.
A travers les influences mêlées
de Blanchot, de Nabokov et du roman policier, ce livre
présente en effet une originalité profonde et riche, qui
allait obtenir auprès de la critique et du public un succès
rapide et durable.
La problématique de ce roman se repose, dans les
œuvres suivantes, d'une manière de plus en plus recher
chée et di ffi ci le, au point que celles-ci n'ont pas reçu de
la part du public un accueil a,ussi chaleureux.
Les trois
romans qui suivent Prochain Episode (Trou de mémoire,
en 1968, 1 'Antiphonaire, en 1969, et Neige noire, en
1974) mènent peu à peu l'écriture du romancier vers une
forme romanesque où les croisements spatio-temporels,
les distorsions de la perspective narrative et les dédou
blements de toute sorte foisonnent.
A l'intérieur de cette
complexité croissante des techniques du récit, l'œuvre
d'Aquin se révèle de plus en plus affectée, au fur et à
mesure qu'elle évolue, d'une espèce de fatalité esthéti
que par laquelle tow semble désigner interminablement
dans le monde et dans le discours des significations
contradictoires et irréductibles.
En 1971 (année de publication de Point de fuite, qui
rassemble une vingtaine de courts textes écrits entre
1961 et 1970), Aquin quitte brusquement la direction de
la revue Liberté (dont il faisait partie depuis 1961) en
déclarant ne plus pouvoir collaborer à une entreprise
subventionnée par un «Conseil des arts» fédéral, c'est
à-dire antiquébécois.
Il démissionnera avec plus de fra
cas encore, en 1976, de la direction littéraire des éditions
la Presse, qu' i 1 accuse de « sabotage » et de « colonisa
tion culturelle ».
Ces prises de position percutantes s'ac
compagnent étrangement, sur le plan littéraire, d'un
silence de plus en plus pesant et tragiquement ressenti
par l'écrivain comme la conséquence d'une impuissance
politique, culturelle et littéraire, à l'échelle individuelle
aussi bien qu'à l'échelle collective, nationale.
Dans une
logique implacable de la dégradation et de la rupture, la
vie et l'œuvre d'Aquin semblent alors se confondre, sui
vre la ligne d'un même destin, entrer ensemble dans une.
»
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