TROIE (Roman de) (résumé & analyse)

TROIE (Roman de). Il apparaît vers 1165; postérieur au Roman de Thèbes et au Roman d’Énéas [voir Thèbes (Roman de), Énéas (Roman de)], il est, lui aussi, inspiré par la cour des Plantagenêts, comme en témoigne l’éloge vibrant que fait Benoît de Sainte-Maure, son auteur, d’Aliénor d’Aquitaine au milieu du roman. Avec ses 30 316 octosyllabes, c’est de loin le plus long des romans antiques. Benoît s’y appuie sur deux ouvrages fort tardifs relatifs à la guerre de Troie, ouvrages très secs qui n’ont pu constituer pour lui qu'un simple canevas : le De exci-dio Trojae de Darès le Phrygien (vie siècle), pour les 24 000 premiers vers, et l'Ephemeris belli Trojani de Dictys de Crète (ive siècle), pour les 6 000 derniers. Le choix de ces deux textes, en dépit de leur aridité comme source de l'œuvre — alors que ses devanciers puisaient à des textes littéraires de qualité comme la Thébdide de Stace ou l'Énéide — manifeste la préoccupation historique de Benoît. Celui-ci pense en effet s’entourer du maximum de garanties en préférant Darès et Dictys à Homère; en bon historien du Moyen Age, il accorde la priorité de principe aux témoins oculaires, aux auteurs de «journaux de siège». Tout cela prouvant l’indisso-ciabilité de l'histoire et du roman au milieu du XIIe siècle. A partir de ces sources, d’une incroyable pauvreté, Benoît complète, supplée, développe, comme ses devanciers dans Thèbes et dans Énéas. Comme l’auteur de Thèbes, il prend les choses plus tôt que sa source et complète Darès sur le choix de la Toison d’or, surtout en contant les amours de Jason et de Médée, épisodes absents chez Darès; comme l’auteur de V Énéas, il cherche à émouvoir par des épisodes amoureux de sa façon comme ceux qu’il consacre aux amours successives de Briséida; comme lui encore, il aime les développements autour de « merveilles » de divers ordres, tels son excursus géographique sur l’Orient et les Amazones ou son développement sur la « Chambre de beautés » et ses automates.