TRAGÉDIE DU ROI CHRISTOPHE (La) d'Aimé Césaire (résumé & analyse)
Publié le 19/11/2018
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TRAGÉDIE DU ROI CHRISTOPHE (La) Aimé Césaire. Tragédie en trois actes, un prologue et deux intermèdes, 1963. Création en 1964.
En Haïti, jeune république née de la révolte des esclaves noirs à l’aube du xixe siècle, le général Henri Christophe refuse la présidence, qui revient au mulâtre Pétion. Abandonnant la guerre civile au moment décisif, il se retire dans la province du Nord, se fait sacrer roi, s’entoure d’une cour, à la manière des rois européens, et même d’un bouffon, Hugonin. Il entreprend dès lors d’ériger un État durable et de mettre son peuple au travail. Il fait construire une gigantesque citadelle qui en symbolise l’assise et la force, militarise le travail aux champs, institue d’autorité le mariage. Exalté par un rêve brutal de grandeur, il fait exécuter l’envoyé de Louis XVIII, puis supprime son archevêque, qui faiblit. Le peuple renâcle. Tandis que Christophe célèbre l’Assomption, une attaque le terrasse. Ses généraux font défection. Vieilli et amer, le roi se donne la mort.
«
TRAGÉDIE DU ROI CHRISTOPHE
(la) .
Tragédie en trois actes et en prose
d'Aimé Césaire (né en 1913 ), publiée
à Paris aux Éditions Présence Africaine
en 1963, et créée au Festival de
Sa lzbourg en 1964.
Quelques scènes en
avaient été publiées dans Présence Afri
caine entre 1961 et 1963, avant l'édi
tion complète ; à la suite de sa création
par Jean-Marie Serreau, Césaire, tenant
com pte du travail avec le metteur en
scène et les acteurs, en a remanié le
texte pour l'éd ition définitive de 197 0.
Cés aire, qui a étudié l'histoire d'Haïti
pour son essai Touss aint Louverture
(196 0), conscient de la mission politi
que du théâtre, « éveilleur extraordi
naire » po ur des « peuples où on ne lit
pas », a sans doute commencé à écrire
sa Tragéd ie en 1959 , après avoir fondé
le Parti progressiste martiniquais.
Chr istophe, ancien esclave cuisinier , nommé
pr ésident de la Rép ublique d'Haïti, se fait sacrer
roi et entreprend de mettre le pays en ordre en
lui imposant le proje t grand iose de const ruir e
une citad elle, malgré les exhortations à la mo dé
ra tion de son épous e, Mme Christo phe.
En butte
à la résistance indolente de ses sujets, de la cour
qu'il a recréée à l'ima ge de celle de France, il
s'é croule paralysé, et me urt, abandonné par son
peuple .
Après le modèle grec, eschyléen -
revu et corrigé par Nietzsche -de Et les
chiens se taisaient (1946), la Trag édie se
réfère à Shakespeare (de même qu'Une
tempête en 1969, faisant de Caliban l'esc
lave noir du magi cien Prospero) .
L'< < attentat du Destin», la «Fortune
envieu se » qui frappe Christop he,
comme dans les drames historiques ou
dans Macbeth, fauche le héros de la
négritude dans ses ambitions politi
que s.
Il n'est plus le rebelle, mais le
gouvernant, devenu la victime de sa
fortune politiq ue.
Comme dans la tra
gédie shakespearienne et ses procédés
de mise en abyme, la pièce se donne
pour ce qu'elle est: une représentati on,
ainsi d'ailleurs que le suggère le titre,
qui en qualifie, au second degré, le
ge nre .
Le Prologue (dans lequel le
« présentateur-commentateur » intro
duit les personnages, situe l'act ion), ou
l' intermède à la fin de l'acte I partici
pent de cette mise en abyme du specta
cle dont la fonct ion, toute brech
tienne, semble de permettre une
distanciation ironique à l'égard des
p ersonnag es.
La Tragéd ie, en ce sens,
démystifie le genre tragique, en même
temps qu'elle le recr ée.
Les résonances shakespeariennes
sont amplifiées par le volontaire
" mélange des genres » -pour repren
dre une expression de Hugo, à travers
qui Césa ire semble lire Shakespeare -,
assoc iant le « grotesque » et le bouffon
de la farce au tragique pur, ainsi qu' au
lyrisme.
En cela, la Tragéd ie se distin
gue nettement de la première pièce de
Césaire, Et les chiens se taisaient, stylisti
quement homogène dans le registre
d'une parole solennisée, sacralisée.
Outre le patois créolisant des « pa y
sans » (II, 1, Intermè de), qui semblent
sortis de l'uni vers de Molière, ou le
ridicule des propos de la cour, c'est évi
demment au « bouffon » Hugonin
qu'est principalement dévolue la fonc
tion ironique, marquée par un niveau
de langue populaire, souvent ordurier,
et qui accueille des expressions créoles,
en particulier dans les chansons
( « L'Empéré vini oué, coucou, 1 Dansé
l'E mpéré », Il, 3).
Christophe lui-.
»
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