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Terre DES HOMMES, de Saint-Exupéry

Publié le 18/05/2019

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Terre DES HOMMES, reportage romancé de Saint-Exupéry (1939). Après Vol de nuit, qui avait obtenu le prix Femina en décembre 1931, Saint-Exupéry était entré dans un long silence : pilote de ligne, pilote d'essai, chargé de mission auprès de la compagnie Air France, observateur de Paris-Soir à Moscou, correspondant de guerre en Espagne, il lui fallut un grave accident, alors qu'il tentait la liaison New York-Terre de Feu (février 1938), pour qu'il retrouve le loisir d'écrire. Saint-Exupéry se livre alors à une méditation sur le monde et les hommes en faisant de l'avion un instrument d'analyse original, qui permet de repenser les vieux problèmes métaphysiques. Huit chapitres évoquent successivement les débuts de pilote de l'auteur, les camarades Mer-moz et Guillaumet, lequel apporte une leçon de ténacité et de courage ( « Ce que j'ai fait, jamais aucune bête ne l'aurait fait » ), la civilisation technique en quête d'une âme, les paysages survolés par l'aviateur et qu'il entremêle à ceux de ses souvenirs d'enfance, la « religion du désert ». Un hymne au « métier », école de fraternité et de don de soi, un chant d'espoir en l'homme dans sa recherche de l'union. « Écrire » n'est qu'une « conséquence ».


« Il est deux cents millions d'hommes, en Europe, qui n'ont point de sens et voudraient naître.

L'industrie les aarrachés au langage des lignées paysannes et les a enfermés dans ces ghettos énormes qui ressemblent à desgares de triage encombrées de rames de wagons noirs.

Du fond des cités ouvrières, ils voudraient être réveillés. Il en est d'autres, pris dans l'engrenage de tous les métiers, auxquels sont interdites des joies du pionnier, les joiesreligieuses, les joies du savant.

On a cru que pour les grandir il suffisait de les vêtir, de les nourrir, de répondre àtous leurs besoins.

Et l'on a peu à peu fondé en eux le petit bourgeois de Courteline, le politicien de village, letechnicien fermé à la vie intérieure.

Si on les instruit bien, on ne les cultive plus.

Il se forme une piètre opinion sur laculture celui qui croit qu'elle repose sur la mémoire de formules.

Un mauvais élève du cours de spéciales en sait plussur la nature et sur ses lois que Descartes et Pascal.

Est-il capable des mêmes démarches de l'esprit? Tous, plus ou moins confusément, éprouvent le besoin de naître.

Mais il est des solutions qui trompent.

Certes onpeut animer les hommes, en les habillant d'uniformes.

Alors ils chanteront leurs cantiques de guerre et rompront leurpain entre camarades.

Ils auront retrouvé ce qu'ils cherchent, le goût de l'universel.

Mais du pain qui leur est offert,ils vont mourir.

(...) Dans un monde devenu désert, nous avions soif de retrouver des camarades : le goût du pain rompu entrecamarades nous a fait accepter les valeurs de guerre.

Mais nous n'avons pas besoin de la guerre pour trouver lachaleur des épaules voisines dans une course vers le même but.

La guerre nous trompe.

La haine n'ajoute rien àl'exaltation de la course. Pourquoi nous haïr? Nous sommes solidaires, emportés par la même planète, équipage d'un même navire.

Et s'il estbon que des civilisations s'opposent pour favoriser des synthèses nouvelles, il est monstrueux qu'elles s'entre-dévorent.

Puisqu'il suffit, pour nous délivrer, de nous aider à prendre conscience d'un but qui nous relie les uns auxautres, autant le chercher là où il nous unit tous.

Le chirurgien qui passe la visite n'écoute pas les plaintes de celuiqu'il ausculte : à travers celui-là, c'est l'homme qu'il cherche à guérir.

Le chirurgien parle un langage universel.

Demême le physicien quand il médite ces équations presque divines par lesquelles il saisit à la fois et l'atome et lanébuleuse.

Et ainsi jusqu'au simple berger.

Car celui-là qui veille modestement quelques moutons sous les étoiles, s'ilprend conscience de son rôle, se découvre plus qu'un serviteur.

Il est une sentinelle.

Et chaque sentinelle estresponsable de tout l'empire. A.

de SAINT-EXUPÉRY, Terre des Hommes. Rédigez de ce texte, soit un résumé qui respecte l'ordre des idées telles qu'elles sont présentées, soit une analysequi regroupe les idées essentielles. Vous dégagerez ensuite un problème auquel vous attachez un intérêt particulier, vous en préciserez les données etvous exposerez, en les justifiant, vos propres vues sur la question. CORRIGÉ Remarques préalables Terre des Hommes est un ouvrage classique.

Aussi n'a-t-on pas indiqué la date de parution : 1939. Bien que les allusions à l'actualité (expansionnisme de /'Allemagne nazie et de l'Italie fasciste) aient été gommées, ilimporte de situer convenablement le texte à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, au cours de laquelle devaitdisparaître tragiquement l'écrivain-aviateur. I.

Analyse entièrement rédigée Introduction Le passage proposé contient à la fois une méditation politique et métaphysique, et un appel.

On peut noter l'emploidu présent de l'indicatif, qui sert à exprimer des vérités générales, et la présence de maximes martelées à la manièreclassique : la dernière phrase, qui contient une formule digne de Pascal, est restée célèbre.I.

Le malaise de l'homme moderne Saint-Exupéry commence par analyser le malaise de l'homme moderne, ou, en termes marxistes, l'aliénation duprolétariat industriel.

Il traite en sociologue les phénomènes de déracinement et de « massification » : abandon del'agriculture et de l'artisanat; rupture des liens sociaux traditionnels à l'intérieur des cités-dortoirs; travail à lachaîne, dépourvu de sens et de variété, etc.

Cette déshumanisation n'est pas réservée aux ouvriers d'usine.

Ellegangrène également la petite bourgeoisie et probablement les cadres (le « technicien » représente aussi bien l'agenttechnique que l'ingénieur).

L'instruction gratuite, laïque et obligatoire ne distille selon lui qu'un ersatz de culture, ellene favorise pas la « vie intérieure », la méditation philosophique, jugée plutôt superflue que dangereuse.

Le «minimum vital » ne suffit pas : l'homme ne vit pas seulement de pain. Dans cet univers concentrationnaire (« ghettos énormes »), chez cette sous-humanité, subsiste une aspirationnoble, qui n'est pas simplement besoin d'évasion, mais quête de la vie authentique (notez les métaphores de lanaissance, du réveil) : l'homme « massifié », déshumanisé, souhaite reconstituer une collectivité à l'échelle humaine,. »

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