Splendeurs et misères des courtisanes : Fiche de lecture - Balzac
Publié le 16/11/2018
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Splendeurs et misères des courtisanes
Composé entre 1835 et 1847, élaboré ainsi conjointement à nombre d’œuvres très différentes, ce roman est le produit exemplaire de la création balzacienne comme de la société contemporaine. Les principaux personnages du Père Goriot et d'illusions perdues, notamment, voient leur destin se prolonger, s’épanouir et s’affirmer en dévoilant l’essence même d’une société dont Balzac est ici, par excellence, le « secrétaire ».
Balzac exploite le goût contemporain pour la peinture des milieux interlopes et rivalise avec Eugène Sue, dont les Mystères de Paris sont publiés en 1842. Mais voleurs et assassins sont, dans l’œuvre balzacienne, particulièrement énigmatiques et terribles; ils fascinent, en les effrayant, une bourgeoisie et surtout une aristocratie qui ne peuvent les vaincre qu’en les absorbant. De ces forces profondes Jacques Collin, le Vautrin du Père Goriot, est l’émanation idéale et le type « individualisé ». Figure du démon à qui Lucien vend son âme, prodigieux metteur en scène de la comédie humaine, il incarne la puissance même de l’existence. « Ignoble et grand, obscur et célèbre, dévoré surtout d’une fièvre de vie », il dresse, de l’enfer où il se meut, son impressionnante stature. Ce « Mal, dont la configuration poétique s’appelle le Diable », Balzac le fait non seulement voir mais admirer : Jacques Collin, « en qui se résument la vie, les forces, l’esprit, les passions du bagne, et qui (...) en présente la plus haute expression », est « monstrueusement beau ». En lui brille une lumière qui est celle de la vie, conçue essentiellement par Balzac comme volonté. Bien qu’il ait changé de visage, Rastignac le reconnaît à son magnétisme et obéit immédiatement à cette voix qui lui impose « silence et dévouement ». Traversant la société comme une force irréfragable, Collin affirme une volonté nécessaire aussi bien au bagnard évadé qu’il est qu'au policier qu’il devient en une « dernière incarnation ».
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>>, Balzac le fait non seulement voir mais admirer :
Jacques Collin, «en qui se résument la vie, les forces,
l'esprit, les passions du bagne, et qui ( ...
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plus haute expression >>, est « monstrueusement beau >>.
En lui brille une lumière qui est celle de la vie, conçue
essentiellement par Balzac comme volonté.
Bien qu'il
ait changé de visage, Rastignac le reconnaît à son magné
tisme et obéit immédiatement à cette voix qui lui impose
« silence et dévouement >>.
Traversant la société comme
une force irréfragable, Collin affirme une volonté néces
saire aussi bien au bagnard évadé qu'il est qu'au policier
qu'il devient en une « dernière incarnation >>.
Synopsis.
-• Comment aiment les fill es .» 1824.
de
retour dans la société parisienne.
Lucien de Rubempré
accueille au dernier bal de l'Opéra Esther Gobseck.
dite La
Torpille.
Dans le masque qui suit Lucien.
Rastignac devin e.
à sa voix .
Jacques Collin.
alias Vau trin.
Le lendemain.
sous
le nom de Carlos Herrera , J.
Colli n se présente chez Esther
et la sauve du suicide.
Il la force à entr er dans une maison
religieuse.
puis.
quelques mois plus tard.
l'enferme dans un
petit appartement en lui imposant une femme de chambre
(Europe).
une cuisiniè re (Asie).
un serviteur (Paccard).
Lucien.
de son côté.
mène la vie brillante d'un mondain à
s uccè s.
Une nuit d'août 1829.
le baron de Nucingen aper·
ç oit Esther 3u bois de Vincennes et tombe amoureux de
cette femmP.
entrevue qu'il cherche.
par tous les moyens.
à retrouver.
Carlos Herrera voit dans ce tte passion de vieil·
lard l'occasion de se procurer l'argent nécessaire à la car·
ri ère de Luc en.
"A combien l'amour revient aux vieillards.
» Asie.
sous
le nom de t�.�m• de Saint-Estève.
manœuvre Nucingen et lui
soutire des sommes de plus en plus importantes.
Pouss ée
par Carlos e� pour aider Lucien.
Esther accepte de se prosti
t ue r à N ucin ge n.
Mais.
désespérée par son geste.
elle
s'empoisonne.
alors qu'elle vient d'hériter de la fortune
léguée par son oncle Gobseck.
Les malversations de Carlos
qui écrit un faux testament en faveur de Lucien.
les men
songes de Lucien lui-même amènent l'arrestation succes
sive des deux hom mes.
" Où mènent les mauvais chemins.
" Le jug e Camu sot.
à
qui est confiée l'affaire.
doit compter avec la ha ute so cié té
pr essé e d'é:ouffer un scandale qui la co mp romet à travers
Lucien.
J.
Collin.
quant à lui.
soutien t devant Camusot être
Carlos Herrera.
Mais le faible Lucien se trahit et révèle au
juge la véritable identité du força t.
Le 15 mai 1830.
il se
pend dans sa cellule.
après avoir écrit lettres et
dé cla rat ion� •.
" La dernière incarnation de Vautr in.
" Profondément
ébranlé par la mort de Lucien.
résolu à se venger de la
société et o:>ligé de se sortir d'une position difficile vis-à -v is
de ses ancitlnS compagnons de bagn e.
J.
Collin avoue tout
au directe u r de la priso n.
puis négocie des lettres compro·
mettantes cont re la grâce de Théodore Calvi.
un bagnard à
qui le lie une profon de affection.
Délibérément passé dans
l'autre cam:>.
il devient chef de la Sûreté : «Après avoir
exercé ses fonctions pendant environ quinze ans.
Jacques
Collin s'est retiré vers 1845 •·
Plus que l'illustration littéraire d'un type pittoresque
incarné réellement par Vidocq, l'ancien forçat devenu
sous J'Empire chef de la Sûreté, que Balzac a rencontré
plusieurs fois et dont il connaît les ouvrages publiés
entre 1829 et 1844, Jacques Collin représente la force
détonante du roman.
Balzac explique (préface à la pre
mière édition, 1845) qu'« il n'y a plus d'énergie que
dans les êtres séparés de la société.
La littérature actuelle
manque de contrastes, et il n'y a pas de contrastes possi
bles sans distances ».
Si le monde de la pègre peut
côtoyer, presque impunément, l'aristocratie et jouer avec
elle une partie que ni l'un ni l'autre ne perd ni ne gagne,
c'est parce que lui ne cache rien, dans ses agissements,
des principes inavouables qui gouvernent aussi l'action
des grands.
Par-delà les oppositions circonstancielles,
une même essence caractérise les deux sphères sociales :
le «privilège d'être partout chez soi>>, par exemple,
«n'appartient qu'aux rois, aux filles et aux voleurs>> .
C'est donc par Jacques Collin que le monde est amené à
se révéler à lui-même, que sous la duchesse perce la fille
et sous le policier 1' assassin.
Dans
ce monde de courtisanes splendides et miséra
bles, Esther et Lucien tiennent les premiers rôles.
Person
nage de mélodrame, prostituée au grand cœur dont les
fautes sont lavées par l'amour, victime désignée du bour
reau, Esther n'a d'avenir que dans la mort.
Mais, choisis
sant son destin, la >.
Cet« homme
à moitié femme», qui ne vit que de veulerie et d'aban
don, provoque par là même la pensée, l'action ou le
sacrifice des autres.
Dès l'ouverture de l'œuvre, Lucien
suscite chez les participants au bal -et, par suite, chez
le lecteur -une série de questions.
Il fait naître le
double amour de Carlos et d'Esther, métamorphosant
l'une en« déesse >>, révélant chez l'autre, dans un dernier
sursaut de lucidité, la« poésie du mal ».Avec lui, Balzac
annonce une certaine forme, riche d'avenir, de dissolu
tion du personnage romanesque.
Roman foisonnant, tortueux, inachevé, Splendeurs et
misères des courtisanes reste malgré tout une œuvre
somme de Balzac, tant par sa longueur, par la durée de
sa conception et de sa composition que par l'épaisseur
de son univers.
Le xJx• siècle est là.
Les deux thèmes
mêlés de l'amour, qui révèle son côté nocturne, infernal
et désespéré, et de la société, qui, de la Conciergerie au
salon du duc de Grandlieu, se donne à voir teJle qu'elle
est à travers ses masques et ses secrets, font de cette
œuvre, au sens plein du mot, un véritable monument.
BiBLIOGRAPHIE Splendeurs et misères des courtisanes, Classiques Garnie r,
1958, in trod uctio n et not es d'Antoine Adam: Splendeurs er misè
res des courtisanes.
Garnier-Flammarion, 1968, intr od uction de
Pierre Citron; Splendeurs et misères des courtisanes, Gallimard,
Coll.
>, 1973, introduction et notes de Pierre Barbéris.
A consulter.
-Jean Pommier, l'Invention et l'écriture dans
"la Torpille" d'Honoré de Balzac.
Droz et Minard, 1957: Max
Milner.
« la Poésie du mal ch ez Balzac», Année balzacienne.
1963: René Guise, « Balzac et Je roman-feuilleton », Année bal
zacienne, 1964..
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